Le "peuplement", le plan de Valls contre la "ghettoïsation"

Manuel Valls a déclaré jeudi que la lutte contre la "ghettoïsation" dans les quartiers pauvres passait par une "politique du peuplement".
Manuel Valls a déclaré jeudi que la lutte contre la "ghettoïsation" dans les quartiers pauvres passait par une "politique du peuplement". © AFP
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avec Aurélie Herbemont et Thomas Sotto , modifié à
Le Premier ministre veut mélanger les populations dans tous les territoires. Un chantier crucial, mais "quasi impossible".

Contre "l'apartheid" et la "ghettoïsation" des quartiers pauvres, Manuel Valls prône le "peuplement".  Les politiques publiques menées "depuis 30 ans", n'ont pas permis d'éviter "la relégation, le regroupement ethnique, religieux" ni permis "la mixité des populations", a fait valoir le locataire de Matignon.

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"Je ne supporte pas, comme républicain, de voir cet enfermement, cette relégation dans un certain nombre de ces quartiers (...), que dans des écoles on ne trouve que des élèves issus de familles pauvres, souvent monoparentales, issues uniquement de l'immigration, des mêmes cultures et de la même religion", a encore martelé le Premier ministre, jeudi à Matignon. Une ambition irréalisable ? Éléments de réponse.  

"Peupler", ça veut dire quoi. Manuel Valls veut favoriser la mixité des populations dans tous les territoires. En clair : qu'il n'y ait plus une population à Neuilly-sur-Seine radicalement différente de celle de Saint-Denis. Un vaste chantier qui passe par le logement, la rénovation urbaine et l'aménagement du territoire.

A Matignon, ce que l'on vise, c'est d'abord la construction de logements privés, pas uniquement des HLM, dans les quartiers considérés comme sensibles, pour favoriser davantage de mélange social et culturel entre les habitants. Cela passe aussi par les constructions de logements sociaux dans les zones "favorisées".  Le Premier ministre veut aussi réformer l'attribution des logements sociaux, pour qu'elle soit "plus transparente, objective et unifiée" selon les termes d'un conseiller de Manuel Valls.

Banlieue

© THOMAS SAMSON / AFP

"L'apartheid, ça existe". Pour François Pupponi, maire socialiste de Sarcelles et président de l'Anru, l'Agence nationale pour la rénovation urbaine, Manuel Valls a raison de parler d'apartheid. "Dans les faits, ça existe. Ca s'est organisé en France, même si cela choque certain. Aujourd'hui, dans les faits, les logements sont souvent attribués en fonction des origines. Vous avez 'la tour des Maliens', 'la tour des Sénégalais' etc.", assure l'élu, vendredi matin sur Europe1. "La mixité sociale est un terme inventé par les bobos parisiens dans les beaux quartiers. Dans les beaux quartiers, ça existe car il y a de la promotion sociale", poursuit-il.

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"Il faut redéfinir les règles". Mais pour le président de l'Anru, si le projet de Manuel Valls est ambitieux, il est aussi "quasi impossible" à réaliser. "On a essaie depuis des années, on y arrive pas. D'abord les gens ne veulent pas se mélanger. Lorsqu'une mairie où il y a des quartiers 'ghettoïsés' décide de favoriser la mixité sociale, il  va voir la mairie d'à côté. Et la mairie d'à côté leur dit non", poursuit le député-maire.

Selon lui, le seul moyen que cela marche, c'est de changer les règles d'attribution des logements. Et pas n'importe comment. "Il faudrait que l'on fasse de l'attribution de logements en fonction de l'origine des personnes, ce qui est pour le moment illégal. Si l'on veut être efficace, il faut redéfinir les règles, les textes, la loi, pour changer la manière d'attribuer des logements. Si l'on ne veut plus des ghettos ethniques, il faut partager les populations. Et pour partager, il faut savoir qui partager", détaille François Pupponi. Qui conclut : "cela fait dix ans que les politiques nous disent, à ce sujet, 'vous êtes fous'. Et aujourd'hui on se rend compte des conséquences".