Le Parlement européen, machine à recycler de l'UMP

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ON BALANCE - Certaines têtes de listes UMP le sont plus pour leur envergure nationale que pour leur connaissance de l'Europe.

"L'UMP est le seul parti qui peut relever les défis de l'Europe". Voilà la promesse de Jean-François Copé. Son parti a pourtant eu toutes les peines du monde à se mettre d’accord sur un programme commun, divisé qu’il est entre les fédéralistes et les souverainistes. Pour porter ce programme, huit têtes de listes ont été investies. Certaines d’entre elles font débat au sein même de l’UMP, où l’on joue à tue-tête la musique du "bal des recasés". "Oui, la France recycle ses personnalités politiques à Strasbourg. Je ne suis pas sûr que Nadine Morano, Michèle Alliot-Marie ou Renaud Muselier aient vraiment la volonté de mener une carrière européenne...", a attaqué Yves Bertoncini, directeur de Notre Europe-Institut Jacques Delors, sur le site de L'Express.

>> Europe1.fr vous présente ces candidats pas franchement intéressés par les questions européennes.

Nadine Morano

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Son cas est certainement celui qui a fait le plus jaser dans les couloirs de la rue de Vaugirard. Adoubée par Nicolas Sarkozy, Nadine Morano, bien que battue en Meurthe-et-Moselle lors des élections législatives de juin 2012, représentera sa famille politique dans l’Est. "C'est un secret de Polichinelle que de dire que je me suis toujours intéressée aux questions européennes ", a-t-elle assuré en réponse à ceux qui, dans son camp, lui assènent un procès en incompétence. "Toujours intéressée" ? L'Express a pourtant relevé qu'elle n'a consacré, sur son blog,  qu'un seul billet aux questions européennes, "de surcroît erroné", et que, le jour de son investiture, elle s'est abonnée en urgence à de multiples twittos européens.

Bernard Accoyer fait partie de ses plus farouches contempteurs, lui qui n'hésite pas à parler de "mercato du recyclage". "Qu'apporterait de plus Nadine Morano au Parlement européen ?", s'est encore demandé dans un entretien au Monde l'ancien président de l'Assemblée nationale, où il plaidait ouvertement pour le maintien de l'eurodéputé sortant, Arnaud Danjean, relégué en seconde position sur la liste. Ce même Arnaud Danjean qui, selon Le Point, craint que l’ancienne ministre de l’Apprentissage de Nicolas Sarkozy ne lui fasse perdre des voix : "dès que je fais un meeting avec elle, je suis sûr de perdre trois points ! Lors d’un discours pendant un meeting chez moi, en Bourgogne, je recevais des SMS de gens s’étonnant qu’elle ne parle que de Sarkozy, et pas de l’Europe." Député du Haut-Rhin depuis 2002, Arlette Grosskost estime elle aussi que "Nadine Morano est plus attirée par du national, ça apparaît comme du recasage". 

Brice Hortefeux

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La situation de l'ancien ministre de l'Intérieur est différente. Élu lors des élections européennes de 2009, il n'a jamais siégé du fait de ses fonctions ministérielles. Mais quand, fin février 2011, il est prié de quitter le gouvernement, il se rappelle alors au bon souvenir du parlement européen, en demandant sa réintégration. UAprès avis du Conseil d'Etat et la démission de sa suppléante Catherine Soullie, il a retrouvé son poste, alors que le règlement intérieur du parlement pouvait lui laisser craindre le pire. Depuis, on ne peut pas dire que Brice Hortefeux se soit plongé à corps perdu dans les dossiers européens…

Mais en attendant 2017 et le retour espéré (et si possible victorieux) de son ami de 30 ans Nicolas Sarkozy, l'ancien ministre de l'Identité nationales aimerait bien conserver au moins un mandat, lui qui ne s'est présenté ni aux législatives ni aux municipales. Un mandat plutôt "sympa" : 6.200 euros net mensuel de salaire, auxquels s'ajoutent 304 euros par jour de présence à Strasbourg, 4.300 euros par mois de frais forfaitaires et divers avantages.

Renaud Muselier

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Comme Brice Hortefeux, il sera totalement dépourvu de mandat s'il échoue le 25 mai prochain. Déjà battu aux législatives à Marseille par la ministre PS Marie-Arlette Carlotti, Renaud Muselier espérait le retrait de Jean-Claude Gaudin de la mairie de Marseille pour lui succéder. En vain. Il y avait donc urgence à lui retrouver un poste. Décision a été prise de lui octroyer la tête de liste dans le Sud Est au détriment de Françoise Grossetête, députée européenne depuis 1994, et qui devra cette fois se contenter de la seconde place. Pourtant, Renaud Muselier en convient lui même, le Parlement européen, "ce n'était pas du tout prévu. J’avais tout arrêté, mais quand on me l’a proposé, je n’ai pas hésité."

Selon un sondage Ifop pour Europe 1, Le Figaro et LCI, Renaud Muselier peut raisonnablement espérer entrer pour la première fois de sa carrière dans l'hémicycle strasbourgeois : il est en tête avec 28% des suffrages, devant Jean-Marie Le Pen (23%) et Vincent Peillon, lui aussi un recyclé du PS, avec 13%.

Michèle Alliot-Marie

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Son CV est l'un des plus fournis de la classe politique française : ministre de la Justice, des Sports, de la Défense, des Affaires étrangères, de l'Intérieur, maire de Saint Jean-de-Luz ou encore présidente du RPR. Mais Michèle Alliot-Marie a désormais un problème : virée du gouvernement en 2011 suite à la polémique sur ses vacances en Tunisie en plein Printemps arabe, elle retrouve son poste de député des Pyrénées-Atlantiques, qu'elle perd l'année suivante lors des élections législatives.

Aujourd'hui, Michèle Alliot-Marie n'a donc plus aucun mandat. Son nom a circulé pour les municipales à Neuilly, mais c'est finalement le maire sortant, Jean-Christophe Fromantin (UDI), qui a été réinvesti. Restait donc les élections européennes. Mais dans "son" Sud Ouest, la place semblait promise à Alain Lamassoure, eurodéputé sortant et président de la Commission des Budgets du Parlement européen. Il a finalement dû céder sa place à Michèle Alliot-Marie et a été recasé en Ile-de-France. Non sans amertume. "MAM a créé un courant Droite gaulliste qui représente 8 à 10%. Copé, qui ne m'aime pas et est obsédé par 2017, se dit : 'MAM ne vaut rien, mais elle a la capacité de nuire'", a regretté Alain Lamassoure. Pourtant, Michèle Alliot-Marie aime tellement le Parlement européen qu'elle "va perdre de l'argent" en y allant. "Si je vais aux européennes, c’est que j’ai envie de faire quelque chose pour l’Europe, et pas pour un avantage quelconque", ajoute l'ex-ministre du gouvernement Fillon.

Rachida Dati

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Elle n'a jamais caché que, pour elle, le Parlement européen était une sorte de bannissement. En juin 2009, agacé par ses sorties médiatiques répétées et son mépris des magistrats, Nicolas Sarkozy exfiltre sa Garde des Sceaux au Parlement européen. Elle s'y ennuie au plus haut point, et rêve de revenir exercer des fonctions nationales à Paris. Et pour ceux qui auraient des doutes, Rachida Dati l'a confié à une amie lors d'une conversation téléphonique, en décembre 2009, alors que les caméras enregistraient à son insu : "je suis dans l'hémicycle du Parlement de Strasbourg. J'en peux plus ! Je pense qu'il va y avoir un drame avant que je finisse mon mandat. Je suis obligée de rester et de faire la maligne car il reste un peu de presse".

Problème : l'ex-étoile montante de la Sarkozie n'a pas réussi son retour au premier plan en France. Sa volonté de candidater à la mairie de Paris s'est en effet heurtée à la détermination sans faille de Nathalie Kosciusko-Morizet. Et après avoir un temps envisagé de défier François Fillon lors des législatives, elle a finalement dû renoncer. Bon gré mal gré, c'est donc au Parlement européen qu'elle devrait passer les six prochaines années, elle qui est seconde sur la liste d'Alain Lamassoure en Ile-de-France. Un endroit qu'elle n'apprécie pas, mais où elle a déjà un petit surnom : "la touriste de l'UMP".

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