Le Liban partagé sur la création d'un tribunal international

  • Copié
Rédaction Europe1.fr , modifié à
Le Conseil de sécurité des Nations unies a adopté mercredi une résolution instituant un tribunal spécial chargé de juger les responsables de l'assassinat de Rafic Hariri. L'ancien Premier ministre libanais a été tué dans un attentat à Beyrouth en février 2005. Après les scènes de liesse mercredi soir à Beyrouth, les réactions de la classe politique et la presse libanaises sont nettement plus nuancées. La résolution de l'Onu entrera en vigueur le 10 juin.

Le Liban est partagé après la décision de l'Onu de créer un tribunal international pour juger les assassins de l'ancien premier ministre Rafic Hariri. Mercredi soir, dans les rues des quartiers sunnites de Beyrouth, la foule a fêté l'adoption de la résolution en tirant des feux d'artifice et en allumant des bougies. Certains ont même tiré en l'air en signe de joie. De matin, les réactions de la classe politique et la presse sont nettement plus nuancées. Ali Hamadeh, éditorialiste d'An Nahar, estime que "le noeud se resserre autour du cou des meurtriers" mais reconnaît que le tribunal "pourrait ne pas apporter immédiatement la sécurité". "Il pourrait pousser ceux pour qui il sera nuisible aux menaces, à l'intimidation et au sabitage", prévient-il. Les détracteurs de la création unilatérale de ce tribunal par l'Onu sont eux aussi pessimistes, en écho à la mise en garde formulée mercredi par Damas, qui a affirmé que la décision du Conseil de sécurité pourrait aggraver l'instabilité du Liban. Pour Omar Nechabi, qui écrit dans le journal Al Akhbar, proche de l'opposition, la création de ce tribunal sans consensus "soulève de graves inquiétudes quant à la sécurité et à la stabilité". "L'établissement de ce tribunal en vertu d'une résolution internationale et sans le consentement d'une vaste portion de la population (...) élargit et approfondit la fracture entre les Libanais", juge-t-il. Saad al Hariri, fils de l'ancien Premier ministre assassiné, a qualifié le vote du Conseil de sécurité de moment historique pour le Liban. Hariri, qui dirige la coalition anti-syrienne au pouvoir, a estimé mercredi que le temps était venu de mettre de côté les querelles politiques et a promis de prendre des mesures destinées à favoriser la réconciliation nationale. Mercredi soir, le Conseil de sécurité de l'Onu a adopté une résolution créant un tribunal spécial pour juger les responsables de l'assassinat de l'ex-Premier ministre libanais. Dix membres ont voté en faveur de la résolution, rédigée par les Occidentaux, et les cinq autres (Russie, Chine, Qatar, Indonésie et Afrique du Sud) se sont abstenus. Nul n'a voté contre. Le principe de la création de ce tribunal avait été décidé en 2005. Une convention l'établissant a été signée en 2006 entre l'Onu et le gouvernement libanais, mais sa ratification par le Parlement de Beyrouth n'a pu avoir lieu, en raison de la crise politique au Liban. Cette résolution entrera en vigueur le 10 juin, à moins que les députés des partis politiques libanais ne surmontent leurs divergences et ratifient eux-mêmes les statuts du tribunal. Le 14 février 2005, Rafic Hariri était assassiné, avec 22 autres personnes, dans un attentat à la bombe sur le front de mer de Beyrouth. Il avait pris position contre la présence syrienne au Liban. Le tollé suscité dans la population par la mort de Rafic Hariri a contraint Damas à retirer ses troupes du Liban. La Syrie a d'ailleurs été pointée du doigt dans cette affaire par les enquêteurs de l'Onu mais a démenti toute implication.