Le FN au deuxième tour : pourquoi cette année il n'y a pas de mobilisation unitaire

Le 1er mai 2002, jusqu'à 1,5 millions de personnes s'étaient rassemblées contre le Front national. (Archive)
Le 1er mai 2002, jusqu'à 1,5 millions de personnes s'étaient rassemblées contre le Front national. (Archive) © AFP
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Sébastien Guyot édité par C.O. , modifié à
Loin de faire bloc comme en 2002 contre le Front national, les syndicats célèbrent lundi le 1er mai en ordre dispersé. Les uns veulent appeler à "faire barrage" à Marine Le Pen, d'autres à voter pour Emmanuel Macron et certains à "battre les deux candidats".
L'ENQUÊTE DU 8H

Les syndicats appellent à défiler lundi 1er mai pour défendre les travailleurs mais aussi pour faire barrage à Marine Le Pen. Mais cette année, il n'y aura pas de mobilisation unitaire comme en 2002. A l'époque, jusqu'à 1,5 million de personnes s'étaient rassemblées.

Plus d'effet de surprise. Plusieurs raisons expliquent cette moindre ampleur annoncée de la manifestation. Car à la différence du 21 avril 2002, lorsque Jean-Marie Le Pen s'était qualifié au second tour de la présidentielle, ce n'est pas une surprise. Depuis au moins deux ans, les sondages annoncent la présence de Marine le Pen au second tour.

En 2002, la nouvelle avait eu l'effet d'un coup de tonnerre. "On a pleuré comme des madeleines et puis très vite un de mes copains m'a appelé pour me dire 'il faut réagir, faut qu'on aille à la Bastille'. Lui était en banlieue, il a pris sa voiture, il est venu, on a marché toute la nuit", se souvient Florence, 29 ans à l'époque. "Déjà dans cette réaction là, en étant ensemble, on avait moins l'impression que la France était cette espèce de pays où à chaque fois qu'on croisait quelqu'un, il était potentiellement raciste".

Un FN banalisé. Marine Le Pen a gommé l'image d'un FN raciste et antisémite de Jean-Marie Le Pen. Une banalisation qui explique en partie pourquoi Florence n'ira pas manifester cette année. Elle reconnait également craindre des violences et que les manifestations ne dégénèrent. 

Arthur, lui, ne comprend pas les slogans scandés par les manifestants ces derniers jours "Ni Macron, ni Marine, ni patrie, ni patron" : "Ce que je vois des manifestations n'a absolument rien à voir avec ce qu'on avait en 2002 qui couvrait un grand spectre de la population. Il y avait des jeunes, des moins jeunes. On ne peut absolument pas les mettre sur le même plan", confie l'homme de 46 ans.

Un parti toujours xénophobe. Marine Le Pen a donc réussi son pari. Son parti est devenu un parti comme les autres, même s'il reste un parti xénophobe au sens littéral du mot. "La xénophobie, c'est la haine ou la peur de l'étranger. Or quand vous entendez Marine Le Pen, tout ce qui vient de l'étranger est négatif et l'un de ses mots clés, c'est "frontières", rétablir les frontières douanières, physiques, morales, culturelles etc.", explique Cécile Alduy, chercheuse et spécialiste de l'extrême droite. "Mais elle, en tant que personnage, n'est pas aussi agressive et perçue comme aussi dangereuse que Jean-Marie Le Pen".

Démonter le programme plutôt que dédiaboliser. En 2002, Jacques Chirac avait refusé de débattre avec Jean-Marie Le Pen. Ce n'est pas le cas en 2017 avec Marine Le Pen. D'ailleurs, la question ne s'est même pas posée confirme l'entourage d'Emmanuel Macron. Car Marine Le Pen a participé à tous les débats avant le 1er tour et parce qu'aujourd'hui, ce qui compte, précise-t-on encore dans l'entourage du candidat d'En Marche !, ce n'est pas de la diaboliser mais de l'affronter et de démonter son programme.