LA PHOTO - "On a été autorisé à faire la photo du gouvernement, mais avec des conditions"

Après avoir protesté, la quinzaine de photographes a finalement été autorisée à assister à la "photo de famille" du gouvernement.
Après avoir protesté, la quinzaine de photographes a finalement été autorisée à assister à la "photo de famille" du gouvernement. © THOMAS SAMSON/AFP
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Mathilde Belin
Thomas Samson, photographe à l'AFP, a assisté à la "photo de famille" du nouveau gouvernement, qui a donné lieu à un nouvel accrochage entre la presse et l'Élysée.

Chaque semaine, Europe1.fr vous propose un regard décalé sur l'actualité politique dans l'objectif d'un photographe de l'AFP. 

C'est une tradition républicaine pour chaque nouveau gouvernement : la fameuse "photo de famille". Tous les ministres du gouvernement Philippe II, annoncé mercredi soir, ont été conviés à prendre la pose dans les jardins de l'Élysée dès le lendemain, avant la tenue du premier Conseil des ministres. 

Sauf que cet événement a donné lieu à un moment de tension entre l'Élysée et les photographes, comme l'a raconté un photojournaliste de Libération : seul un "pool" (groupe) de trois photographes a été autorisé à accéder aux jardins, alors que traditionnellement toute la presse y est invitée. Thomas Samson, photographe à l'AFP, raconte à Europe1.fr cet énième accrochage entre les médias et la nouvelle équipe présidentielle. 

  • Choisir le lieu 

Traditionnellement, la photo du gouvernement se fait dans les jardins de l'Élysée, et à chaque fois toute la presse est conviée. Alors, quand on a appris qu'elle était "poolée", on n'a pas vu de raison à cela car l'espace en extérieur n'est pas restreint (contrairement à la photo du gouvernement Philippe I, qui s'est tenue dans le hall de l'Élysée et où seuls quelques médias ont été autorités à y assister, ndlr). 

Nous avons donc râlé : on a posé nos objectifs et on a tourné le dos à l'arrivée des ministres à l'Élysée en signe de mécontentement. Ce n'est pas une première, cela s'est déjà fait mais ça reste quand même très rare. Cette grogne a permis de débloquer la situation et on a été autorisé à faire la photo de famille, mais avec des conditions : les ministres seraient déjà en place à notre arrivée, on se positionnerait là où on nous dirait de le faire et on se contenterait d'une photo posée en rang d'oignons.

  • Décrire une ambiance 

Bien sûr, on a quand même cherché d'autres angles, car on ne s'intéresse pas qu'à la photo posée, on recherche des moments, des apartés entre ministres... Et à défaut d'assister à l'arrivée des ministres dans les jardins, nous les avons photographiés en train de repartir, par petits groupes. Le service de communication n'était vraiment pas content : les attachés de presse, qui gardaient un oeil sur nous, étaient tendus.

La séance photo a duré 3 minutes au maximum et je n'ai pas vraiment eu le temps d'observer les ministres. Mais ils se sont prêtés au jeu de façon bon enfant. Ils étaient tous de bonne humeur, peut-être même amusés par le 'spectacle' qu'on venait de leur offrir. Cela contrastait avec le remue-ménage du service de comm'. 

" C'est peut-être la photo du gouvernement mais c'est surtout la présentation du gouvernement à la presse "
  • Réfléchir au cadrage 

Le cadrage de la photo est intentionnel, je voulais que les médias soient représentés : inclure les photographes sur la photo pour faire justement un clin d'oeil à cette 'polémique'. Et c'est peut-être la photo du gouvernement mais c'est surtout la présentation du gouvernement à la presse. 

  • Donner du sens à une image 

Cette 'polémique' est dans la lignée de ce qui s'est déjà produit, les premiers couacs de l'Élysée envers les médias. On sent bien qu'on a affaire à une équipe qui verrouille sa communication. Sauf que nous ne sommes pas là pour relayer leur comm', nous avons besoin d'un minimum de liberté d'exercice. Cette photo, c'est une manière de trouver une alternative au rang d'oignons qu'on voulait nous imposer, et je suis content d'avoir réussi cela. On a bien fait de râler.