La gauche entre de plain-pied dans le gouvernement

  • Copié
Administrator User , modifié à
Le président Nicolas Sarkozy a nommé un gouvernement de 15 ministres, dont sept femmes, et de quatre secrétaires d'Etat, qui fait la part belle à l'ouverture à gauche avec l'arrivée de Bernard Kouchner, Eric Besson, Jean-Pierre Jouyet et Martin Hirsch.

Nicolas Sarkozy et François Fillon ont largement ouvert la porte du gouvernement à des personnalités issues de la gauche. Sur 20 membres, avec le Premier ministre nommé jeudi, trois viennent de l'autre camp : le ministre des Affaires étrangères, Bernard Kouchner, et les secrétaires d'Etat Jean-Pierre Jouyet (Affaires européennes) et Eric Besson (Prospective et évaluation des politiques publiques). A ces trois postes gouvernementaux s'ajoutent, celui, tout nouveau, de Haut commissaire aux Solidarités actives contre la pauvreté, confié au président d'Emmaüs-France Martin Hirsch, lui aussi classé à gauche. Bernard Kouchner, bien évidemment, est celui sur lequel tous les projecteurs sont tournés. Le " French doctor ", qui débarque au Quai d'Orsay à 68 ans, avait en quelque sorte préparé le terrain avant le premier tour. Il avait déclaré le 15 avril que "la France valait mieux que nos certitudes vieillies et nos crampes partisanes". Déjà dès le 22 décembre, le nouveau ministre des Affaires étrangères et européennes n'excluait pas d'intégrer l'équipe Sarkozy : "s'il y a un gouvernement d'union nationale, dépassant les clivages habituels, s'il y a une vraie équipe de France, oui". Le 21 février, Nicolas Sarkozy le qualifiait d' homme "respectable" avec qui il n'aurait "aucun mal à travailler". La nomination de l'ancien ministre de la Santé de Lionel Jospin dans le gouvernement Fillon est mal vécue chez les socialistes. Pour preuve, le premier secrétaire du PS, François Hollande, a annoncé vendredi que Bernard Kouchner n'était désormais "plus membre du parti socialiste". Lors du passage de témoin au Quai d'Orsay vendredi après-midi avec Philippe Douste-Blazy, Bernard Kouchner a déclaré avoir accepté de diriger le ministère des Affaires étrangères pour servir le pays, sans renier ses convictions socialistes. "Là, c'est un peu particulier, ce n'est pas après la victoire électorale de la gauche que je viens prendre ce qui ne m'était pas dû et c'est d'autant plus difficile pour moi", a déclaré le nouveau chef de la diplomatie.Eric Besson, de son côté, devient le symbole même de la trahison pour les socialistes. Ancien "M. Economie" du PS passé dans l'autre camp en cours de campagne, Eric Besson se voit couronné par une carrière atypique partagée entre le privé et la politique. Il faut rappeler que le 6 mai, Ségolène Royal, battue, avait téléphoné à Nicolas Sarkozy d'une part pour le féliciter, d'autre part pour lui glisser sa colère d'avoir vu l'UMP "récupérer" Eric Besson qu'elle surnomme en privé "Judas". Avec Jean-Pierre Jouyet, c'est un ami de François Hollande, gaulliste de gauche, qui s'empare du secrétariat d'Etat aux Affaires européennes. Grand commis de l'Etat et inconnu du grand public, il a fait sa carrière dans les arcanes du pouvoir quand la gauche était au pouvoir : directeur de cabinet du ministre de l'Industrie Roger Fauroux sous Rocard, directeur de cabinet de Jacques Delors en 1991 et enfin directeur adjoint du cabinet du Premier ministre Lionel Jospin en 1997.Martin Hirsch, énarque classé à gauche qui fut proche de l'Abbé Pierre, hérite lui du Haut commissariat aux solidarités actives contre la pauvreté, un poste taillé sur mesure pour cet homme de terrain. Il a annoncé vendredi dans la matinée qu'il démissionnait de son poste de président d'Emmaüs France. Le nouveau chef de l'Etat lui a déjà demandé de réfléchir à la mise en oeuvre d'un "revenu de solidarité active". Enfin à noter que le centre, lui, apparaît comme le parent pauvre de la nouvelle équipe gouvernementale. Seul l'UDF Hervé Morin, qui avait fait campagne pour François Bayrou, obtient le ministère ministre de la Défense mais il est 11e dans l'ordre protocolaire, alors que Bernard Kouchner est numéro 5.