La difficile reprise de la campagne des régionales

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Entre impératif de sécurité et adaptation du discours, pas facile pour les candidats de se projeter vers le scrutin des 6 et 13 décembre, alors que les attentats de Paris sont encore dans toutes les têtes.

On ne peut pas dire qu’actuellement, les élections régionales, dont la campagne commence lundi prochain, soient une préoccupation pour les Français. Une semaine après les attentats du 13 novembre, les attaques sur Paris et Saint-Denis sont encore dans toutes les têtes. Pourtant, les électeurs restent appelés aux urnes dans deux semaines. Suspendue pendant plusieurs jours, la campagne reprend peu à peu ses droits, mais elle a radicalement changé de physionomie. En raison de la sécurité, ce sont d’abord les formes de la campagne qui ont ou vont changer. Mais les discours, aussi, sont sensiblement différents. Une nouvelle équation pas forcément simple à résoudre pour les candidats.  

  • Des meetings aux marchés

Première conséquence, nombre de meetings prévus ont été annulés. Le Parti socialiste a annoncé l’annulation des réunions du Mans et d’Orléans, prévus jeudi et vendredi. Par ailleurs, Jean-Yves Le Drian, candidat PS en Bretagne, mais aussi ministre de la Défense, a annulé quatre meetings prévus en novembre et début décembre, afin de préparer au mieux la riposte militaire en Syrie. Toujours en Bretagne, Marine Le Pen ne tiendra pas le meeting prévu vendredi à Vannes. Dans les deux semaines à venir, les meetings prévus sont pour l’heure maintenus. Ainsi, Nicolas Sarkozy est toujours annoncé présent le 25 novembre à Schiltigheim, en Alsace.

Mais même si des meetings auront certainement lieu, ils seront sans doute moins nombreux que d’ordinaire à l’approche d’élection. Pour des soucis de sécurité, d’abord. Selon les informations d’Europe 1, le ministère de l’Intérieur a fait passer des instructions aux préfets pour leur demander d’adapter les consignes de sécurité au cas par cas en fonction des circonstances locales. Les représentants de l’Etat vont aussi rencontrer les candidats pour les sensibiliser aux nouvelles mesures de sécurité. Qui génèreront forcément un coût supplémentaire, une donnée que les candidats ne négligent pas. En outre, difficile de savoir si les sympathisants, traumatisés comme tous les Français par les fusillades du 13 novembre, auront à cœur de se réunir par milliers dans une salle fermée. Pas évident.

Du coup, beaucoup de candidats laissent entendre qu’ils vont adopter des méthodes de conquête des électeurs plus modestes. En privilégiant par exemple les visites d’appartement, les café-débats ou en ciblant les marchés du week-end. Quant aux rassemblements, ils prendront davantage la forme de réunions publiques plus humbles que des grands meetings tapageurs.

  • La sécurité au cœur des discours

Alors que les attentats ont marqué sans doute durablement les Français, la sécurité risque d’être au centre des discours et des discussions des candidats avec les électeurs. Un virage sécuritaire semble d’ores et déjà s’amorcer. Le Front national, forcément, n’est pas le dernier à tenter d’en profiter. Le parti de Marine Le Pen va diffuser dès la semaine prochaine un tract dans toute la France, avec comme thème la lutte contre l’islamisme. Par ailleurs, les candidats FN en Ile-de-France ont réclamé rien moins que la mise sous tutelle de la ville de Saint-Denis, théâtre tout à la fois de trois explosions et d’un spectaculaire assaut du Raid.

Christian Estrosi, candidat LR en Paca, va lui aussi imprimer un document de campagne. Il y rappellera qu’il a été le premier maire de Nice à avoir mis en place une police municipale dans sa ville. Sa proposition de placer des portiques de sécurité dans les gares pourrait également y figurer. Toujours en Provence Alpes-Côte d’Azur, où le FN risque fort de l’emporter, le candidat PS, Christian Castaner, a tenté de se distinguer en militant jeudi pour le retour du service national.

Pour autant, le Parti socialiste a décidé, au moins au niveau national, a décidé de la jouer soft. Un tract imprimé en deux millions exemplaires, qui dénonçait "les mauvais coups de la droite", va ainsi passer à la déchiqueteuse. "Il n'est pas envisageable de reprendre la campagne dans les mêmes conditions", explique Christophe Borgel, le monsieur élections du PS. Un PS qui mise aussi sur la gestion de la crise par François Hollande pour marquer des points. Le parti majoritaire à l’Assemblée a d’ailleurs annoncé qu’il ne reprendra sa campagne qu’au lendemain de l’hommage national, soit le 28 novembre, une semaine avant la premier tour. Discrétion, donc.

Une chose est sûre : les compétences des régions n’étaient déjà pas au cœur des discours de la plupart des candidats avant les attentats. Cela ne risque pas de s’améliorer.