La Cour des comptes épingle la réserve parlementaire

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Louis Hausalter
PAS TRÈS NET - Inégalités de répartition, dépenses inéligibles, manque de contrôle : l'institution est sévère envers l'emploi de cette manne mise à la disposition des députés et sénateurs.

L'Assemblée nationale doit publier mardi après-midi la répartition de la réserve parlementaire des députés pour l'année 2014. Cette manne de 90 millions d'euros - 60 millions d'euros au Sénat - est partagée chaque année entre les élus, qui la redistribuent dans leurs circonscriptions. Longtemps épinglée pour son manque de transparence, l'attribution de ces financements est rendue publique pour la deuxième année consécutive. Mais les critiques continuent, portant sur le flou dans l'allocation des subventions ou leur inégale répartition.

Objectif "perdu de vue". Le site du Point a ainsi révélé lundi le contenu d'un rapport de la Cour des comptes, adressé en novembre dernier au ministre des Finances, Michel Sapin, et au ministre de l'Intérieur, Bernard Cazeneuve. L'institution y épingle les dérives d'un système dont l'objectif serait "largement perdu de vue". "Le moment paraît venu de s'interroger sur l'utilité de cette forme d'aide à l'heure où l'État est conduit à revoir ses formes d'intervention financière dans les territoires", ajoute la Cour des comptes, qui a passé au crible les subventions accordées entre 2006 et 2012.

Les subventions issues de la réserve parlementaire sont normalement destinées à "soutenir les collectivités déstabilisées par des circonstances exceptionnelles susceptibles de justifier la mise en œuvre de la solidarité nationale", rappelle le rapport. Pourtant, en 2012, plus du tiers des financements ont servi à des travaux de voirie ou d'aménagement urbain, note Le Point.fr. Des investissements qui n'ont rien d'exceptionnel.

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Dossiers incomplets. La Cour des comptes s'interroge d'ailleurs sur l'opportunité des dépenses, estimant que beaucoup d'entre elles n'auraient pas dû être validées. Les juges de la rue Cambon ont examiné 550 dossiers de demande. Résultat : "plus de 40% ne comportaient pas toutes les pièces justificatives requises, portaient sur des dépenses inéligibles ou auraient dû appeler une instruction plus approfondie des services de l'Etat sur leur conformité", dénonce le rapport.

Contournement des règles. Certains élus s'arrangent aussi avec les règles. Ainsi, un même projet ne peut être subventionné qu'une seule fois et dans la limite de 200.000 euros. Or, la Cour des comptes rapportent que quatre subventions de 200.000 euros allouées en 2011 à une commune ont en réalité servi à un seul et même projet, la réalisation d'un parking souterrain. Selon Le Point.fr, l'élu en cause est le député UMP Gilles Carrez, président de la commission des finances de l'Assemblée nationale, qui aurait ainsi donné un joli coup de pouce à la ville de Le Perreux-sur-Marne, dont il est le maire.

Inégalités. Autre point noir : l'inégale répartition de cette manne entre les territoires. La réserve parlementaire est en effet partagée au sein de chaque groupe politique, et son attribution est laissée à la discrétion des élus, d'où de forts écarts entre départements. Entre 2008 et 2013, la Lozère a ainsi touché 12,04 euros par habitant au titre de cette réserve, contre 0,64 euro par habitant dans les Bouches-du-Rhône. Des informations qui donnent à réfléchir, en attendant de connaître les heureux élus de 2014.

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