L'UMP veut faire table rase de la période Copé

François Fillon et Alain Juppé, deux des trois anciens Premiers ministres qui composent le triumvirat à l'UMP, veulent mettre à plat la situation financière de leur parti.
François Fillon et Alain Juppé, deux des trois anciens Premiers ministres qui composent le triumvirat à l'UMP, veulent mettre à plat la situation financière de leur parti. © Reuters
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Rémi Duchemin, avec agences , modifié à
GRAND MENAGE - Avec une nouvelle direction à sa tête, le parti veut tirer un trait sur la période Copé… et Sarkozy.

A l’UMP, les grandes manoeuvres ont débuté. Dès le lendemain de l’intronisation du triumvirat Fillon-Juppé-Raffarin, mercredi lors d’un bureau politique, la nouvelle direction s’est employée à tourner définitivement la page Jean-François Copé, président du mouvement de l’automne 2012 à fin mai 2014. Nouvelle direction, audit financier, anciens cadres écartés, préparation du congrès de l’automne… Autant de chantiers déjà lancés. Inventaire.

Luc Chatel

Un trio qui dirige l’UMP, plus Luc Chatel. Le chantier prioritaire était de doter l’UMP d’une direction, alors que la démission de Jean-François Copé sera effective au 15 juin. C’est chose faite. Avec une nuance : le triumvirat longtemps annoncé est accompagné d’un quatrième homme : le copéiste Luc Chatel qui, en vertu des statuts de l’UMP et en sa qualité d’ancien vice-président délégué, a été nommé secrétaire général. "Il n'y a pas de quatuor", se sont empressés de préciser François Fillon et Alain Juppé. "Il y a un trio qui dirige l'UMP et un secrétaire général qui a reçu pour mission de gérer la maison de façon quotidienne", a précisé François Fillon. En clair, Luc Chatel, qui avait la préférence des sarkozystes pour prendre le parti, n’aura pas de réel pouvoir.

"Notre travail, avec Alain Juppé et Jean-Pierre Raffarin, sera premièrement d'incarner l'opposition, deuxièmement de faire toute la lumière sur les scandales financiers qui touchent l'UMP" et troisièmement "d'organiser un congrès dans des conditions qui soient exemplaires en termes d'éthique et de climat politique", a poursuivi le député de Paris.

cesari

Une vague de départs. Un discours de rupture concrétisé par le départ de plusieurs personnalités. "L'UMP a besoin d'une véritable césure par rapport à la gestion précédente. Il est donc bien dans nos intentions de renouveler complètement l'équipe administrative et financière dès le prochain bureau politique de la semaine prochaine", a souligné Alain Juppé. Le sort d’Eric Cesari, proche de Nicolas Sarkozy et directeur général du parti, dont le nom est régulièrement cité dans l'affaire Bygmalion, semble scellé. Catherine Vautrin, la très copéiste trésorière du parti, devrait elle aussi être écartée. En attendant d'autres départs plus ou moins forcés.

Un audit pour mettre fin "aux scandales financiers". Mais la première décision du triumvirat a été d’annoncer un audit sur les finances du parti, et ce "dans les prochains jours", selon François Fillon. "Il faut au moins savoir dans quelle situation financière réelle est l'UMP pour prendre des décisions", s’est justifié l’ancien Premier ministre sur Europe 1. Revanchard depuis sa défaite lors de la sanglante guerre des chefs de l’automne 2012, le député de Paris a aussi admis qu’il voulait "savoir ce qui s’est passé". "On vient de connaître une crise interne en raison d'un scandale financier. Il y a des dizaines de millions d'euros qui ont été détournés. Cela ne pouvait pas ne pas conduire à la démission de l'équipe de direction", a-t-il encore expliqué, dénonçant un "esprit clanique qui a conduit à l'explosion" du parti. Jean-François Copé appréciera.

nicolas sarkozy

© REUTERS

Le cas Sarkozy. Il reste silencieux, mais Nicolas Sarkozy est bien dans tous les esprits à l’UMP. Aussi bien dans celui de ses partisans que dans celui de ses opposants, de plus en plus nombreux.  Pour l'heure, aucune réaction n'est venue des rangs de ses plus fervents soutiens, qui "pourrait annoncer son retour cet été" dixit le député-maire de Nice, Christian Estrosi. L’ancien président et ses troupes ont au moins remporté une victoire. A l’origine prévu en octobre, il devrait finalement avoir lieu en novembre, ce qui lui laisse plus de temps pour mettre en place une stratégie du retour. Mais il faudra composer avec les ambitions d’autres personnalités.

"L'UMP n'a pas eu besoin de Nicolas Sarkozy pour trouver une solution", a ainsi lancé Xavier Bertrand, d'ores et déjà sur les rangs pour 2017 et dont les relations avec l'ancien chef de l'Etat sont devenues exécrables. "Valéry Giscard d'Estaing était revenu en 1982 en se présentant à un scrutin cantonal. S'il veut revenir, Nicolas Sarkozy doit accepter ce parcours d'humilité", a même osé Hervé Mariton, candidat déclaré à la présidence du parti. "Est-ce que le général de Gaulle est présent actuellement sur la scène politique? Si vous en trouvez, dites-le moi, à ce moment-là on ne fera pas de primaire", a de son côté ironisé le maire de Bordeaux, qui a eu des échanges vifs mardi avec Nadine Morano sur les velléités "putschistes" des sarkozystes. "Vous mettez tout le monde sur la même ligne de départ. C'est normal, la politique, c'est la compétition", a ajouté François Fillon.

Dans le viseur : le congrès de l’automne… En tout état de cause, tout se jouera donc au congrès de l’automne prochain. C’est à ce moment que le successeur de Jean-François Copé à la tête de l’UMP seront connus. Pour l’heure, seuls deux hommes ont fait acte de candidature. Hervé Mariton, le député de la Drôme, d’abord. Bruno Le Maire ensuite. L’ancien ministre, 45 ans, a franchi le pas mercredi sur BFM TV au nom du "renouveau". Signe des ajustements tactiques en cours sous la pression de Nicolas Sarkozy, François Fillon a affirmé qu'il n'excluait "rien" alors qu'il n'envisageait pas jusqu'à présent de briguer la direction du parti. Alain Juppé a d'ores et déjà fait savoir qu'il ne concourrait pas. Xavier Bertrand continue de plébisciter François Baroin, qui réserve sa réponse.

Mais là encore, c’est la décision de Nicolas Sarkozy que tout le monde attend. L’ancien président envisage sérieusement de prendre la tête du parti et de se lancer ainsi pour la présidentielle de 2017. Mais il ne se présentera que s’il a la certitude d’éviter une primaire, pourtant inscrite dans les statuts de l’UMP, mais à haut risque pour lui. Et là, ça risque fort de bloquer. "Les primaires s'imposeront à tous", a ainsi souligné Bruno Le Maire. Une idée partagée par tous les candidats déclarés à la présidence de l’UMP.

Le congrès de novembre revêtira un autre enjeu, tout aussi essentiel : la ligne politique de l’UMP. Après la défaite aux européennes, où le FN est arrivé en tête, le parti est profondément divisé. Même si, après la disgrâce de Jean-François Copé, la "droite décomplexée" semble avoir vécu, tous ne sont pas d’accord sur la stratégie à tenir à l’avenir. Mercredi, Alain Juppé a de nouveau défendu le principe d'une alliance avec le centre. "A moins que l'on ne décide de laisser la première place au Front National dans toutes les élections à deux tours", a-t-il ironisé.

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