L’UMP (encore) en pleine bataille des egos

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Benjamin Bonneau, avec Caroline Roux , modifié à
DÉCRYPTAGE - La troïka Raffarin-Juppé-Fillon est déjà critiquée, et les ambitieux s’organisent.

Non, la démission de Jean-François Copé n’a rien réglé. Bien au contraire, serait-on tenté d’ajouter. Entre sa défaite aux européennes et la bombe Bygmalion, le parti de la droite républicaine se cherche un avenir. En attendant le congrès d’octobre, l’UMP s’est donné une direction à trois têtes (Raffarin, Juppé et Fillon) pour gérer les affaires courantes, préparer les échéances à venir et rassembler une famille déchirée. Une gageure pour les anciens Premiers ministres, et on vous explique pourquoi.

>> Le triumvirat déjà contesté

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Leur nom et leur statut étaient censés leur offrir légitimité et crédibilité. Mais pas pour tout le monde. Nadine Morano a ainsi déclaré dimanche dans Le Parisien ne pas pouvoir "cautionner la sortie de crise qui s'est dessinée, tout simplement parce qu'elle n'est en rien conforme à nos statuts". Et d’estimer que le trio "n'a aucune légitimité". Claude Guéant lui a emboîté le pas, regrettant le même jour sur Europe 1 "l'auto-désignation" de la troïka, jugée "irrégulière".

Cette attaque violente de deux sarkozystes historiques a entraîné une réponse d’Alain Juppé, lundi matin, sur son blog : "je ne participerai au groupe des trois qu'à deux conditions : que la décision ne soit pas source de division mais soit prise de manière consensuelle; que ce groupe ait les moyens d'organiser le fonctionnement de l'UMP sur des bases administratives et financières clarifiées". Pour prévenir tout problème juridique, Alain Juppé, Jean-Pierre Raffarin et François Fillon ont fait savoir samedi que la solution "politique" d'une direction collégiale devra "être validée par un vote formel" avant le 15 juin.

Si la garde rapprochée de l’ancien président s’est permis cette attaque en règle, c’est que les trois hommes ont des ambitions : la présidentielle de 2017 pour Juppé et Fillon, et la présidence du Sénat en septembre prochain pour Raffarin. Et, traditionnellement à l’UMP, c’est le président du mouvement qui se lance à la conquête de l’Elysée. "Celui qui sera élu patron du parti à l'automne n'aura pas besoin de se plier aux primaires", a confirmé Nicolas Sarkozy, selon le JDD. Pas question, donc, de laisser quiconque entraver le retour annoncé du champion de la droite. Un ancien ministre est plus cash encore : "rien ne dit que le triumvirat passera la semaine". Ambiance…

>> La bataille des ambitions a commencé

L’UMP n’a pas de chef, pas de ligne, pas d’argent, pas de hiérarchie, pas de collectif, pas d’autorité, pas d’empathie, mais c’est certainement la querelle des égos qui lui posent le plus de problèmes. Depuis la défaite de Nicolas Sarkozy, aucun leadership ne s’est dégagé et tout le monde croit en ses chances. Dans son coin, chacun prépare donc son projet, son équipe et cherche le chemin le plus court vers 2017. Résultat : tout fait l’objet d’une négociation pour ne froisser personne. Et la présidence de l’UMP attise les convoitises.

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Les ambitieux de l’UMP – on vous épargne la liste – ont donc passé le week-end pendu au téléphone. "C’est minable, il y a eu 350.000 coups de fil pour faire des accords et servir des intérêts personnels", regrette un ancien ministre. Un peu partout, on s’organise, on parle, on propose. Histoire d’exister. Xavier Bertrand plaide pour François Baroin. Qui ne veut pas du poste. François Fillon, lui, réunira son parti Force républicaine mardi soir et s’adressera à ses troupes. Raffarin et Juppé proposent que le futur président de l’UMP ne soit pas candidat à la primaire de 2016. Laurent Wauquiez soutient la troïka. Nathalie Kosciusko-Morizet plaide pour un rapprochement avec les centristes, que refuse Valérie Pécresse. Vous n’avez rien compris ? Eux non plus…

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>> L’ombre de Sarkozy plane de plus en plus

Avec une majorité au pouvoir plus contesté que jamais, une UMP en pleine explosion et un FN qui a réalisé un score historique aux européennes. la rumeur du come back de Nicolas Sarkozy pour reprendre en main l’UMP prend chaque jour un peu plus de consistance. "Son retour était une possibilité, il devient une nécessité", a ainsi lâché au JDD le fidèle Brice Hortefeux, porte-parole non-officiel de son ami de trente ans. Selon les informations d’Europe 1, l’ancien président a vu ses lieutenants vendredi dernier ? Ces derniers sont chargés de faire passer un message aux troupes : "sois patient, Nicolas revient". Un fidèle sarkozyste le dit autrement : "plus c’est le bordel, plus ça sert Nicolas".

Sauf que l’hypothèse Sarkozy n’enchante pas tout le monde à l’UMP. Les multiples affaires qui le touchent, directement ou via ses proches, inquiètent. "Tous ceux qui de près ou de loin sont concernés par cette campagne des élections présidentielles de 2012 doivent rester à l'écart, dans l'intérêt du mouvement", a lâché Xavier Bertrand, candidat déclaré à la primaire de 2016. Pour Valérie Pécresse, une autre ancienne ministre qui ne cache pas ses ambitions, "il faut qu'on renonce au moins temporairement à ce mythe de l'homme providentiel."

Et, outre ces problèmes d’égos, l’UMP va devoir se choisir une ligne politique : draguer l’électorat centriste ou continuer sur sa ligne "décomplexée" pour séduire les électeurs du FN. On a presque envie de leur souhaiter bon courage…

 

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