Kadhafi à Paris : 10 milliards d'euros de contrats et une rafale de critiques

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Rédaction Europe1.fr , modifié à
Mouammar Kadhafi est arrivé lundi en début d'après-midi en France pour une visite officielle de cinq jours très critiquée par l'opposition mais aussi dans la majorité. La Libye a confirmé l'achat de 21 Airbus et signé un contrat pour l'achat à terme de réacteurs nucléaires à la France. Rien de confirmé en revanche du côté du Rafale. Sans donner de décompte précis, l'Elysée assurait lundi soir que la totalité des contrats tournait autour de 10 milliards d'euros.

Le montant des contrats tournerait autour de 10 milliards d'euros. C'est l'Elysée qui l'affirme. La France et la Libye ont signé lundi soir une dizaine d'accords et de contrats. La cérémonie s'est déroulée à l'Elysée en présence du président français Nicolas Sarkozy et Mouammar Kadhafi. Tripoli a confirmé la commande de 21 appareils Airbus de différents types pour les compagnies aériennes lybiennes Libyan Airlines et Afriqiyah Airways, pour un montant catalogue de près de 3,2 milliards de dollars. La France et la Libye ont également signé un accord de coopération pour le développement des utilisations pacifiques de l'énergie nucléaire, qui prévoit notamment la fourniture "d'un ou plusieurs" réacteurs nucléaires pour le dessalement de l'eau de mer. La Libye s'est enfin engagée à "entrer en négociation exclusive avec la France pour acquérir des équipements" militaires, en particulier des hélicoptères et des avions de combat. L'Elysée n'est en revanche pas en mesure de confirmer l'achat de 14 avions de chasse Rafale par la Libye, a fait savoir mardi matin le porte-parole de la présidence, David Martinon.

Mouammar Kadhafiest arrivé lundi en début d'après-midi à l'aéroport d'Orly, pour une visite officielle de cinq jours en France. Le dirigeant libyen, qui n'était pas venu en France depuis la présidence de Georges Pompidou, a été accueilli par la ministre de l'Intérieur Michèle Alliot-Marie. Le colonel Kadhafi, vêtu d'une toge marron, est monté à bord d'une limousine blanche. Son cortège, comprenant une centaine de véhicules officiels, a immédiatement pris la route de Paris. Un dispositif de sécurité exceptionnel avait été déployé à Orly où des tireurs d'élite avaient pris position sur les toits. Arrivé dans le cour du palais présidentiel, Mouammar Kadhafi a passé en revue le détachement de la Garde républicaine qui lui rendait les honneurs avant d'être accueilli au pied du perron par Nicolas Sarkozy. Il a ensuite eu un premier entretien d'un peu moins d'une heure avec le président français.

Nicolas Sarkozy a assuré avoir demandé à son homologue libyen lors de leur rencontre de "progresser sur le chemin des droits de l'homme". "La France reçoit un chef d'Etat qui a renoncé définitivement à la possession de l'arme nucléaire, qui a décidé de rendre les stocks sous contrôle des organisations internationales, qui a choisi de renoncer définitivement au terrorisme et qui a choisi d'indemniser les victimes", a-t-il expliqué. Le président a indiqué qu'il "recevrait également les associations de victimes".

La visite du dirigeant libyen a suscité un concert de protestations. Des organisations de défense des droits de l'homme, des responsables de l'opposition - François Hollande, Ségolène Royal, François Bayrou notamment - dénoncent l'accueil fait à un dirigeant dont le nom est associé à des affaires de terrorisme. La voix d'un membre du gouvernement, Rama Yade, s'est ajoutée aux critiques de l'opposition. Dans un entretien publié lundi dans Le Parisien-Aujourd'hui en France, la secrétaire d'Etat aux droits de l'homme a déclaré ne pas être "heureuse de cette visite", dont le début coïncide avec la Journée mondiale des droits de l'homme. Celle-ci a dû s'expliquer sur ses propos en milieu de martinée à l'Elysée.

François Fillon a répondu aux critiques dimanche en soulignant que la France entendait désormais "parler à tout le monde" sans pour autant transiger sur ses principes. "Je vois tellement d'observateurs qui jugent de manière péremptoire le nouveau style donné aux relations internationales par le président de la République. Je leur dis : la France parlera à tout le monde en restant fidèle à ses idéaux et à son message universel", a déclaré le Premier ministre lors d'un discours devant la communauté française à Buenos Aires, au deuxième jour de sa visite en Argentine.

"La France reçoit le colonel Kadhafi, parce que le colonel Kadhafi a libéré les infirmières bulgares et parce que le colonel Kadhafi s'est engagé dans un processus de réintégration dans la communauté internationale", a-t-il plaidé. "Nous avons besoin que la Libye, dans le cadre des relations interméditerranéennes, redevienne un pays avec lequel on puisse discuter, et redevienne progressivement un pays où les droits de l'homme soient respectés", a-t-il poursuivi, justifiant la diplomatie "réaliste" de Nicolas Sarkozy. "Que les donneurs de leçons tournent sept fois leur langue dans leur bouche. Laisser les infirmières bulgares croupir dans les geôles libyennes, ça aurait été un crime."