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Romain David , modifié à
Pour le député Jean-Louis Bourlanges, spécialiste des questions européennes, l'avenir de l'Italie se situe à l'intérieur de l'Union européenne.
INTERVIEW

En portant aux urnes deux partis eurosceptiques, les électeurs italiens ont déclenché une crise politique qui interroge sur l'avenir de la péninsule au sein de l'Union. "La situation pour les Italiens serait bien pire s'il n'y avait pas d'Europe", soutient pourtant au micro d'Europe 1 Jean-Louis Bourlanges, député MoDem des Hauts-de-Seine, et vice-président de la commission des Affaires européennes à l’Assemblée Nationale.

Deux formes de populisme. Pour cet élu, qui a siégé au Parlement de Strasbourg pendant plus de dix-huit ans, l'économie de l'Italie serait fortement fragilisée s'il n'y avait le bouclier européen face aux marchés. Il estime ainsi que le programme économique porté par la Ligue du Nord et le Mouvement 5 étoiles, les deux partis majoritaires, n'est pas réaliste. S'il n'est pas formellement question d'une sortie de l'euro, les deux mouvements réclament notamment, à travers une feuille de route commune, une réforme de la gouvernance économique de l'UE et la fin des politiques d'austérité. "Le programme proposé par les deux partis est invendable compte-tenu de la situation économique de l'Italie", explique Jean-Louis Bourlanges. "On a deux partis populistes qui représentent deux populismes différents : un populisme de contribuables, les gens de la Ligue du Nord, qui veulent qu'on leur rende leurs impôts, et un populisme d'ayants-droit qui veulent qu'on leur donne de l'argent. L'équation politique est extrêmement difficile puisqu'il faut demander beaucoup plus à l'impôt et moins aux contribuables", analyse-t-il.

Les passagers clandestins de l'UE. Surtout, Jean-Louis Bourlanges estime que la Ligue du Nord et le Mouvement 5 étoiles, malgré leur opposition affichée à l'UE, espèrent toujours profiter des avantages de cette dernière. "La stratégie que poursuit les deux partis est une stratégie de passagers clandestins : ils veulent pouvoir dépenser et en même temps être protégés dans leurs taux d'intérêt par les Allemands. Ce double jeu ne marche pas", déclare-t-il. "Non, la folie italienne ne sera pas gagée par la sagesse allemande".

Laisser parler la démocratie. Néanmoins, le député des Hauts-de-Seine estime que cette politique doit être tentée, ne serait-ce que pour être discréditée. "Il faut que chacun prenne ses responsabilités et que l'on ne bâillonne pas le peuple italien. Il n'a qu'à s'exprimer, faire son essai […] Il faut aller jusqu'au bout du processus", soutient-il. "Il est préférable qu'ils puissent faire la démonstration de l'inanité de leur programme. De toute manière, il y aura des élections rapidement, ça ne peut pas tenir", assure-t-il. "S'ils revotent dans six mois, ce sera sans doute plus raisonnable et réfléchi", veut croire Jean-Louis Bourlanges.

"Il y a toujours une tension entre pro et anti-européens. En Italie, on va jouer le troisième round. Le premier c'était en 2015, avec Tsipras [devenu Premier ministre de la Grèce en septembre 2015, ndlr], le deuxième c'était l'élection de Macron contre Le Pen. Et maintenant, est-ce que l'Italie va tenir ?  Je pense qu'ils vont restés dans la zone euro, ils aiment la Commedia dell'arte, mais ils ne sont pas si irresponsables que cela", conclut-il.