Guerre à droite pour un poste clé à l'Assemblée, sous domination des macronistes

L'élection mercredi à l'Assemblée des questeurs s'est traduite par l'ouverture des hostilités entre les frères ennemis des Républicains, ceux du groupe LR et les "constructifs".
L'élection mercredi à l'Assemblée des questeurs s'est traduite par l'ouverture des hostilités entre les frères ennemis des Républicains, ceux du groupe LR et les "constructifs". © GEOFFROY VAN DER HASSELT / AFP
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avec AFP , modifié à
Une bataille inédite se livrait mercredi à l'Assemblée nationale par les groupes d'opposition pour la répartition des postes clefs de vice-présidents et questeurs.

Premier test de la domination de La République en marche! dans une Assemblée nationale recomposée, la répartition des postes clés a donné lieu mercredi à une première bataille inédite entre "groupes d'opposition" et une guerre ouverte à droite.

Solère élu questeur, LR boycotte le bureau. Aux côtés de deux députés REM, Thierry Solère, du groupe "constructifs" LR-UDI, a été largement élu questeur, avec des voix REM, aux dépens d'Eric Ciotti, LR historique, par un scrutin à bulletins secrets. Ulcéré, le patron du groupe LR Christian Jacob a dénoncé une première depuis "plus de 50 ans" et "des droits de l'opposition jamais autant piétinés". Il a accusé ses anciens collègues LR de "mentir" et "tromper". Après une énième suspension de séance, il a annoncé que son groupe refuserait de siéger au bureau de l'Assemblée "tant que les droits de l'opposition ne seront pas rétablis". 

Habituellement une formalité. C'était la première séance de François de Rugy au perchoir, au lendemain de son élection à une large majorité. En jeu : la nomination des 21 autres membres du bureau, plus haute instance collégiale.  L'attribution de ces postes, fonction du poids de chaque groupe, est habituellement une formalité de début de législature. Il n'en a rien été mercredi, alors que sept groupes - un record sous la Ve République - ont pu être constitués (du plus gros au plus petit : REM, LR, MoDem, "constructifs" LR-UDI, "Nouvelle Gauche" (ex-PS), LFI et communistes). Quatre candidatures ont donc été déposées pour les trois postes de questeurs. Ces députés ont une fonction sensible : ils sont chargés de tenir les cordons de la bourse et de veiller à la bonne utilisation du budget de l'Assemblée. François de Rugy a rappelé la "pratique constante depuis 1973" : deux de ces postes pour la majorité, un pour l'opposition.

Coprésident du nouveau groupe "constructifs", Franck Riester a défendu la candidature de Thierry Solère comme un moyen d'ouvrir la questure à "tous les groupes de l'opposition, les groupes minoritaires", suscitant des grondements sur certains bancs. "J'appelle notre Assemblée à ce que les droits de l'opposition soient respectés", avait exhorté Christian Jacob, patron du "plus grand groupe d'opposition" (100 élus). Les "constructifs", qui entendent accompagner les "bonnes" réformes d'Emmanuel Macron, sont 35.  Thierry Solère a plaidé hors hémicycle que les "constructifs" étaient dans l'opposition, jugeant ses détracteurs "dans l'ancien monde".

Ciotti dénonce un "scandale démocratique". "C'est pas une guerre des droites", a assuré Sébastien Huygue, LR "historique", dont le camp déjà fracturé est menacé d'un éclatement dans le sillage de l'échec de la droite à la présidentielle. Selon lui, certains "constructifs" n'ayant "pas réussi à rentrer au gouvernement" essaient un "coup de force à l'Assemblée avec la majorité". Un autre élu LR a considéré que le choix par son groupe d'Eric Ciotti montrait que "l'ordre ancien résiste", affirmant qu'il y avait d'autres candidatures. Et un ténor LR a jugé qu'"un questeur visé par une enquête pour fraude fiscale, c'est gênant". Thierry Solère est visé par une enquête préliminaire du parquet de Nanterre suite à une plainte de Bercy. Au-delà, Eric Ciotti, un sarkozyste, a dénoncé un "scandale démocratique" et "hold-up institutionnel" par REM. "La présidence impériale désigne l'opposition officielle", pour Guillaume Larrivé (LR).

Bataille en vue pour la présidence de la commission des Finances. Le cas "risque de se reproduire" jeudi pour la présidence de la commission des Finances, réservée à l'opposition depuis 2009, redoutent des LR. Leur candidat Eric Woerth devra affronter au moins trois prétendants, notamment le "constructif" Charles de Courson (UDI). La présence de sept groupes "bouscule nos habitudes" issues d'un système "bipartisan", a constaté Olivier Faure, chef de file des députés "Nouvelle Gauche" (ex-PS), réclamant une juste représentation dans les bureaux des commissions.