Gatignon, spécialiste ès coups politiques

Stéphane Gatignon sait comment attirer l'attention des médias.
Stéphane Gatignon sait comment attirer l'attention des médias. © Max PPP
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Le maire de Sevran, en grève de la faim, sait faire parler de lui. Et séduit autant qu’il agace.

Devant sa tente, qu’il a installée devant l’Assemblée nationale et dans laquelle il observe sa grève de la faim, Stéphane Gatignon enchaîne les interviews. Preuve que son action, destinée à réclamer des fonds pour sa commune déshéritée (l'une des plus pauvres de France), a rencontré l’écho escompté auprès de la presse. C’est que le maire de Sevran sait y faire. Très à l’aise avec les journalistes, le discours bien rôdé et la répartie facile, l’élu de 43 ans est un spécialiste des coups.

La grève de la faim. C’est donc le dernier en date. Installé non loin du Palais Bourbon, jean et parka sur le dos, ceint de son écharpe tricolore, Stéphane Gatignon voit défiler depuis samedi tout ce qui compte à gauche : Manuel Valls d'abord, venu le premier marquer sa "solidarité" pour cet autre élu de banlieue. Ensuite ses amis écologistes qui acclament leur "maire courage" ont suivi. Puis sont venus jusqu'à sa tente la ministre Yamina Benguigui, le président de l'Assemblée Claude Bartolone, ou encore le patron du PS Harlem Désir. Par ce coup d’éclat, Stéphane Gatignon entend réclamer cinq millions d’euros à l’Etat pour sa commune de 51.000 habitants, sous peine de "devoir mettre la clé sous la porte".

Stephane Gatihgnon, maire de Sevran, en grève de la faim devant l'Assemblée nationale

© PHOTOPQR/LE PARISIEN/DELPHINE GOLDSZTEJN

Mais cette démarche ne plaît pas à tout le monde. Lundi matin sur Europe 1, Claude Bartolone s’est ainsi déclaré "en désaccord avec la manière". Marylise Lebranchu avait elle relevé dimanche que Sevran bénéficie déjà beaucoup de l'aide de l'Etat. Le ministre de la Ville François Lamy laisse entendre de son côté que l'intéressé n'a pas demandé à le rencontrer et que si son administration est soucieuse d'"aider les communes", elle est aussi attentive "à leur gestion". A bon entendeur…

Des casques bleus à Sevran. Début juin 2011, des tirs à balles réelles à proximité d’une école de Sevran contraignent les enfants à ne plus sortir en récréation.

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C’en est trop pour Stéphane Gatignon, qui propose alors un remède radical. "La seule solution est une présence 24 heures sur 24. Il faut des forces d'interposition, des casques bleus, comme ceux qu'on envoie à l'étranger pour empêcher les belligérants de s'entre-tuer", plaide le maire de Sevran dans Le Parisien. "On a déjà l'hélicoptère, la police, et ça ne suffit pas. Il faut davantage pour empêcher un drame, éviter les balles perdues.", insiste-t-il.

Evidemment, cette sortie ne passe pas inaperçue. La droite sourit en coin, mais la gauche fulmine. "Ce n’est pas la guerre à Sevran, on ne va pas déclencher la guerre. Ce n’est pas sérieux, les casques bleus", s’emporte ainsi sur BFMTV François Asensi, député-maire Front de gauche de Tremblay-en-France. "On n’est pas au Liban, on n’est pas au Kosovo", poursuit celui qui fut accessoirement le mentor de Stéphane Gatignon, avant le départ de ce dernier du OPCF en 2009 pour rejoindre Europe Ecologie.

En réclamant des casques bleus, Stéphane Gatignon savait que sa requête avait fort peu de chances d’aboutir. Mais il a tout de même obtenu du ministre de l’Intérieur, à l’époque Brice Hortefeux, des effectifs de CRS supplémentaires.

Légaliser le cannabis. C’est là le véritable cheval de bataille de Stéphane Gatignon, celui dont découle notamment la proposition précédente. Car Sevran est gangrénée par les trafics, de cannabis notamment. Pour le maire de la ville, il est même à l’origine de tous les maux. Dès mars 2010, l’élu écologiste plaidait sur Europe 1 pour un débat sur la question de la légalisation de la drogue douce.

Mais c’est surtout à partir d’avril 2011, à la sortie de son livre Pour en finir avec les dealers, que Stéphane Gatignon devient un militant actif de cette cause. Il écume alors les plateaux de télévision pour expliquer son point de vue.

Malheureusement pour lui, c’est sa prestation au Soir 3, quand l’élu peine à parler en raison d’une extinction de voix, qui retiendra le plus l’attention.