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A.D , modifié à
Contrairement à ce qu'a pu annoncer la presse cette semaine, Gilles Finchelstein le dit lui-même, samedi sur Europe 1 : il n'est ni la plume de Hollande ni un fidèle de Macron.
INTERVIEW

Mardi 30 août, Emmanuel Macron démissionnait du gouvernement. Une décision surprise, notamment pour François Hollande. Gilles Finchelstein, directeur de la fondation Jean-Jaurès, était l'invité, samedi, de l'émission C'est arrivé cette semaine pour décrypter l’événement, alors même qu'il doit recevoir le Président de la République jeudi prochain, salle Wagram, pour un colloque sur la démocratie face au terrorisme.

La théorie du cornichon. Dans le cadre de ce rendez-vous, il voit "le président de la République régulièrement pour parler de l'organisation et du contenu de cette manifestation, mais je n'écris pas son discours", assure-t-il pour démentir une information du Monde de vendredi. "Quant à Emmanuel Macron, poursuit le spécialiste, j'ai avec lui des liens personnels. Je l'aime bien." Il reconnaît avoir pour l'ex-ministre de l'Economie une "certaine proximité intellectuelle" mais aussi "des interrogations sur le fond". 

Que pense-t-il alors de la démission de cet homme qu'il "aime bien" ? "Dominique Strauss-Khan avait une théorie qui s'appelait 'la théorie du cornichon', glisse Gilles Finchelstein, qui connaît bien DSK. Cette théorie est la suivante : 'Toute cuillère en bois plongée dans un bocal de cornichons finit par se transformer en cornichon'." Il développe : "C'est un peu ce que j'ai senti avec Emmanuel Macron le soir de sa démission. Il a été un peu 'cornichonisé', c'est-à-dire qu'après deux ans dans le bocal politique, j'ai trouvé qu'il avait perdu un peu des arêtes et de la spontanéité qu'il avait montrées au début." 

Entendu sur europe1 :
Macron essaye de rassembler les modérés et ceux qui sont éloignés de la vie politique

 

"Un libéral populiste". Désormais, le positionnement politique d'Emmanuel Macron - qui annonçait récemment ne pas être socialiste - interroge. "C'est un libéral populiste. Il y a un libéralisme qui vient de la gauche - c'est original - et un libéralisme à la fois économique, social et politique. Et il y a une forme de populisme avec récusation du système, récusation du clivage gauche-droite. Il essaye de rassembler les modérés et ceux qui sont éloignés de la vie politique. C'est cette alchimie très étrange qui est la sienne et qui est le défi devant lui. On connaît sa position économique mais il y a mille et un sujets dans la France d'aujourd'hui sur lesquels on ne connaît pas sa position. Le jour où il sortira de cette ambiguïté, il pourra y avoir de la déception." Le spécialiste évoque aussi ses soutiens et voit là un nouveau défi. "Ils sont trop âgés, trop diplômés, trop à droite".

Enfin, l'autre aspect que Macron doit aborder, selon le spécialiste, est la recomposition politique. Elle se "fait généralement après une élection. Son pari, c'est de la faire avant. On verra si c'est gagnant mais la voie est très étroite. Par rapport aux responsables politiques classiques, il est à la fois plus haut et plus bas. Plus haut, parce qu'il a une capacité de théorisation, de formalisation, de conceptualisation plus importante. Et plus bas parce qu'il se saisit d'objets très concrets (les cars dits Macron, par exemple) dont il fait des objectifs politiques.

"Un afaiblissement pour Hollande". Sur l'échiquier politique, Macron fait ouvertement cavalier seul. C'est sans conteste "un affaiblissement pour François Hollande, au moins à court terme", analyse Gilles Finchelstein. "La démission de Macron a un objet qui est d’empêcher François Hollande d'être candidat en créant une dynamique d'opinion montrant que Macron est en position quand Hollande ne l'est pas." Il ajoute au sujet du président de la République : "Après avoir perdu sur sa gauche gouvernementale, il perd sur sa droite."