Est-ce vraiment "sérieux" de plancher sur 2025 ?

L’initiative de François Hollande pour la rentrée des ministres ne séduit pas tout le monde.
L’initiative de François Hollande pour la rentrée des ministres ne séduit pas tout le monde. © MAXPPP
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avec Ludovic Fau , modifié à
Pour la rentrée, François Hollande a demandé aux ministres d’imaginer la France en 2025.

Devoirs de vacances. "C’est surréaliste". À l’image de l’indignation du député UMP de Haute-Loire, Laurent Wauqiuez, l’initiative de François Hollande pour la rentrée des ministres ne séduit pas tout le monde. Le chef de l’Etat avait demandé aux membres de son gouvernement d’imaginer, pour lundi, l’état de la France en 2025. Plein emploi, logements pour tous, troisième révolution industrielle…L’optimisme est de la copie et leur France de 2025 donne l’eau à la bouche.

>>> Mais alors que la France de 2013 culmine à 3,2 millions de chômeurs et encore plus de mal logés, l’initiative fait rire jaune l’opposition… et même certains membres de la majorité. À tort ? On décrypte.

"Une grosse ficelle" de com’, selon la droite. Pour l'opposition, les travaux de vacances du gouvernement ne sont rien de plus qu’un écran de fumée visant à masquer les désaccords entre ministres. "Ce gouvernement ne sait pas quel chemin prendre à l'automne 2013. C'est une grosse ficelle de communication un peu éculée pour laisser croire qu’il travaille", a ainsi raillé le député UMP Eric Ciotti, dans le Figaro. "Ce séminaire est surréaliste, vu les difficultés actuelles, c'est un comble", a également taclé Laurent Wauquiez.

>>> Que prévoit chaque ministre pour 2025 ? Réponse ici.

Le ministre du Redressement productif, Arnaud Montebourg, vante les bienfaits des politiques de relance japonaises.

© REUTERS

Une "connerie", pour certains de la majorité… Si certains ministres ont planché sans rechigner, d’autres se sont montrés plus réservés. Cette initiative "est une connerie", lâche même l’un d’eux en aparté. Sans être aussi catégorique, Arnaud Montebourg, ministre du Redressement productif, y est allé de sa moquerie dimanche, lors de la Fête de la Rose. "Nous avons, au mois de septembre, le projet de lancer les 34 plans industriels de la renaissance du Made in France. C’est pas pour 2050, c’est pour ‘2000 tout de suite’, c’est pour ‘2000 maintenant’". Et la président de l'Assemblée, Claude Bartolone, de renchérir : "croyez-vous qu’un seul de nos compatriotes consente à appartenir à une génération sacrifiée, à qui l’on dirait qu’une fois sa vie terminée le pays connaîtra un avenir meilleur? La question sociale, c’est aujourd’hui, pas demain".

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"C’est sérieux", rétorquent les autres Mais est-ce vraiment une si mauvaise idée que ça ? Beaucoup, à gauche, font bloc et défendent une initiative qu’ils ne jugent pas si futiles.  "C'est sérieux, on parle de l'avenir de notre pays, on parle de sa place dans le monde", a ainsi défendu lundi la ministre de l'Enseignement supérieur Geneviève Fioraso, sur i>télé. "On a suffisamment reproché aux politiques d'agir toujours dans le court terme et dans le réactif, nous l'avons reproché nous-mêmes à Nicolas Sarkozy", a-t-elle renchéri. L’ex-chef de l’Etat est d’ailleurs dans les argumentaires de tous les partisans (socialistes) de l’initiative de François Hollande. "C'est autre chose que Sarkozy qui ne voyait pas plus loin que le prochain SMS", a ainsi ironisé Harlem Désir, premier secrétaire du PS.

>> Dans un tweet, Michel Delaunay fait, elle, le parallèle avec les actuelles querelles à l’UMP :

"Je pense que c'est plutôt bien que les ministres soient optimistes et aient une vision globale à moyen terme. Ça aurait pu être fait plus tôt. Mais c'est une bonne chose d'essayer d'avoir des réflexions stratégiques sur les grands mouvements qu'il y a dans le monde et dans l'Europe et de savoir comment la France peut s'adapter pour être plus forte, plus écologique et plus solidaire", a également estimé Jean-Vincent Placé, président du groupe écologiste au Sénat, invité lundi d'Europe1.

Bonne idée au mauvais moment. Alors cet exercice, c’est "sérieux" ou "surréaliste" ? Pour notre chroniqueur David Barroux, la réalité se glisse entre les deux. "Le temps long et la planification, plutôt que l’action dans l’urgence, ça peut avoir du bon. On a besoin de ministres architectes et pas seulement pompiers", juge-t-il. Et de nuancer, toutefois : "il s’agit d’une bonne idée, mais émise au mauvais moment. La priorité de cette rentrée devrait être de répondre aux inquiétudes des Français, à savoir le chômage, les hausses d’impôts ou la compétitivité".