En rendant visite à Théo, Hollande se rappelle qu'il est de gauche

Mardi, le chef de l'État, est resté une demi-heure avec le jeune homme et plusieurs membres de sa famille.
Mardi, le chef de l'État, est resté une demi-heure avec le jeune homme et plusieurs membres de sa famille. © AFP
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Antonin André
François Hollande s'est rendu mardi au chevet de Théo à l'hôpital d'Aulnay-sous-Bois. Libéré de tout enjeu électoral, il assume ses convictions.

C’est un geste politique très clair. Le président de la République, quand il se déplace au chevet des victimes, exprime sa compassion, son soutien et engage avec lui celui du pays. Mardi, il s'est rendu au chevet de Théo, jeune homme de 22 ans, interpellé violemment jeudi à Aulnay-sous-bois. Il a salué "sa dignité, sa responsabilité" et était ému d’après les personnes présentes. Tout cela alors qu’une enquête judiciaire est en cours et que des policiers sont mis en cause pour des actes d’une extrême gravité.

Il devance la justice. Le président prend parti ouvertement et fortement. Le geste de François Hollande est un acte engagé. Il met le poids de sa fonction, de son autorité du côté du jeune Théo : quoi qu’il ait fait, quel que soit son parcours, rien ne justifie les actes qu’il a subi. Implicitement, il devance la justice et il condamne de fait les policiers. 

La belle au bois dormant. François Hollande s’est toujours gardé de toute intervention dans le domaine judiciaire, il a toujours été très sourcilleux sur la séparation des pouvoirs. Et là, il s’engage. Le président sort d’un long sommeil comme la belle au bois dormant. Il vient de se réveiller après cinq ans d’exercice du pouvoir et il renaît comme il était : de gauche. Celui qui a trahi en enterrant le droit de vote des étrangers aux élections locales, qui a porté la déchéance de nationalité et la loi Travail vient de se rappeler qui il était.

Il assume ses convictions. Libéré de tout enjeu électoral, il assume ses convictions : la justice dira ce qu’elle voudra, les syndicats de policiers joueront leur rôle, Théo est une victime, quoi qu’il ait fait. Cela m’a rappelé toute proportion gardée, l’image de François Mitterrand qui le 3 mai 1995, deux jours après qu’un jeune marocain a été poussé dans la Seine par des militants d’extrême droite, le président se déplace pour lui rendre hommage en y lançant une rose. On est encore dans l’émotion, le temps judiciaire est à peine entamé, et le président s’engage. Ce que vient de faire François Hollande, être un président engagé politiquement, est en quelque sorte symboliquement ce que sa famille - la gauche - attendait depuis 5 ans.