Débat de la présidentielle : Macron vire à droite et à gauche

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Le fondateur d'En Marche a eu pendant le débat le même positionnement politique que pendant toute sa campagne, oscillant savamment entre la droite et la gauche.

Il aurait fallu compter les "je suis d'accord avec François Fillon", les "comme Benoît Hamon" et les clins d'œil à Jean-Luc Mélenchon. Lundi soir, pour le débat organisé par TF1 qui opposait cinq des onze candidats à la présidentielle, Emmanuel Macron s'est montré prompt à cajoler sa gauche avant de caresser sa droite. À être, en somme, ce candidat de la synthèse ou, comme il l'a dit dans sa minute de conclusion, celui qui peut "réconcilier des vues".

"D'accord" avec Mélenchon... Sur l'éducation, premier sujet abordé, le candidat d'En Marche! n'a pu qu’acquiescer en entendant le socialiste Benoît Hamon vouloir réduire le nombre d'élèves par classe. Mais a aussi approuvé le Républicain François Fillon, qui souhaite réformer l'apprentissage. Sur la sécurité ensuite, Emmanuel Macron s'est dit "d'accord avec le constat" de Jean-Luc Mélenchon. Le leader de la France Insoumise s'était insurgé contre la "surenchère" de lois sécuritaires et la "logique d'affrontement" qui s'est mise en place entre population et policiers, du fait de méfiance de part et d'autre.

Ce n'est pas le seul point qui a rapproché les deux hommes. En matière de rémunération des heures supplémentaires aussi, le fondateur d'En Marche! était sur la même longueur d'onde que Jean-Luc Mélenchon, formant une alliance improbable contre le candidat de la droite, François Fillon, qu'il rejoint pourtant – au moins partiellement – sur l'assouplissement du temps de travail. Si improbable, d'ailleurs, que l'eurodéputé a demandé confirmation : "pas juste 10% [de majoration de salaire pour ces heures supplémentaires] comme dans la loi El Khomri, [mais bien] 25% ?" "On est tout à fait d'accord", a répondu Emmanuel Macron.

...et avec Fillon. Sur la sortie de l'euro en revanche, c'est bien avec François Fillon que l'ancien ministre de l'Économie a fait alliance. Le vainqueur de la primaire de la droite venait de fustiger les velléités anti-monnaie unique de Marine Le Pen, estimant que cela entraînerait "le pays vers un véritable chaos économique et social". "Je partage totalement. François Fillon a totalement raison", a approuvé Emmanuel Macron. Le nucléaire a également été un point d'accord, les deux hommes ne souhaitant pas en sortir.

Substituer un clivage à un autre. À force de donner des petits coups de volant d'un côté et de l'autre, l'ancien ministre de l'Économie a fini par agacer François Fillon. "Un p'tit peu à gauche, un p'tit peu à droite", a ironisé le candidat LR, tandis que Marine Le Pen, elle, accusait le fondateur d'En Marche! de tenir un discours vide et creux.

Cette stratégie a aussi permis à Emmanuel Macron d'imposer l'idée d'un duel avec la présidente du Front national, la seule à laquelle il n'ait jamais accordé un bon point. Alors que les deux font la course en tête dans les sondages, et que lui est donné largement vainqueur dans l'hypothèse d'un second tour contre elle, l'ancien ministre de l'Économie avait tout intérêt à pilonner d'abord sa meilleure ennemie. Tentant ainsi de substituer pendant le débat, comme il entend le faire au niveau politique, un clivage entre progressistes et conservateurs à celui, plus traditionnel, qui oppose la droite et la gauche.