Dailymotion sème la zizanie à Bercy

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Fabienne Cosnay et Camille Langlade , modifié à
"C'est une décision du gouvernement", assure Montebourg. Moscovici a, lui, démenti avoir empêché la vente.

Nouvelle anicroche. Le ministre de l'Economie Pierre Moscovici et du Redressement productif Arnaud Montebourg se sont opposés par médias interposés, jeudi, sur le dossier de la reprise de Dailymotion par Yahoo!. Un épisode qui souligne une nouvelle fois les divergences entre les deux figures de Bercy.

Arnaud Montebourg persiste et signe. La décision de s'opposer au projet de rachat du site français de vidéos en ligne Dailymotion par le groupe américain Yahoo a bel et bien été prise par "le gouvernement" et non par lui seul, a répété le ministre du Redressement productif interrogé jeudi après-midi par France 2. Il répondait ainsi au démenti du ministre de l'Economie Pierre Moscovici qui assurait ne pas avoir été impliqué dans cette décision, contrairement à ce que Arnaud Montebourg avait une première fois affirmé à la sortie du Conseil des ministres. "Nous ne pensons pas que ce soit une bonne opération d'abandonner Dailymotion entre les mains d'une société, Yahoo!, dont la santé est parfois vacillante et qui de surcroît risque de dévorer, faire disparaître Dailymotion", indique le ministre à la sortie du Conseil des ministres.

"C'est une décision du gouvernement", martèle Arnaud Montebourg.

Moscovici dément. Ce n'est pas un dossier dans lequel j'ai été particulièrement impliqué, contrairement à ce que j'ai pu lire ici ou là", avait affirmé un peu plus tôt dans la journée Pierre Moscovici, lors d'une conférence de presse. "Je n'ai pas eu tous les éléments en ma possession." A la question de savoir s'il avait été informé par Arnaud Montebourg, il a répondu : "Nous avons eu une conversation à ce sujet mais qui est restée extrêmement générale, il n'y a pas eu de réunion, de décision conjointe sur ce dossier". Dans l'entourage d'Arnaud Montebourg, on assure avoir travaillé avec le cabinet de Pierre Moscovici. "Il n'a peut être pas travaillé toutes les pièces", persifle un conseiller.

 "Une conversation extrêmement générale", répond Moscovici  :

Matignon ne cache pas son exaspération. A Matignon, on souhaite rester en retrait : "on ne va pas jouer les surgés de cour de récré" persifle un conseiller, avant d’ajouter : "leur histoire de couple, on n’en a rien à faire !" Reste que, sur le fond, la porte-parole du gouvernement, Najat Vallaud-Belkacem, a assuré que la position défendue par le ministre du Redressement productif était celle du gouvernement, ce qu'a confirmé l'entourage du Premier ministre. "La position qu'a défendu Arnaud Montebourg est celle du gouvernement", a-t-elle dit lors du compte rendu du conseil des ministres. "Il est absolument naturel que l'Etat défendre les intérêts de ses entreprises (...) L'enjeu était d'éviter la disparition de Dailymotion".

Orange "repart à la recherche d'un partenaire". Au milieu de ce couac du gouvernement, le patron de France Télécom-Orange, Stéphane Richard, semble, lui s'être fait une raison. Dans un premier temps, il a regretté l'échec des négociations avec Yahoo!, qu'il considérait comme un potentiel allié de poids pour "le développement de Dailymotion hors d'Europe". Dans une interview au journal Les Echos, il a tenu a réaffirmer l'indépendance de son groupe. "Dailymotion est une filiale d'Orange et non de l’État. C'est le groupe, sa direction et son conseil d'administration qui gèrent ce dossier", a-t-il déclaré. "J'avais pourtant refusé que Yahoo! dispose d'une option pour acheter la totalité du capital de Dailymotion, et nous étions sur le point de trouver un arrangement", a déploré le patron de France Télécom.

Jeudi soir, il s'est toutefois rangé aux côtés de l'Etat. "Yahoo! n'était pas le bon choix pour Dailymotion, c'est ça le constat qu'on peut faire aujourd'hui", a-t-il affirmé dans un entretien à France 2. "Maintenant, nous allons repartir à la recherche d'un bon partenaire. Le PDG de France Télécom-Orange évoque "beaucoup d'autres possibilités" "du côté des grands acteurs de l'Internet" ou des groupes spécialisés dans "le numérique" et "les contenus".