Coupe du monde : "du pain et des jeux"... et un peu de politique aussi

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Hélène Jouan, chef du service politique d'Europe 1
Avec le lancement de la Coupe du monde, le football pourrait bien occulter les sujets sensibles du moment, comme la grève des cheminots et les déchirements européens sur les migrants.

On entre jeudi "en" coupe du monde, comme on entre dans les ordres. Comment continuer à vous parler politique quand toutes les conversations ne vont tourner qu’autour d’un sujet : les bleus 2018 seront-ils à la hauteur de ceux de 1998 ? Réjouissons-nous à l’unisson : "du pain et des jeux", nous voilà heureux !

Le miracle de 1998. D’autant que cette ferveur autour de l’équipe de France a des répercussions politiques. Un député de la France Insoumise en avoue déjà une : "notre lutte contre la loi ferroviaire ? Game over. Le mondial nous a tués".  Le "million" sur les Champs-Elysées, c’est encore moins gagné quand tout le monde est devant sa télé. Autre répercussion possible, si les Français avancent dans la compétition, la France pourrait de nouveau s’aimer, s’admirer en son miroir. C’est ce qui s’était passé en 1998 : le temps d’une parenthèse enchantée, le "black-blanc-beur" de l’équipe de Zidane-Thuram-Deschamps avait uni une nation. Maillot sur les épaules le jour de la finale, et baiser sur le crâne de Fabien Barthez, Jacques Chirac président, joua de toutes les ficelles du 23ème homme de l’équipe tricolore qu’il était devenu, pour booster sa popularité.

"La loyauté totale au coach". Emmanuel Macron ne se privera sans doute pas de jouer lui aussi sur la ferveur populaire de cette compétition. Avec un prisme tout particulier ; en visite à Clairefontaine avant la bataille de Russie, les yeux dans les Bleus, il a énoncé sa devise "une compétition réussie, c’est une compétition gagnée". Gagnée grâce "à l’union, l’effort et la loyauté totale au coach". Le président ne dit pas autre chose à son gouvernement, sa majorité et aux Français.

"Un pouvoir très limité". L’important n’est plus de participer, non, l’important c’est la deuxième étoile, pas question d’envisager une retraite de Russie, il n’ira d’ailleurs à Moscou que si la France est en demi-finale. Mais peut-être devrait-il écouter la sagesse de Laurent Blanc. "Le sport et le football ont un pouvoir, mais il est très limité", confessait il y a quelques jours le défenseur des Bleus de 1998. Se rappelant sans doute que quatre ans après la finale d’une nation multicolore, Jean-Marie le Pen se qualifiait au second tour de la présidentielle. Du coup, peut-être reviendrai-je demain vous parler de l’Europe qui se fracasse sur la politique migratoire, des difficultés de la droite et de la gauche à trouver un nouveau souffle ou du retour de François Hollande … car même pendant la parenthèse foot, enchantée ou pas, la vie politique continue !