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David Doukhan, édité par A.H. , modifié à
Pour s'assurer que les hautes administrations ne feront pas blocage à ses réformes, Emmanuel Macron veut y placer des hommes et des femmes de confiance.
L'ENQUÊTE DU 8H

Passation dimanche, nomination du Premier ministre dans la foulée, constitution d'un gouvernement avant mercredi… Une fois ces importantes formalités réglées, le nouveau président veut aller très vite pour réformer. Emmanuel Macron veut changer les pratiques de gouvernance, y compris dans la haute administration.

Un précédent à ne surtout pas reproduire. Les directeurs des grandes administrations devront montrer une forme de loyauté. C'est le syndrome Ramon Fernandez : Emmanuel Macron se souvient très bien de ce directeur du Trésor, nommé par Nicolas Sarkozy en 2009, et qui avait été laissé en poste par François Hollande. Jean-Marc Ayrault lui avait ensuite reproché de freiner des quatre fers et de bloquer la réforme fiscale. Ce n'est qu'en 2014 que François Hollande avait fini par le remplacer par Bruno Bézard, un ancien conseiller de Lionel Jospin.

Ce cas est loin d'être anecdotique. 70.000 fonctionnaires travaillent au Trésor et gèrent les impôts de tout le pays. Si un gouvernement veut conduire la moindre réforme, il a tout intérêt à ce que l'administration le suive un tant soit peu. Avec l'épisode Fernandez, François Hollande a perdu dans années, aux yeux d'Emmanuel Macron. Or, le nouveau président, lui, n'a pas de temps à perdre.

Un "spoil system" à la française. Mais remplacer les directeurs d'administration n'est pas une tradition française, et les choses se font un peu au cas par cas. Nicolas Sarkozy avait placé des hommes à lui, François Hollande beaucoup moins, et tardivement au cours du quinquennat. Aux Etats-Unis, la démarche est institutionnalisée. On l'appelle le "spoil system" : chaque fois qu'un nouveau président prend ses fonctions, l'administration valse. Les grands patrons de l'appareil d'Etat sont, pour bon nombre, remplacés afin que la machine administrative exécute la politique du nouveau pouvoir.

Ce que veut Emmanuel Macron, c'est un "spoil system" à la française. Dans le JDD, le 9 avril dernier, il déclarait : "Dans les six premiers mois, je renouvellerai ou je confirmerai la totalité des postes de responsabilité nommés en Conseil des ministres - 250 personnes". "La haute administration a souvent tendance à penser que les décisions politiques ne vont pas dans le sens qu'elle souhaite. Alors elle ralentit la marche", témoigne Michel Betan, directeur de cabinet de Xavier Bertrand sous Nicolas Sarkozy. "On doit admettre qu'un nouveau président a besoin, sur certains fonctions étatiques, d'avoir des gens à lui."

Pas de purge généralisée. Certains hauts fonctionnaires ont donc du souci à se faire, notamment dans les administrations stratégiques : celles Bercy, du ministère de l'Intérieur, l'assurance-maladie et son budget de 500 milliards d’euros, Pôle emploi, etc. Attention, cela ne veut pas dire qu'il faut s'attendre à une purge généralisée. L'actuelle directrice du Budget, Amélie Verdier, était à l'ENA avec Emmanuel Macron, et ils sont très amis. Mais le futur président va demander à son secrétaire général et à ses ministres de vérifier très rapidement qu'il n’y a pas d'opposition de principe ou politique de la part des directeurs d'administration.