Ces affaires qui ont empoisonné le quinquennat Hollande

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Jérôme Cahuzac, Aquilino Morelle et Thomas Thévenoud ont tous les trois été contraints de démissionner à cause des affaires. © AFP
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Épinglé pour avoir embauché ses filles comme assistantes parlementaires, Bruno le Roux, ministre de l'Intérieur, a été poussé mardi à la démission. Ce n'est pas la première affaire qui ébranle le quinquennat de Hollande.

Il n'y sera resté que trois mois et quinze jours. Bruno Le Roux a été débarqué de son poste de ministre de l'Intérieur, mardi, après les révélations de la presse la veille. Des journalistes de l'émission Quotidien ont en effet découvert que le ministre avait embauché ses deux filles comme assistantes parlementaires lorsqu'il était député, entre 2009 et 2016. Des emplois qui pourraient être fictifs, puisque les deux jeunes femmes étaient parfois en même temps en train d'effectuer des stages ou d'étudier en classe préparatoire.

Quelques jours seulement après la mise en examen de François Fillon pour, entre autres, détournement de fonds publics après des révélations sur l'emploi de sa femme comme collaboratrice parlementaire, ces révélations font tache. Ce n'est pas la première fois que le quinquennat de François Hollande est ébranlé par les affaires impliquant directement des membres du gouvernement.

Les comptes cachés de Jérôme Cahuzac

La première affaire qui touche le quinquennat est aussi la plus violente. En décembre 2012, le site d'investigation Mediapart publie une enquête sur Jérôme Cahuzac, alors ministre du Budget. Il révèle que l'homme a possédé un compte suisse non déclaré jusqu'en 2010, dont le contenu a été vidé et transféré dans une banque singapourienne quelques jours avant qu'il ne devienne président de la commission des finances de l'Assemblée. Le scandale est d'autant plus retentissant que Jérôme Cahuzac est, à l'époque, la figure de la lutte contre la fraude fiscale.

Le ministre nie, assure "les yeux dans les yeux" que tout est faux. Le parquet de Paris ouvre une enquête en janvier 2013 puis, deux mois plus tard, une information judiciaire pour blanchiment et fraude fiscale. Jérôme Cahuzac quitte le gouvernement mais continue de nier, avant de passer finalement aux aveux le 2 avril. Les juges découvrent dans la foulée l'existence de plusieurs autres comptes non déclarés. Jérôme Cahuzac a été condamné l'année dernière à trois ans de prison ferme et une peine d'inéligibilité de cinq ans.

Cette affaire, dévastatrice pour l'image du quinquennat, pousse François Hollande à mettre en œuvre diverses mesures pour moraliser la vie publique et encourager la transparence en politique. En avril 2013, le chef de l'Etat annonce notamment la création de la Haute autorité pour la transparence de la vie publique (HATVP), auprès de laquelle ministres, parlementaires nationaux et européens ou encore membres du Conseil constitutionnel devront déclarer leur patrimoine et leurs intérêts.

Les omissions de Yamina Benguigui

Un an après l'affaire Cahuzac, en mars 2014, la HATVP s'intéresse de près à Yamina Benguigui, ministre déléguée chargée de la Francophonie. Là encore, c'est la presse qui éveille ses soupçons. Marianne et Le Canard Enchaîné révèlent qu'elle a omis de déclarer ses parts dans une holding détenant sa société de production. Parts qu'elle a vendues deux mois plus tôt sans déclarer les bénéfices de la vente. Yamina Benguigui, qui est alors candidate aux municipales à Paris, nie vigoureusement.

Une enquête est ouverte par le parquet de Paris. Débarquée du gouvernement le 31 mars 2014, après sa victoire à Paris, la désormais ex-ministre est jugée en correctionnelle en septembre 2015. Condamnée mais dispensée de peine, elle est de nouveau condamnée en appel un an plus tard. Cette fois, elle écope d'un an d'inéligibilité, de deux mois de prison avec sursis et de 5.000 euros d'amende.

Les conflits d'intérêts d'Aquilino Morelle

Conseiller politique auprès de François Hollande depuis son arrivée à l'Élysée en 2012, Aquilino Morelle est épinglé par Mediapart en avril 2014. Selon le site, il aurait conseillé des laboratoires pharmaceutiques pendant qu'il exerçait à l'Inspection générale des affaires sociales (Igas). Une accusation grave, à laquelle se mêlent moult détails gênants sur son train de vie, et notamment l'emploi d'un cireur de chaussures qu'il fait venir directement à l'Élysée.

L'intéressé dément tout conflit d'intérêts, expliquant qu'il a bien été consultant pour un laboratoire pharmaceutique danois mais que cette "activité annexe" est "autorisée" par l'Igas. Sans pour autant remettre la main sur la demande d'autorisation, obligatoire. Une enquête préliminaire est ouverte par le parquet national financier et Aquilino Morelle est poussé dehors par François Hollande. Finalement, l'enquête préliminaire est classée sans suite en février 2015.

La "phobie administrative" de Thomas Thévenoud

Le 26 août 2014, Thomas Thévenoud arrive au gouvernement à la faveur d'un remaniement d'envergure. Nommé secrétaire d'État au Commerce extérieur, il démissionne seulement neuf jours plus tard, officiellement pour raisons personnelles. En réalité, ce sont des problèmes de "conformité" avec le fisc qui l'obligent à déposer sa démission. Mediapart révèle en effet que Thomas Thévenoud ne déclare pas ses revenus et ne paie pas ses impôts depuis plusieurs années, poussant l'administration fiscale à lui adresser un recouvrement forcé.

Le Canard Enchaîné dévoile aussi que l'éphémère ministre n'a pas payé son loyer pendant trois ans, ne consentant à le faire qu'après une menace d'expulsion. Des amendes de stationnement, mais aussi le kinésithérapeute de ses enfants ou encore EDF auraient également eu toutes les difficultés du monde à obtenir leur dû.

S'il quitte son poste au gouvernement, Thomas Thévenoud, qui invoque une "phobie administrative" pour expliquer le non-paiement de ses diverses factures, refuse de laisser son siège de député. Visé par une plainte pour fraude fiscale déposée par la Direction générale des finances publiques, Thomas Thévenoud a annoncé qu'il se retirerait de la vie politique en juin prochain.

Le favoritisme de Kader Arif

Secrétaire d'État chargé des Anciens combattants et de la mémoire, Kader Arif est au cœur de soupçons de favoritisme à partir de novembre 2014. Signalé par des élus de l'opposition du Conseil régional de Midi-Pyrénées, il est alors soupçonné d'avoir attribué des marchés publics à une société dirigée par ses proches, notamment son frère. Une enquête préliminaire le pousse à la démission. Un peu plus d'un an plus tard, en décembre 2015, le Parquet national financier ouvre une information judiciaire, qui est toujours en cours.