Ce qu'il faut retenir de la conférence de presse de François Fillon

François Fillon
François Fillon a évoqué lundi pendant un peu moins d'une heure les affaires le concernant. © Martin BUREAU / AFP
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Le vainqueur de la primaire de la droite, englué dans plusieurs affaires notamment celle impliquant les activités présumées fictives de sa femme, Penelope, s'est exprimé depuis son QG lundi. 

Il est apparu très grave, parfois même ému, derrière son pupitre. François Fillon a donné une conférence de presse, lundi, peu après 16 heures, pour s'expliquer sur les multiples affaires qui le visent depuis plusieurs jours. Sans dévier d'un pouce de son axe de défense déployé jusque là, le vainqueur de la primaire de la droite s'est attaché à "clarifier les choses". "Car je n'ai rien à cacher, je ne peux pas accepter les accusations infondées qui me prennent pour cible après 32 ans sans problèmes judiciaires", a-t-il ajouté.

Reconnaissant néanmoins une "erreur" morale, pour laquelle il s'est excusé auprès des Français, l'ancien Premier ministre a néanmoins certifié qu'il serait bien candidat à la présidentielle. Europe 1 vous résume ses principales déclarations.

"Oui, j'ai employé mon épouse comme collaboratrice" (et elle le savait)

François Fillon a maintenu avoir employé Penelope "comme collaboratrice". "Elle a ensuite été celle de mon suppléant, elle est encore redevenue ma collaboratrice", a-t-il précisé. Son salaire moyen mensuel a été, toutes ces années, de 3.677 euros net. Alors que certains observateurs ont fait remarquer, ces dernières semaines, que Penelope Fillon n'était peut-être pas au courant de cet emploi, son mari a balayé ces soupçons. "Comment peut-on imaginer un instant que mon épouse, intelligente, diplômée et responsable, ne soit pas au courant du travail qu'elle effectue pour moi ? Comment peut-on imaginer un instant qu'elle puisse avoir collaboré à l'insu de son plein gré ?"

François Fillon a annoncé qu'il mettrait en ligne "dès ce soir" (lundi) tous les documents concernant la rémunération de son épouse et de ses enfants.

Non, cet emploi n'était pas fictif

François Fillon s'est défendu de tout emploi fictif pour son épouse. "Pendant toutes ces années, mon épouse a pris en charge ces tâches simples mais essentielles. C'est elle qui a géré le courrier qu'on m'adressait, tenu mon agenda pour les événements locaux, les remises de décoration", a-t-il détaillé. "C'est elle qui a travaillé sur mes interventions dans la Sarthe, c'est encore elle qui a reçu les CV et demandes d'emploi que les Sarthois m'adressaient, toujours elle qui a traité les réclamations de ces derniers en cas de difficultés administratives."

Reprenant tous les éléments utilisés par les médias qui ont enquêté sur le scandale, notamment le fait que Penelope Fillon n'avait pas d'adresse mail en tant que collaboratrice, ni de badge pour accéder à l'Assemblée nationale, François Fillon est resté droit dans ses bottes. "Cela me donne l'occasion de faire le point sur le travail des collaborateurs parlementaires", a-t-il déclaré. "Personne n'a le droit de juger du contenu du travail des attachés parlementaires, sauf le député. Celui-ci est le seul maître du recrutement et du niveau de salaire, dans la limite de l'enveloppe à sa disposition. Il est seul maître du contenu du travail, du lieu de travail et des horaires. Personne n'a le droit de contrôler ce travail."

L'interview de sa femme ne prouve rien

Une interview a beaucoup alimenté les soupçons à l'égard d'un potentiel emploi fictif. Celle de Penelope Fillon, réalisée en anglais et diffusée dans un numéro d'Envoyé Spécial. La femme du candidat y disait n'avoir "jamais été l'assistante de [son] mari". François Fillon a nié que cela puisse démontrer qu'elle n'était pas sa collaboratrice parlementaire. "Je rappelle qu'un collaborateur parlementaire travaille dans le domaine politique mais que c'est le député qui fait de la politique", a-t-il déclaré. "On s'appuie sur une ancienne interview en anglais, sortie de son contexte, dans laquelle elle explique qu'elle n'a jamais été mon assistante. Elle a toujours été d'abord et avant tout ma compagne et ma collaboratrice. Elle a exercé dans la discrétion, refusant de parler à ma place. Aujourd'hui, on retourne cette discrétion contre elle et contre moi. Sa façon de faire était digne."

"J'ai employé mes enfants" et "c'était légal"

François Fillon s'est aussi justifié sur l'emploi de ses deux enfants, "Marie et Charles, qui ont travaillé [respectivement] pendant 15 et 6 mois comme collaborateurs parlementaire pour un salaire mensuel net de 3.000 euros pour chacun. Rien n'était dissimulé", a-t-il dit. "Tout cela était légal." Le vainqueur de la primaire de la droite a nié toute participation de son fils à la campagne de Nicolas Sarkozy en 2007. "Mon fils n'a jamais participé à la campagne présidentielle, il a constitué des bases documentaires" qui lui ont permis à lui, François Fillon, de préparer la campagne. 

Pas question de rembourser les sommes versées

Non, la famille Fillon ne remboursera pas les salaires perçus par Penelope et les enfants. "Pourquoi rembourserai-je des sommes qui correspondent au travail de ma femme ?" a déclaré l'ancien Premier ministre. "Ma femme a travaillé et j'en ai donné la preuve."

"Légal", mais peut-être pas "moral" 

Si François Fillon a martelé que tout était "légal", il a en revanche reconnu que cela pouvait poser une "question éthique". "Suis-je pour autant quitte sur le plan moral ? Ce n'est pas au système médiatique de me juger, c'est aux Français de décider. Le premier courage en politique, c'est de reconnaître ses erreurs." Le vainqueur de la primaire de la droite a donc reconnu "une erreur". "Je le regrette et présente mes excuses aux Français."

Les chèques touchés au Sénat sont une "pratique de la vie politique"

Interrogé sur les plusieurs chèques qu'il aurait encaissés lorsqu'il était au Sénat au nom de "la ristourne", François Fillon a, là, botté en touche. "Ce sont les pratiques de la vie politique", a-t-il argumenté. "En suis-je à l'origine ? Non. Suis-je poursuivi [par la justice] pour ces pratiques ? Non. Doivent-elles cesser ? Oui."

Il n'y a "pas de plan B" pour le remplacer à la présidentielle

"Un plan B ? On a vu qu'il n'y en avait pas." François Fillon a assuré que ce serait bien lui le candidat de la droite à la présidentielle. Et affirmé que ses troupes étaient bien en rang serré derrière lui. "Ceux qui ont réclamé que je me retire sont peu nombreux, en tout cas pas majoritaire. Beaucoup d'entre eux sont des hommes et des femmes qui ne m'avaient pas choisi à la primaire."

L'ancien Premier ministre s'est aussi montré très combatif. "Dès ce soir, c'est une nouvelle campagne qui commence", a-t-il indiqué. "Dès demain, je réunirai les parlementaires." Deux déplacements sont également prévus : l'un à Troyes, avec François Baroin, l'autre jeudi, à Poitiers, avec Jean-Pierre Raffarin. "C'est donc avec une énergie décuplée et une énergie farouche que j'aborde les dernières semaines de campagne."

Une communication malhabile et tardive

Depuis les premières révélations du Canard Enchaîné, François Fillon paraît pris de court. Sa première défense, en direct sur le plateau du JT de TF1, loin d'avoir convaincu, avait au contraire rallumé les soupçons. L'ancien Premier ministre s'en est expliqué. "Je n'aurais pu imaginer être accusé sur ce sujet. Je suis honnête et c'est la raison pour laquelle cette accusation m'a mis un coup dans l'estomac, toute la semaine dernière j'ai été déstabilisée par cette accusation", a-t-il dit. "J'ai mis du temps à réagir, à mesurer que le ciel m'était tombé sur la tête. Maintenant je suis debout."

Fillon "n'accuse personne" mais...

Le candidat, qui avait parlé de "coup d'État institutionnel" et accusé "le pouvoir" d'être à l'origine de cette série de révélations, a de nouveau fait part de ses soupçons lundi. "Je n'accuse personne, je dis simplement que les faits sont troublants. Pourquoi monter maintenant cette opération contre moi ? Ne me dites pas que ces informations sont apparues soudainement." Selon lui, "on ne peut pas ne pas se poser de questions" face à cette "campagne de presse d'une violence inouïe, orchestrées pile à ce moment-là". "Ça fait beaucoup", a-t-il noté. 

Et ce qu'il n'a pas dit

Pas un mot, en revanche, sur l'affaire de la Revue des Deux Mondes. Parallèlement à l'enquête sur les fonctions d'assistantes parlementaires de Penelope Fillon, une autre a été ouverte pour sa collaboration, entre mai 2012 et décembre 2013, à ce mensuel. Activité qui lui a rapporté quelque 100.000 euros brut, et qui est aussi soupçonnée d'être fictive. Selon les dernières révélations du quotidien Le Monde, il pourrait en réalité y avoir une affaire de trafic d'influence derrière. En effet, Marc Ladreit de Lacharrière, patron de la revue, a été élevé au rang de grand-croix de la Légion d'honneur par François Fillon.