Ce que l'on a appris de l'audition d'Alexandre Benalla au Sénat

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Alexandre Benalla a été entendu par le Sénat, mercredi matin. © AFP
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Interrogé par les sénateurs, mercredi matin, l'ancien collaborateur de l'Elysée est notamment revenu sur son permis de port d'arme et ses fonctions précises auprès d'Emmanuel Macron. 

Après quinze minutes de flou, c'est finalement assez détendu qu'Alexandre Benalla s'est présenté devant la commission d'enquête du Sénat, mercredi matin. Commencée en retard, l'audition de l'ancien collaborateur d'Emmanuel Macron, soupçonné de s'être livré à des violences en marge d'opérations de police le 1er mai, a duré plus de deux heures. Si les sénateurs n'ont pas pu l'interroger sur les faits, qui font l'objet d'une enquête judiciaire, ils ont obtenu des réponses qui éclairent le dossier. 

Sur ses fonctions précises à l'Elysée 

C'était l'un des questionnements centraux de la commission, qui cherche à savoir si Alexandre Benalla a rempli une fonction de protection personnelle du chef de l'État, une tâche censée incomber uniquement à des unités d'élite de la police et de la gendarmerie. "Le président de la République et ses proches ont choisi leurs collaborateurs sur la base de ce qu'ils avaient pu voir en termes de confiance", a expliqué le principal intéressé, déjà chargé de "mettre en musique" les déplacements d'Emmanuel Macron pendant sa campagne présidentielle. 

En mai 2017, "on m'a annoncé que j'étais recruté sous le statut de chargé de mission," a poursuivi Alexandre Benalla, soulignant qu'il s'agissait du "niveau le plus bas de ce que l'on peut trouver auprès du président de la République". "Je n'ai jamais été ni policier, ni garde du corps" d'Emmanuel Macron, a-t-il martelé, reconnaissant une "proximité physique" avec le chef de l'État, justifiée selon lui par des nécessités d'organisation : "pour lui dire qu'on est en retard, qu'il faut passer à la séquence d'après". 

Au sein du cabinet de la présidence de la République, Alexandre Benalla affirme avoir occupé des fonctions "transverses", comme "une sorte de metteur en scène". Il reconnait également avoir pris en charge des missions annexes, comme "la gestion des cadeaux que le Président peut offrir à ses hôtes étrangers". "Il n'y a jamais eu aucun incident avec aucun officier de sécurité du GSPR (groupe de sécurité de la présidence de la République, ndlr), a-t-il ajouté. "Ce sont des camarades, je mangeais avec eux, j'allais à la salle de sport avec eux." 

Sur son permis de port d'arme

"J'ai une parfaite connaissance et une parfaite maîtrise des armes à feu", a d'abord précisé Alexandre Benalla, qui a rejoint la réserve opérationnelle de la gendarmerie nationale à l'âge de 18 ans. L'ancien collaborateur de l'Elysée est ensuite revenu sur ses différentes demandes de port d'arme, dont la première a été déposée pendant la campagne d'Emmanuel Macron. "J'ai fait cette demande à titre personnel, pour des motifs de défense et de sécurité personnels", a-t-il affirmé, expliquant s'être senti "exposé" par sa proximité avec le candidat. 

Une fois à l'Elysée, "je venais le matin avec mon arme à la ceinture et je rentrais chez moi avec mon arme à la ceinture", a poursuivi Alexandre Benalla, assurant que ce port n'était "pas lié à la sécurité du président de la République mais à [sa] sécurité personnelle". L'ancien employé de la présidence reconnait qu'il a pu lui arriver "trois fois en un an" de participer à un déplacement public du chef de l'Etat avec son Glock 43. "Mais s'il s'était passé quelque chose, si le président de la République avait été attaqué, mon rôle n'était pas de la sortir", a-t-il souligné. "Il n'y a pas eu d'interférence entre moi et le GSPR." 

Alexandre Benalla est cependant apparu en difficulté lorsque le président de la commission Philippe Bas (LR) lui a rappelé que la préfecture de police, dans sa décision de lui accorder un port d'arme, indiquait que "Monsieur Benalla est chargé d'une mission de police dans le cas de son action de coordination de la sécurité de la présidence de la République avec les forces militaires et le GSPR". "Cet arrêté a été rédigé par un service, qui s'appelle la direction de la police générale, et qui a essayé de faire rentrer mon cas qui n'est pas un cas conforme dans les clous", a répondu le principal intéressé. 

Une version contredite

Après l'audition d'Alexandre Benalla, sa version des faits a été contredite sur ce point par Yann Drouet, ex-directeur de cabinet du préfet de police. "Ce n'est pas pour sa sécurité personnelle que le port d'arme lui a été octroyé", a-t-il expliqué. C'est dans le cadre de ses missions, de sa fonction, de la mission qu'on a considérée comme étant une mission de police et du fait qu'il est, dans le cadre de ses fonctions, manifestement exposé à des risques d'agression." 

Sur son badge d'accès à l'Assemblée nationale 

Alexandre Benalla a enfin été interrogé sur plusieurs des "avantages" dont il bénéficiait alors qu'il était employé de l'Elysée, au premier rang desquels son badge d'accès à l'Assemblée nationale. "Ça peut paraître surréaliste", a-t-il reconnu. "Mais quand vous êtes collaborateur à l'Elysée et que vous sollicitez un badge, on vous le délivre automatiquement. C'était un caprice personnel pour aller à la salle de sport et à la bibliothèque."

Quant aux véhicules qu'il a conduits dans le cadre de sa fonction, parfois équipés de gyrophares et de pare-soleil "police", Alexandre Benalla a expliqué qu'ils provenaient du "parc automobile de l'Elysée". "Ce sont des véhicules de service, pas de fonction, que l'on peut emprunter en cas d'urgence (...). Il n'y a rien de choquant là-dedans", a-t-il justifié. "C'est un usage, je ne bénéficiais d'aucun avantage", a conclu celui qui a confirmé qu'il était rémunéré 6.000 euros nets par mois, sans "aucun avantage en nature".