Cahuzac auditionné pour rien ?

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Fabienne Cosnay , modifié à
Au nom de l'enquête judiciaire, l'ancien ministre du Budget a éludé de nombreuses questions. 

La question résume à elle seule les deux heures d'audition de Jérôme Cahuzac. Après plus d'une heure de ping-pong avec les membres de la commission d'enquête parlementaire, le député PS Christian Assaf demande, les yeux dans les yeux, à l'ancien ministre du Budget : "Qu'est-ce qui peut permettre à notre commission de ne pas mettre vos déclarations en doute ?" Réponse de Jérôme Cahuzac : "Je pense que vous avez davantage la réponse que moi-même".

Dédouaner l'exécutif. Face aux députés, Jérôme Cahuzac, mine sombre, voix lasse et réponses calibrées, s'est employé à dédouaner le gouvernement et le président de la République. "Je n'ai plus en mémoire le moment où j'ai abordé cette affaire avec Pierre Moscovici mais ce dont je suis certain, c'est qu'à lui, comme au Premier ministre et au président de la République, je n'ai pas dit la vérité", a résumé l'ancien ministre du Budget. Jérôme Cahuzac a aussi assuré n'avoir "eu aucun contact" avec la ministre de la Justice Christiane Taubira et le ministre de l'Intérieur Manuel Valls sur l'enquête préliminaire ouverte le 4 janvier concernant son compte bancaire caché à l'étranger.  

Répondre ou éluder. L'ancien grand argentier de Bercy a prêté serment, jurant de dire "la vérité, toute la vérité, et rien que la vérité". Il n'en a pas moins éludé bon nombre de questions des députés. Jérôme Cahuzac a ainsi décliné les interrogations sur les banques dans lesquelles il avait placé de l'argent à l'étranger, le mécanisme juridique utilisé pour cela, les dates de transferts ou encore ses déplacements en Suisse. La raison ? Ces questions empièteraient sur l'information judiciaire en cours. "Je comprends la déception, la frustration, l'agacement. Mais je ne peux pas parler de faits concernant une instruction en cours", s'est-il justifié. Des arguments qui n'ont visiblement pas convaincu les membres de la commission parlementaire. Sur Twitter, les députés Daniel Fesquelle et Sergio Coronado n'ont pas caché leur exaspération.

Susciter l'empathie. Comme lors de son interview-confession à BFMTV le 17 avril, Jérôme Cahuzac a cherché à susciter l'empathie. A plusieurs reprises, l'ancien ministre du Budget a évoqué sa "douleur". Pourquoi ne pas avoir démissionné ? "Les choses sont assez difficiles comme cela pour que je ne me livre pas à l'étalage de mes sentiments personnels". Se sent-il victime aujourd'hui ?, lui demande une députée. "Si je suis victime de quelqu'un, c'est de moi-même, et de personne d'autre", réplique-t-il. Si le justiciable Cahuzac est condamnable, l'homme, lui, cherche toujours à se faire pardonner. "Il y a deux tabous que je n'ai pas transgressés, au moins", a-t-il confié aux députés. "Le premier, contrairement à ce qui a été écrit : je n'ai jamais juré ne pas tenir de compte sur la tête de mes enfants, jamais. (...) Le deuxième tabou : mentir par écrit à l'administration dont j'avais la charge m'a semblé impossible".