Accord PS-EELV : 48 heures électriques

L'incertitude planait toujours jeudi sur l'accord entre PS et Europe Ecologie-Les Verts.
L'incertitude planait toujours jeudi sur l'accord entre PS et Europe Ecologie-Les Verts. © Maxppp
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Un accord a finalement été trouvé sur la filière MOX. Europe1.fr revient sur deux jours de confusion.

Le Parti socialiste et Europe Ecologie-Les Verts, qui ont finalement annoncé un accord jeudi après-midi, se renvoyaient la balle depuis mardi, sur le dossier du nucléaire, et du combustible MOX. En jeu : l'accord électoral en vue des scrutins présidentiel et législatif de 2012. Tout est en fait parti du retrait par la direction socialiste d'un passage sur le combustible nucléaire MOX, prévu dans le texte signé mardi entre les deux formations. Mais Michel Sapin, chargé du projet présidentiel dans l'équipe de François Hollande et Jean-Vincent Placé, conseiller politique de Cécile Duflot, ont finalement fait jeudi une mise au point commune sur le sort de la filière Mox, précisant qu'il faisait bien partie de l'accord entre PS et EELV. Europe1.fr revient sur 48 heures de confusion.

Mardi. 15h30. Un accord est trouvé…dans la douleur. Après six mois de tractations, les deux partis trouvent un accord a minima. Les écologistes exigeaient la sortie du nucléaire. Mais François Hollande n’a pas transigé, restant attaché à sa volonté de réduire de 75 à 50% la part du nucléaire dans la production d’électricité français à l’horizon 2025. Cette proposition a finalement été retenue dans l’accord.

Par ailleurs, sur l’EPR de Flamanville, le compromis trouvé prend simplement acte d'un désaccord. Les autres points d'entente entre le PS et EELV portent sur notamment sur la "fermeture progressive de 24 réacteurs" (sur 58 + 1 EPR, ndlr), l'arrêt immédiat de Fessenheim" et sur la décision de ne pas initier de nouveau projet de réacteur.

Mardi soir. Concessions sur le MOX… gommées au PS. C'est ce qu'affirme dès mercredi matin Le Monde.fr, qui s'est procuré le contrat de mandature signé par les deux partis. Que s'est-il donc passé entre la signature de l'accord et le moment où ce retrait a été effectué ? Selon une source proche du dossier interrogée par l'AFP, le nouveau directeur des affaires publiques d'Areva, Jacques Gérault a téléphoné mardi soir à Bernard Cazeneuve, député-maire de Cherbourg, près de la Hague et porte-parole de François Hollande, pour l'avertir des "conséquences graves" pour le géant du nucléaire.

Le député aurait alors immédiatement téléphoné à François Hollande pour expliquer l'incohérence de la position socialiste. Le député de Corrèze a pris à son tour son téléphone pour demander le retrait du paragraphe de l'accord.

Mercredi après-midi. Le MOX sème la stupeur. L'information est confirmée par l'AFP dès 13 heures. Aussitôt, le porte-parole du PS Benoît Hamon tente de calmer le jeu et assure quelques minutes plus tard que le passage a été "retiré provisoirement" afin de "clarifier" une "différence d'interprétation" entre socialistes et écologistes, affirme le porte-parole du PS. Trop tard.

La polémique est lancée. "Suis une femme pas compliquée : un accord passé est un accord qui engage", commente dans la foulée Cécile Duflot sur compte Twitter. Et au même moment, Areva vient mettre le feu aux poudres. Le fleuron du nucléaire français indique avoir fait part au Parti socialiste "des conséquences graves" qu'entraînerait l'arrêt du retraitement et de la filière du combustible MOX. Les réactions des écologistes ne se font pas attendre. Noël Mamère sonne alors la charge, en prévenant que si le PS changeait d'avis sur le nucléaire, cela changerait "la donne" pour son parti car on ne peut construire l'avenir "avec des gens qui renient leur parole".

Mercredi soir. Cacophonie aux 20 Heures. Sur le plateau de TF1, François Hollande, confirme être favorable à la poursuite de la filière Mox "le temps nécessaire". Dans l'accord PS-EELV conclu mardi, "je n'ai rien troqué, j'ai dit qu'il fallait réduire la part du nucléaire dans la production d'électricité à l'horizon 2025", précise-t-il. Quelques minutes plus tard, sur France 2, interrogée sur les déclarations de François Hollande, la patronne des écolos Cécile Duflot botte en touche. L'accord d'alliance entre socialistes et écologistes sur le nucléaire "n'a pas bougé, c'est exactement le même texte", déclare la secrétaire nationale d'Europe Ecologie Les Verts. "J'ai reçu des assurances précises, (...) ce texte est le même", a-t-elle poursuivi, avant d'ajouter : "je crois à la parole donnée".

Jeudi matin. Le ton monte. Invité sur Europe 1, le numéro 2 d'EELV Jean-Vincent Placé, perd patience. "Aujourd'hui, autour de François Hollande, il y a un entourage très, très productiviste, très, très pro-nucléaire et qui commence à devenir extrêmement arrogant", accuse-t-il. "J'ai eu au téléphone moi-même Michel Sapin (NLDR, proche de François Hollande) hier à 17 heures", assure le sénateur de l'Essone. "Cette partie du texte (concernant le combustible recyclé Mox, ndlr) est là", ajoute-t-il, avant de mettre en garde l'entourage de François Hollande : "s'il y a des petits amis à lui qui mettent du blanco sur des textes vus par la Première secrétaire du PS et la secrétaire nationale d'EELV, ce n'est pas un bon début. Ca peut même être le début de la fin".

Comme on lui demandait qui avait dit mercredi la vérité, entre François Hollande assurant sur TF1 qu'il n'y a pas de sortie du nucléaire ou Cécile Duflot déclarant sur France 2 qu'il y a sortie, Jean-Vincent Placé en est "certain", "Cécile Duflot a dit la vérité. Dans la foulée, Jean-Marc Ayrault, également invité d'Europe 1, rétorque que son parti a "pris ses responsabilités" et "levé l'ambiguïté" sur la question du combustible nucléaire Mox. Pour le député-maire de Nantes, "c'est François Hollande qui dit la vérité, c'est un engagement qu'il a pris déjà pendant les primaires". "Quand je lis les interprétations des écologistes, ils ont obtenu l'abandon du Mox !", relève-t-il. "Ca n'est pas possible !", "on ne peut pas à la fois dire qu'on est pour Flamanville et dire qu'on abandonne le Mox", conclut-il.

François Hollande s'est refusé quant à lui à toute déclaration sur la mésentente entre le PS et EELV sur le nucléaire, évoquant jeudi une différence "d'interprétation" sur ce point de l'accord entre les deux partis. "Il n'y a aucune déclaration à faire de plus : il y a une interprétation que le Parti socialiste donne à cet accord, une autre interprétation (celle des écologistes, ndlr). Nous verrons bien. Il n'y a rien à dire de plus", a lancé le candidat.

Jeudi après-midi. Le PS et EELV s'accordent finalement. Nouveau et ultime rebondissement. Dans un communiqué conjoint transmis à l'AFP, Michel Sapin et Jean-Vincent Placé annoncent que le différend a été gommé. Concernant la filière MOX, il est prévu "un plan de reconversion permettant de maintenir le nombre d'emplois, par la mise en oeuvre de centres d'excellence du traitement des déchets et du démantèlement". L'accord ainsi finalisé doit être validé samedi par le conseil fédéral d'Europe Ecologie-Les Verts. Ainsi prendra fin un épisode de discordance qui aurait pu s'avérer bien gênant à plus long terme.