Visite houleuse de Kadhafi à l'Assemblée nationale

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Rédaction Europe1.fr , modifié à
Au deuxième jour de sa visite en France, Mouammar Kadhafi a été reçu mardi en fin de matinée à l'Assemblée nationale. "Une étape de trop" pour les députés du Nouveau Centre qui, comme les élus de gauche, ont boycotté la cérémonie. Les députés socialistes et Verts ont aussi quitté l'hémicycle mardi après-midi, au début du débat sur l'Europe, en signe de protestation. Puis ils sont revenus et Jean-Marc Ayrault, président de groupe PS, a déclaré à la tribune qu'on "ne déroule pas le tapis rouge à un dictateur dans l'enceinte de la démocratie".

Mouammar Kadhafi a été reçu en fin de matinée au Palais Bourbon. Actuellement en visite officielle en France, le numéro 1 ne s'est pas exprimé dans l'hémicycle comme cela a été le cas de certains chefs d'Etat (Bill Clinton, Abdelaziz Bouteflika...). Echarpe noire, cape noire, costume noir sur chemise verte avec un badge lui aussi vert en forme de carte d'Afrique, le leader libyen est arrivé dans une limousine blanche, accueilli dans la cour par Bernard Accoyer, la garde républicaine à pied étant placée de part et d'autre d'un tapis rouge. Sur le perron de l'Hôtel de Lassay, résidence officielle du président de l'Assemblée, les honneurs lui ont été rendus par une compagnie d'infanterie. Mouammar Kadhafi et Bernard Accoyer se sont ensuite serré la main devant les drapeaux des deux pays dans le vestibule de la résidence. Ils se sont ensuite rendus dans le petit salon pour un entretien d'une quinzaine de minutes. Le président de l'Assemblée nationale avait indiqué qu'il aborderait la question du "cheminement de Tripoli vers la démocratie".

Le colonel Kadhafi a ensuite rencontré ensuite plusieurs parlementaires UMP, dont Patrick Ollier, président du groupe d'amitié France-Libye et Axel Poniatowski, président de la commission des Affaires étrangères de l'Assemblée. "La démocratie contamine les autres Etats, c'est quand on se parle qu'on résout les problèmes", a justifié Renaud Muselier, ancien secrétaire d'Etat aux Affaires étrangères. La presse avait été soigneusement tenue à l'écart de cette visite. Seuls les journalistes libyens et deux journalistes d'agence ont pu être présents. Peu avant son arrivée, une manifestation a eu lieu non loin du Palais Bourbon, à l'appel de Reporters sans frontières. Les participants qui scandaient "droits de l'Homme en Libye, bafoués, bafoués" ont été dispersés par la police.

Les députés de gaucheont boycotté la cérémonie (PS, PCF, Radicaux et Verts). "L'Assemblée nationale, ce n'est pas n'importe quel lieu, c'est l'institution parlementaire qui s'inscrit dans une longue tradition des droits de l'Homme. Il est important de rappeler nos valeurs. Je regrette profondément cette visite et nous continuerons de protester", a déclaré dans un premier temps le chef de fil des députés PS, Jean-Marc Ayrault. Puis les députés socialistes et apparentés ont quitté l'hémicycle mardi après-midi après que le président de l'Assemblée nationale ait refusé de donner la parole à Jean-Marc Ayrault, qui voulait faire un rappel au règlement pour protester contre la venue de Mouammar Khadafi. Finalement les députés sont revenus lorsque Bernard Kouchner, ministre des Affaires étrangères, est monté à la tribune pour faire une déclaration afin d'introduire un débat préalable au prochain Conseil européen. L'orateur socialiste prévu, Pierre Moscovici, a laissé sa place à son président de groupe qui est intervenu non pas sur l'Europe mais sur la venue du colonel Kadhafi. "On ne déroule pas le tapis rouge à un dictateur dans l'enceinte de la démocratie", a-t-il déclaré. "Aucun usage, aucun motif ne justifiait que l'on reçoive le colonel Kadhafi aujourd'hui à l'Assemblée", a ajouté Jean-Marc Ayrault.

Un certain nombre d'élus de la majorité étaient également gênés, voire mécontents de cette réception du colonel Kadhafi et certains se sont arrangés pour ne pas y assister, comme le patron du groupe UMP, Jean-François Copé. La visite à l'Assemblée "est une étape de trop. Nous avons donc décidé à l'unanimité de ne pas y assister", a déclaré de son côté le patron du groupe Nouveau Centre (centristes ralliés à Nicolas Sarkozy) François Sauvadet.