2017 : pour le centre, ça s’annonce mal

L'UDI de Jean-Christophe Lagarde est contrainte d'attendre la fin de la primaire de la droite pour évoluer. Et le temps peut sembler long.
L'UDI de Jean-Christophe Lagarde est contrainte d'attendre la fin de la primaire de la droite pour évoluer. Et le temps peut sembler long. © MIGUEL MEDINA / AFP
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Modem et UDI tiennent leur université de rentrée ce week-end. Avec toujours une problématique qui persiste : comment exister entre la droite et la gauche ?

Avec le centre, c’est un peu toujours la même histoire. Dès qu’une élection nationale approche, ses composantes sont dans le flou le plus total quant à l’attitude à adopter. C’est peut-être encore plus vrai cette fois-ci, avec la "primaire ouverte de la droite et du centre", qui rendent un peu plus inaudibles encore ses leaders, et un peu plus compliqué son positionnement. Sans compter la montée en puissance d’un Emmanuel Macron, qui empiète sur les plates-bandes centristes. Alors que le Modem et l’UDI (Union des démocrates et indépendants) tiennent ce week-end leur université de rentrée, l’équation posée aux différents mouvements du centre paraît pour l’heure bien compliquée à résoudre.

  • Au Modem, Bayrou dans l’étau

Chantre de l’indépendance du centre en 2007, quand il était le troisième homme de l’élection présidentielle, François Bayrou a semble-t-il perdu son pari en la matière. Son parti, le Modem, n’a jamais vraiment décollé, ni en termes de militants, ni en termes d’élus, et il doit en outre faire face à la concurrence de l’UDI, qui assume elle son penchant pour la droite. Alors, pour 2017, François Bayrou a changé de stratégie. Le maire de Pau a décidé de s’engager pour Alain Juppé lors de la primaire, avec la ferme intention de se présenter lui-même à la présidentielle si d’aventure c’est Nicolas Sarkozy, l’autre grand favori de la primaire, qui venait à l’emporter. Préparer une candidature tout en n’étant pas candidat, mais juste au cas où, pas facile.

Le problème Macron (1). Embarrassé sur sa droite, François Bayrou l’est également sur sa gauche, avec l’irruption du trublion Emmanuel Macron, qui lui dispute son espace politique. Sur sa gauche, d’ailleurs, ça se discute, à en croire le président du Modem. "Je fais plus attention au bas de la pyramide, et non pas au haut. Alors oui, je suis plus social, et plus à gauche que cet homme, je l’assume", a-t-il lâché jeudi soir sur Europe 1. Une pique parmi d’autres réservées par François Bayrou à son nouvel adversaire. Début septembre, il l’accusait ainsi sur BFMTV de ne préparer sa candidature que pour servir "des grands intérêts financiers".

Si le maire de Pau s’en prend ainsi à l’ancien ministre de l’Économie, c’est que ce dernier représente une gêne considérable en cas de candidature à la présidence de la République. Dans un sondage Elabe publié jeudi, François Bayrou, face à François Hollande et Nicolas Sarkozy recueille 12% des intentions de vote. Mais si Emmanuel Macron est de la partie, ce chiffre retombe à entre 8 et 10%. La différence n’est pas mince. Le ministre démissionnaire pourrait donc en reprendre pour son grade de vendredi à dimanche à Guidel, dans le Morbihan, où 800 personnes sont attendues pour l’université de rentrée du Mouvement démocrate. Nicolas Sarkozy devrait lui aussi, sans doute, être la cible de critiques. François Bayrou est contraint de faire feu de tout bois, afin de ménager toute les hypothèses. Pas simple.

  • L’UDI dans l’expectative

Le problème est assez similaire à l’UDI. Tant que la primaire n’est pas passée, le parti de Jean-Christophe Lagarde est contraint d’attendre et d’échafauder plusieurs plans. Un attentisme dont l’origine remonte à mars 2016, quand les militants, poussés par l’appareil, ont massivement refusé de participer à la primaire. Cette "primaire de la droite et du centre" est ainsi devenu la primaire de la droite et… de la droite. Il s’agissait pour l’UDI de ne pas disparaître des radars dès le second tour de ce scrutin, fin novembre 2016. Et ainsi garder quelques moyens de pression sur le vainqueur du processus chez Les Républicains. "Après la primaire, nous rencontrerons le vainqueur. S’il y a une coalition à construire et s’il partage notre vision, nous pourrons le soutenir", a ainsi déclaré Jean-Christophe Lagarde mercredi sur Europe 1.

Sauf qu’en attendant, il faut bien exister, et c’est parfois au prix d’atermoiements. En juin, le député-maire de Drancy annonçait qu’il ne voterait pas à la primaire. Mais mercredi, il a pourtant invité "tous les gens de l’UDI et du centre" à le faire. Il a affirmé à plusieurs reprises que son parti ne soutiendra personne, mais la consigne n’est pas respectée au plan individuel. C’est sans surprise Alain Juppé, le plus centriste des candidats LR, qui attire le plus. Mais Bruno Le Maire n’est pas en reste, et même Nicolas Sarkozy, malgré sa ligne dure, parvient à agréger quelques soutiens, à l’initiative du député et ancien ministre Maurice Leroy.

Le problème Macron (2). Un bel imbroglio donc, qui ne serait pas complet sans… Emannuel Macron bien sûr. Début septembre, Jean-Christophe Lagarde annonçait ainsi son intention "de dialoguer" avec l’ex-ministre. Une initiative qui n’a pas plu à Hervé Morin, président du Nouveau centre, l’une des composantes de l’UDI. "Si l’UDI décide que son avenir est avec Macron, c’est un débat qu’elle doit avoir dans ses instances", tempêtait dans Le Monde le président de la région Normandie, très attaché à l’alliance avec Les Républicains. Une preuve de plus que les deux hommes ne s’apprécient guère. Le pique-nique de rentrée, organisé samedi à Issy-les-Moulineaux, ne s’annonce pas sous les meilleurs auspices.

Théoriquement, le parti doit clarifier sa ligne en octobre, notamment en soutenant officiellement un candidat à la primaire LR. Mais selon L’Opinion, beaucoup préfèreraient attendre l’entre-deux-tours, histoire de fâcher le moins de monde possible. Car il faudra alors négocier des circonscriptions en vue des législatives. Tel est bien le nœud du problème. Sans une quinzaine de députés minimum, soit le seuil pour créer un groupe parlementaire à l’Assemblée, le danger de mort politique sera réel. Et cela dépendra beaucoup du bon vouloir des Républicains. Pour le centre, il n’y a point de salut sans être adossé au grand parti de droite. Et ça ne changera pas en 2017.