Ces Français qui chantent en anglais

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Aurélie Frex , modifié à
Yodelice, Izia, et Pony Pony Run Run ont triomphé aux Victoires avec des albums en anglais.

Shakespeare aurait-il gagné contre Molière ? En regardant les Victoires de la Musique, samedi sur France 2, la question méritait d’être posée. Pony Pony Run Run, Victoire de l’artiste révélation du public, est un groupe français originaire d’Angers et de Nantes, formé en 2003. Grâce au buzz créé autour du single Hey you, ces Français qui déclarent allègrement que leur culture musicale est "anglo-saxonne à 80-90%" connaît un succès certain avec son album entièrement en anglais You need Pony Pony Run Run.

Regardez le clip de Hey you :

Autre artiste à miser sur l’anglais, la jeune Izia, 20 ans, et fille de Jacques Higelin, a obtenu la Victoire de la révélation scène et de l’album rock de l’année. De son coté, Maxim Nucci a été sacré album révélation samedi. A 31 ans, celui qui avait travaillé comme réalisateur sur les albums en français de Jenifer, a choisi de faire une carrière d’interprète en anglais sous le nom de Yodelice, avec l’album Tree for life.

Voici le clip de Let me alone, d'Izia :

Le groupe Revolver, 20 ans de moyenne d’âge, et nommé dans la catégorie album révélation, est déjà disque d’or avec un album dans la langue de Shakespeare. Et c’est sans compter sur le dernier album de Charlotte Gainsbourg, de Sliimy ou de Air, tous ouvertement sous influence anglo-saxonne.

S’ouvrir au marché international

Même si les quotas de chansons francophones s’imposent toujours aux radios, la crise du marché du disque est passée par là. "Il y a toujours eu des groupes français qui chantaient en anglais, sauf que ça se voit plus maintenant. Depuis la crise, les maisons de disques se sont rendues compte qu’il fallait s’ouvrir au marché international, et ont signé plusieurs groupes français qui chantaient en anglais", explique Timothée Barrière, journaliste spécialiste de la musique au Nouvel Obs.

Une tendance rock

Ces artistes qui chantent en anglais sont principalement des groupes de rock ou des artistes électro, dont la musique se prête mieux à cette langue qu'au français. Un passage à l’anglais d’autant plus facile que les jeunes Français maîtrisent mieux l’anglais que leurs aînés. Une tendance qui est aussi née grâce à des collaborations entre artistes français et anglo-saxons, comme Charlotte Gainsbourg avec Air ou Beck plus récemment.

"Les jeunes d’aujourd’hui ont davantage de moyens que les générations plus âgées d'accéder à certains standards musicaux anglo-saxons et de se faire une large culture musicale, rock notamment, il est plus facile pour eux d’intégrer ces influences dans leur musique", poursuit le journaliste.

Des jeunes artistes qui sont "décomplexés" de chanter en anglais : "Comme la défense de la francophonie se perd un peu, l’effort d’adaptation ne se fait plus", selon Timothée Barrière.

Une tendance qui s'inscrit également dans un rock moins contestataire : "en plus, cela fait très longtemps qu’on n’a pas eu un vrai bon groupe rock français contestataire, c’est difficile à défendre aujourd’hui", constate Timothée Barrière.

Un effet de mode ?

La mode de ces jeunes groupes plus anglo-saxons que français pourrait ne pas perdurer. Si la jeune génération bénéficie d’une production globalement de qualité, il n’est pas dit que les maisons de disques continueront à surfer sur cette vague. Reste à ces artistes à vendre leurs opus dans la langue de Shakespeare pour confirmer la tendance.

En attendant, à l’image de David Guetta ou du groupe Phoenix, dont 60% des ventes se sont faites à l’étranger en 2009, les albums français qui s’exportent le mieux sont principalement des albums en anglais…

- Regrettez-vous que la jeune génération chante de plus en plus en anglais ?