Laurent Joffrin sur "Libération" : "Il faut faire payer le lecteur"

Laurent Joffrin 1280
Laurent Joffrin est content du virage numérique que prend "Libé".
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Ugo Pascolo
Selon le directeur du quotidien "Libération", la transition vers le numérique en cours à "Libération" est la conséquence de l'échec de l'information gratuite sur internet.
INTERVIEW

"Ça va mieux qu'il y a trois ans". Invité de Village médias mardi, Laurent Joffrin, directeur du quotidien Libération, dresse un bilan des comptes de son journal trois ans après son arrivée et dévoile une partie de sa stratégie économique pour remettre le journal sur les bons rails. 

Libé touche "9 millions de personnes par mois". "Quand je suis arrivé, Libé était au bord de la faillite et en guerre civile", explique Laurent Joffrin au micro d'Europe 1. "Il a fallu faire des économies, remettre les gens ensemble et maintenant ça va mieux. (...) Pendant l'année 2017, on a fait l'une des meilleures progressions des quotidiens. Par ailleurs, le basculement sur internet est en cours, on est en plein dedans. Si on regroupe le nombre de contacts que Libération a avec ses lecteurs sur le papier et le web, on atteint 9 millions de personnes par mois", dévoile le journaliste. 

"On a un projet d'offres numériques, c'est ce qui compte". Avec 67.000 exemplaires papiers vendus chaque jour et presque 20.000 en format numérique, Libération a encore toutefois une certaine marge de manœuvre pour améliorer ses chiffres. "C'est vrai que pour le print c'est difficile. L'année dernière on l'a fait mais c'était la campagne électorale", reconnaît-il. "Mais ce qui compte, c'est d'avoir une stratégie. Et Libération a un actionnaire qui nous soutient et nous donne les moyens de tenir nos objectifs". Et à en croire le directeur, la stratégie de Libération fonctionne : "On a embauché quinze personnes en trois mois et on va le refaire. On a un projet d'offres numériques payantes, c'est ce qui compte. Parce qu'il y a un eu une erreur tragique commise par les gourous d'internet qui sont peut-être bon en informatique, mais nul en économie", lance-t-il.

"L'info gratuite dévalorise". "Ils nous ont dit de faire du gratuit et nous, comme des cons, on l'a fait, mais beaucoup d'autres aussi. Une fois le système en place, ils ne voyaient que les scores de clics, mais je ne peux pas payer les journalistes en clics : la pub est allée massivement chez Google et Facebook", analyse Laurent Joffrin. "Il faut prendre conscience que l'info gratuite dévalorise l'information et en plus ça ne rapporte pas assez pour vivre. Donc il faut faire payer le lecteur". Dans cette optique, Libération, lance des "verticales", "des rubriques thématiques". "On a déjà le supplément numérique Le P'tit Libé, consacré aux 7-12 ans". Cette déclinaison hebdomadaire compte pour l'heure 1.000 abonnés à cinq euros par mois. "C'est la difficulté de faire payer", reconnaît Laurent Joffrin.