Elise Lucet sur l'univers du luxe dans "Cash Investigation" : "Ce qu’on a découvert n’est pas très reluisant"

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Aurélie Dupuy , modifié à
Le nouveau numéro de "Cash Investigation" expose les dessous des grands groupes de luxe français, tels LVMH ou Kering. Et laisse entrevoir troubles fiscaux et conditions de travail désastreuses.
INTERVIEW

Les sacs de grandes marques font rêver. Mais d'après le nouveau numéro du magazine Cash Investigation intitulé Luxe, les dessous chocs, qui sera diffusé mardi en prime time sur France 2, le rêve vire rapidement au cauchemar. Invitée de Philippe Vandel, dimanche soir pour présenter l'enquête, Elise Lucet décrit un monde opaque et bien moins glorieux que ce qu'en laissent supposer les vitrines.

Le cuir, enjeu colossal. Côté luxe aussi, "la France est championne du monde", décrit Elise Lucet. Les marques comme Chanel, Balenciaga ou Vuitton sont connues et se vendent dans le monde entier. "Il y a notamment les deux poids lourds que sont LVMH et Kering", précise la journaliste, avant d'avancer ce que pèsent ces mastodontes de l'industrie française du luxe : "LVMH, c’est 42 milliards d’euros, Kering, c’est 15". Au cœur des ces chiffres d'affaires colossaux trône la maroquinerie. L’univers du cuir représente en moyenne 70% du chiffre d’affaires de ces grandes marques. "Pour certaines, ça va jusqu’à 85%", précise Elise Lucet. L'enjeu est donc immense et derrière pubs et défilés, "ce qu’on a découvert n’est pas très reluisant", prévient la journaliste. 

Entendu sur europe1 :
Il m’a attrapée par le bras par force, pour me faire rentrer dans son bureau en m’isolant du reste de mon équipe

"Coups de barre de fer". Après avoir appelé "plusieurs centaines de tanneries" italiennes d'où provient le cuir, l'équipe de France 2 a pu rencontrer des travailleurs, notamment deux Sénégalais "tabassés à coups de barre de fer" pour avoir réclamé leur salaire, raconte la journaliste qui explique avoir reçu plusieurs autres témoignages de non paiement, de travail au noir ou d'heures supplémentaires non payées. Mais il y a pire : "des systèmes de sécurité qui sont enlevés sur des machines. Un salarié qui témoigne a trois doigts en moins...", dit-elle encore.

"J'ai eu peur". La journaliste s'appuie aussi sur une enquête de l'inspection du travail "qui prouve qu’il y a beaucoup plus d’accidents pour les travailleurs de l’étranger, deux fois plus que chez les Italiens." Un rapport que le lobby du cuir aurait tout fait pour interdire au niveau européen, afin qu‘il soit retiré d‘internet. La journaliste a d'ailleurs rencontré un représentant de ce lobby à Bruxelles et avoue avoir "eu peur". "Il m’a attrapée par le bras, par force, pour me faire rentrer dans son bureau en m’isolant du reste de mon équipe, en fermant la porte. Heureusement, un cameraman a eu le réflexe de mettre son pied dans la porte", explique Elise Lucet.

L'équipe aborde aussi le volet fiscal de ces grands groupes, avec de nouveaux chiffres troublants. En attendant une éventuelle enquête du parquet national financier en France, la journaliste indique que l'Italie a d'ores et déjà ouvert la sienne.