Le journaliste Laurent Richard signe une enquête sur le "double jeu turque" dans la guerre contre les salafistes syriens. 2:40
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Ugo Pascolo , modifié à
Le journaliste Laurent Richard signe dans "Envoyé Spécial" une enquête sur le "double jeu turc" dans la guerre contre les salafistes syriens. Il reprend une enquête d'un confrère turc qui vit en exil.
INTERVIEW

"L'idée est de terminer les enquêtes que nos confrères turcs ne peuvent plus terminer", résume le journaliste Laurent Richard. Il signe un reportage dans Envoyé Spécial intitulé Turquie, l'enquête interdite, diffusé jeudi soir sur France 2 à 20h50, dans laquelle il montre des images des services secrets turcs en train de livrer des armes à des groupes salafistes syriens de l'autre côté de la frontière. Ce n'est pas lui qui a déniché l'information, mais un journaliste turc, Can Dündar, qui s'est fait tirer dessus à la sortie du tribunal d’Istanbul alors qu'il s'apprêtait à dévoiler le pot aux roses. 

Des questions dérangeantes. "Can est devenu une sorte d'ennemi d'Etat pour avoir fait son métier, pour voir révéler des images qui nous éclairent sur le double jeu de la Turquie dans cette région du monde", analyse Laurent Richard au micro de Village médias jeudi. Si la Turquie est officiellement alliée aux Occidentaux dans la guerre contre les salafistes syriens, ces images sous-entendent que le président turc Erdogan aurait armé les combattants syriens. Un gros problème pour la diplomatie d'Ankara. "En reprenant cette enquête, j'ai pu poser une question sur ces images à Recep Tayyip Erdogan lors d'une conférence de presse à l'Elysée", révèle le journaliste. "Il m'a qualifié de 'soutien à une organisation terroriste', toute comme la presse gouvernementale le lendemain", révèle-t-il.

"Vous pouvez tuer le messager, mais pas son message". C'est pour ce genre d'affaires que Laurent Richard a créé Forbidden stories, un site internet sur lequel les journalistes peuvent stocker leurs informations sensibles s'ils se sentent en danger. "Il y a une centaine de journalistes derrière les barreaux en Turquie pour des raisons absurdes, comme propagande ou terrorisme, alors qu'ils ont simplement fait leur métier", détaille le journaliste. "Donc l'idée est de terminer les enquêtes de ceux qui ne peuvent plus le faire". "Comme ça on envoie un message assez fort aux ennemis de la presse : 'vous pouvez tuer le messager, mais pas son message'", explique-t-il. Avant de conclure : "on est prêt à prendre le relais, parce que derrière, ce sont des informations qui relèvent de l'intérêt général et qui concerne la communauté internationale".