"Il est important de se ressourcer le dimanche"

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"L'argument économique n'est pas tellement convaincant", affirme Mgr Podvin avant d'interroger la société sur son équilibre qui ne repose pas que sur le travail.

Monseigneur Bernard Podvin, porte-parole de la Conférence des Evêques de France

Ses principales déclarations :

"Notre interpellation est pour l'équilibre d'une société. Que veut-on faire de ce dimanche ? C'est là qu'est la question. Evidemment, on comprend qu'on est dans une ambiance très pesante sur le plan du chômage, l'angoisse est là, comment ne pas le comprendre ? J'ai été responsable d'étudiants, je connais cette précarité. Mais les arguments économiques ne sont pas très convaincants, M. Hamon dit qu'il n'a pas reçu d'études probantes quant à une relance de la consommation par l'ouverture le dimanche... Certains économistes du CNRS ne parlent pas de création d'emploi mais de transfert d'emploi ! L'argument économique n'est pas terriblement convaincant."

 

"Moi qui suis religieux, je pose la question de l'équilibre d'une société. On ne se rencontre plus dans cette société ! On ne se voit plus ! Nous sommes dans une société fragile, où la mobilité est très grande. Il est important de pouvoir un peu se ressourcer le dimanche, quelles que soient les convictions."

"Je comprends les arguments de ceux qui travaillent le dimanche [qui disent craindre de perdre du pouvoir d'achat ou leur emploi], je les comprends dans leurs situations personnelles. Leurs arguments sont fondés à titre personnel. Mais j'interpelle la société : pourquoi n'aide t-on pas le monde étudiant à vivre autrement la réalité ? D'ailleurs le monde étudiant n'est pas unanime, il y a du débat, regardez les positions de l'UNEF et celles de l'UNI. Certains syndicats étudiants demandent des allocations complémentaires ou des aides qui pourraient peut-être atténuer cette précarité. Il ne faut pas croire que l'étudiant se rend au boulot par plaisir ! Il y a aussi un équilibre de vie, un ressourcement, une détente qui peut passer autrement..."

Avec la crise, en refusant le travail le dimanche, n'allez-vous pas pénaliser ces exclus ?

"Je ne suis pas venu vous parler en étant sur un nuage ! Je connais cette réalité économique, je la rencontre concrètement, les gens nous en parlent. Mais qu'est-ce que ça veut dire de ne pas avoir des arguments économiques convaincants et, en même temps, de déséquilibrer complètement une vie ? Qu'est-ce qui va nous rester comme point un peu commun, un peu repère, d'une société, pour vivre quelque chose du ressourcement ou de la culture commune ? Les gens vont-ils encore pouvoir se rencontrer dans cette mobilité, cette ubiquité permanente ?"

"Mon modèle de société ne se résume pas à l'économique. Je n'ignore pas la crise ! Les allemands sont opposés à l'ouverture dominicale et je ne crois pas que leur économie se porte mal..."

Il y a la vraie vie... 3 millions de salariés travaillent déjà le dimanche, on doit fermer les boulangeries ?

"Je n'ignore pas la vie ! Je sais très bien qu'il y a des fonctions vitales à assumer, je ne suis pas venu parler de choses irréelles. Je ne demande pas un dimanche idyllique, irréel. Une chanson dit : "Je hais les dimanches" Et pourquoi ? "Parce que tu travailles, toi que j'aime, toute la semaine et le dimanche aussi." On ne se rencontre plus. Cette chanson n'a pas été écrite par un religieux."