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SAISON 2012 - 2013, modifié à

Le président de la FNSEA chiffre les dégâts des intempéries actuelles à plus de 500 millions d'euros.

Les principales déclarations de Xavier Beulin, président de la FNSEA:

 

Avez-vous déjà chiffré les dégâts des intempéries ?

"Oui, il faudra affiner mais on estime aujourd'hui que ça pourrait se monter à plus de 500 millions d'euros : il y a près de 300.000 hectares en France aujourd'hui détruits ou qui n'ont pas pu être semés. 1.500 euros par hectare, ça va très vite... Au-delà de ça, il y aura malheureusement des pertes de fonds : on a eu, en plus des pluies torrentielles, des orages de grêle dans beaucoup de régions, des arboriculteurs qui ont beaucoup souffert, des vignes qui sont vraiment massacrées, c'est ce qu'on appelle des pertes de fonds. La récolte actuelle évidemment est complètement détruite ; celle à venir et les deux prochaines pourraient être également compromises."

 

Qu'attendez-vous du gouvernement, des assurances ?

"D'abord il faut faire un bon diagnostic, ensuite, oui, nous ferons appel à la solidarité nationale à travers l'Etat, le fonds des calamités agricoles, les assureurs également, et puis on va également, c'est une constante dans l'agriculture, mettre en place des dispositifs de solidarité, en particulier pour les éleveurs, malheureusement ce sont eux qui sont souvent, avec leurs animaux, les premières victimes. C'est le problème des fourrages : lorsque que vous avez votre exploitation sous l'eau depuis 3 ou 4 mois, ce qui est le cas dans certaines vallées,  il n'y a pas de fourrage disponible, il faut trouver de l'alimentation supplémentaire."

>> Vidéo sur Europe1.fr

http://www.europe1.fr/MediaCenter/Emissions/L-interview-de-Jean-Pierre-Elkabbach/Videos/Nous-allons-en-appeler-a-la-solidarite-nationale-1558101

Jean-Marc Ayrault a prévu une réunion sur réparation et prévention des inondations avant l'été. Vous préférez l'urgence ou vous êtes prêt à attendre le temps de la réflexion ?

"Je réclame depuis plusieurs années des dispositifs préventifs. Ce sont des systèmes assurantiels évidemment, je dis évidemment car dans le cadre de la future PAC nous demandons à consolider ces dispositifs, à faire en sorte qu'un agriculteur, très vulnérable par rapport à ces éléments climatiques dont on voit bien la récurrence. Grosse sécheresse il y a deux ans, excès de pluie cette année, on passe d'un excès à l'autre avec les mêmes conséquences : des pertes, il faut absolument avoir des dispositifs de gestion de risque. Ce ne peut être que des dispositifs collectifs, on ne peut pas avoir un dispositif à la carte par agriculteur..."

Collectif, donc aussi européen ?

"Absolument. Et là dessus, Commission et Parlement ne sont pas encore convaincus du dispositif. On voit que, dans d'autres pays, notamment aux Etats-Unis aujourd'hui, les assurances fonctionnent. C'est un dispositif de type assurance automobile : vous souscrivez un contrat, l'important pour l'agriculture, vu la masse des dégâts qui peuvent être concernés par des éléments exceptionnels, il faut une réassurance publique, c'est là où l'Europe et les Etats membres, la France en l'occurrence, doivent apporter leur contribution."

Avez-vous aperçu Stéphane Le Foll auprès des agriculteurs ?

 

"Pas encore, mais il a encore quelques jours pour se déplacer sur le terrain..."

 

Qu'il ne soit pas venu vous surprend ?

"Non. Ce qui me surprend parfois, ce sont les prises de paroles de notre ministre de l'Agriculture... Qui s'exprime peut-être moins sur l'agriculture que sur d'autres sujets... Je crois que c'est reconnu : Stéphane Le Foll, qui a la confiance du Président, s'exprime sur de nombreux sujets de société régulièrement. Nous attendons qu'il soit peut-être un peu plus impliqué sur la sphère agricole... D'autant qu'il y a beaucoup d'enjeux en ce moment : la PAC est en pleine négociation, ces aléas climatiques..."

C'est vous qui l'avez voulu à la tête de ce ministère...

"Ce n'est pas le patron de la FNSEA qui nomme le ministre de l'Agriculture, ça se saurait. Il a une expérience européenne puisqu’il a fait deux mandats de parlementaire européen, il était à la Commission agricole du Parlement, nous considérions que c'était un bon interlocuteur. Ceci dit, il a énormément de qualités, je lui demande aujourd'hui d'être peut-être un peu plus présent dans la sphère agricole, et peut-être un petit peu moins sur d'autres sujets"

Vous serez présent à la Conférence sociale, ce qui n'était pas le cas l'an dernier...

"J'ai beaucoup insisté l'an dernier pour faire partie de la première conférence et là nous serons dans toutes les tables rondes. C'est important, il y a beaucoup de sujets sur la table : les retraites..."

Qu'allez-vous demander concrètement ?

"Deux choses : d'abord, nous voulons un SMIC européen. Nous avons aujourd'hui entre certains pays européens des différentiels très importants de traitement social, par exemple avec l'Allemagne. Il n'est pas rare de voir des écarts de 4 à 6 euros par heure travaillée entre la France et l'Allemagne dans le domaine agricole, ce n'est plus supportable. Je précise qu'en Allemagne 8 millions de salariés sont payés en dessous du SMIC, c'est particulièrement vrai dans la sphère agricole agro-alimentaire..."

Ca ne coûte rien de le demander, c'est très difficile à obtenir...

"On peut parler de la construction européenne, il y a quand même quelques efforts à faire. Ce que nous voulons, c'est faire converger les systèmes. Probablement qu'en France, nous avons des adaptations à faire, nous avons demandé une TVA dite emploi, une TVA sociale, elle a été retoquée par la majorité actuelle pour être remplacée par le fameux CICE, il faudra sans doute reprendre ce débat-là mais, dans le même sens, nous attendons aussi de nos partenaires européens qu'ils fassent aussi un effort pour se mettre à niveau."

"C'est une distorsion absolument flagrante. Dans les filières fruits-légumes et animales où le poids de la main d'œuvre dans l'ensemble des charges est très important, il n'y a pas photo : aujourd'hui, nous sommes complètement distancés."

A propos des retraites :

"On parle beaucoup d'égalité dans ce pays. S'il y a un domaine où l'on est en pleine inégalité, c'est le domaine des retraites. Les agriculteurs ont les plus petites retraites de France, elles sont calculées sur l'ensemble d'une carrière quand certains voient leur retraite calculée sur les six derniers mois. Il y a là des injustices qui ne sont plus supportables. C'était un engagement du chef de l'Etat : nous allons le lui rappeler, j'espère que nous obtiendrons gain de cause là-dessus."

"Je n'ai pas l'habitude de parler d'un cas personnel mais ma mère, tombée veuve à 43 ans, 600 euros de retraite par mois ! Il y a quand même des choses qui ne sont pas tout à fait cohérentes..."

Souhaiteriez-vous une exception pour l'agriculture française ?

"Exception peut-être pas, mais en tout cas nécessité d'avoir une forme d'équité. Il n'est pas normal aujourd'hui... Autant j'ai compris l'exception culturelle, à la limite je n'ai pas de problème avec ça, mais je ne voudrais pas demain que l'on se retrouve dans une situation avec les Etats-Unis où l'on serait contraints d'importer des poulets chlorés, du bœuf aux hormones, des produits OGM parce que c'est ce qui nous attend, alors que nous-mêmes nous serions en grande difficulté pour exporter nos fromages, notre foie gros, etc. Réciprocité des engagements. Au-delà de ça, ma crainte et je l'exprime de manière très vive : c'est qu'à côté de cette exception culturelle, au fond, d'autres secteurs d'activité, notamment l'alimentation et l'agriculture, paient le contre prix de cette exception..."

S'il y a trop d'exceptions, ça n'est plus un accord de libre-échange...

"C'est pour ça qu'il ne faut pas parler d'exception mais être équitable ! Nous savons que les USA ont une forte propension à vouloir exporter leurs produits agricoles notamment sur l'Europe, premier marché solvable au monde. Il n'est pas question pour nous de nous laisser faire imposer quoi que ce soit des Etats-Unis sans réciprocité..."

Dimanche : rassemblement aux Invalides, un village agricole, un thème, élevage français cause nationale...

"L'élevage est en péril en France pour des tas de raisons, de compétitivité notamment. Au delà de ça, il est important je crois que nous sachions défendre notre diversité, nos terroirs, nos systèmes agricoles. Pour cela, oui, il faut consommer Français ! La notion de viande française ne doit pas être qu'un slogan, ça doit se mesurer au quotidien, on ne peut pas avoir demain une revendication forte sur la diversité, la qualité, l'origine, et avoir un standard de prix mondial. Ca ne tient plus. C'est le message que nous essayerons de faire partager avec nos amis parisiens..."