Jean-Christophe Cambadélis : "Je ne suis pas le porte-parole du gouvernement"

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SAISON 2013 - 2014, modifié à

Selon le premier secrétaire du Parti Socialiste, pour qu'il y ait de la croissance, "il faut une tout autre orientation à Bruxelles".

Ce matin à 8h20, Europe 1 recevait Jean-Christophe Cambadélis, premier secrétaire du PS, et député de Paris.

Ses principales déclarations :

 

Du gel partout : on reporte les grandes réformes...

"Vous êtes un peu dur ! Non, nous nous attaquons au premier problème : celui de la lutte contre le déficit et le chômage ! Il y aura des réformes que vous appelez structurelles mais dans l'instant nous faisons cela..."

Vous ne plongez pas des décisions sous très basse température pour les retrouver plus tard telles qu'elles ?

"Non, nous ne voulons pas faire cela ! Manuel Valls a pris très clairement le taureau par les cornes : il a annoncé un certain nombre de mesures, de décisions, qui ont fait débat, mais qui sont des décisions..." (Interrompu.)

La méthode a été jugée impressionnante, parfois brutale : le secret, la célérité, la surprise.

"Oui, mais à partir de là on peut commencer à discuter sinon on s'enlise dans les palabres auparavant : après on n'a pas de décision ! C'est ce que nous ont dit les Français : soyez crédibles et efficaces. Ça commence."

Ce programme est courageux : sera-t-il suffisant ?

"C'est déjà un commencement, mais ce ne sera pas suffisant s'il n'y a pas de croissance. Il faut une croissance : pour cela il est nécessaire que l'Europe tire cette croissance, et pour la tirer il faut une toute autre orientation à Bruxelles. C'est la question des élections européennes, une nouvelle majorité au Parlement européen."

 

Michel Sapin vient de dire que la France a obtenu de ses partenaires européens un rythme un peu moins rapide de baisse de ses déficits, qu'elle respectera tous ses engagements. Qu'est-ce que ça signifie ? Vous allez bénéficier de plus de temps ?

"Je ne suis pas et ne serai pas le porte-parole du gouvernement. Je suis le porte-parole du PS : je veux bien discuter de ce que disent les ministres, mais je ne suis pas leur porte-parole, c'est peut-être le changement d'attitude du PS sous la direction... (Interrompu.) Maintenant, avançons sur ce que vous venez de dire : oui, il faut changer les critères de Maastricht qui ont été élaborés avant la crise. C'est tout l'objet de la campagne des élections européennes. Il faut les changer : changer leur contenu et la trajectoire. On en parlera lors des élections européennes mais c'est l'élément essentiel ; je suis très heureux qu'on ait pu gagner un peu de temps sur la réduction des déficits, et j'espère qu'avec une nouvelle présidence de la Commission nous serons dans une nouvelle situation pour discuter de nos déficits."

 

Nous ne serons pas à 3% en 2015 ?

"Je dis, en tant que dirigeant du PS : cela n'est pas obligatoire ! Mais il y a des engagements de la France pris au moment du référendum de Maastricht : je ne suis pas choqué que la France respecte ses engagements. Mais en tant que dirigeant du PS, je combats et je combattrai pour desserrer cet étau sur l'ensemble des économies européennes et qu'il y ait la croissance."

 

Les Français doivent-ils comprendre qu'il y aura les 3% en 2015 ou qu'à cause de cette bataille qui va être menée pendant les élections vous pensez que vous aurez plus de temps ?

"Ils doivent comprendre que le combat des socialistes en Europe c'est bien sûr pour une rigueur économique mais supportable socialement et économiquement supportable ! Et on ne peut pas supporter si on reste dans le dogmatisme : il faut de la croissance ! Il faut une nouvelle croissance en Europe, on ne s'en sortira pas sans cela ! Il faut la tirer, la nourrir, la construire : tout le monde doit comprendre qu'il faut changer d'orientation à Bruxelles."

 

Comment définissez-vous ce qui s'est passé hier ? Austérité ? Sérieux budgétaire ?

"C'est un assainissement nécessaire et un investissement souhaitable. Assainissement parce que évidemment nous ne pouvons pas dépenser plus que nous avons en caisse. Et investissement pour les entreprises, l'emploi, en protégeant les plus défavorisés."

 

Socialistes et Verts, qui ont voté la confiance savaient, étaient prévenus de ce qui allaient arriver : pourquoi ces protestations, ces cris ?

"C'est toujours la même chose ! Entre ce qu'on a entendu et ce que l'on voit, il y a de temps en temps des hiatus. Personne n'est pris au dépourvu ! 50 milliards d'économies, on ne peut pas penser que cela se ferait de manière indolore, c'est un problème. Il faut par contre être juste : c'est pourquoi les socialistes ont demandé de préserver le pouvoir d'achat des petites retraites. Et peut-être, nous le demandons ici à Europe 1 à Manuel Valls, un petit coup de pouce sur le RSA."

Demandez-vous que l'Etat donne à son tour l'exemple des économies ?

"C'est ce qui a été dit dans la première partie de l'intervention de Manuel Valls et je crois que ce sera fait ! Il y a un effort considérable qui a commencé à être fait, il faut le continuer, il faut aussi le faire au niveau des collectivités locales. Tout le monde doit mettre au pot pour assainir nos déficits."

Au début du mandat de François Hollande, on disait que ça allait être dur et qu'on verrait ensuite le redressement et un certain nombre de faveurs et redistributions. Les Français doivent-ils penser qu'il va leur être demandé des efforts tout au long du quinquennat ?

"Tout au long du quinquennat, peut-être pas : cela dépendra de la croissance. Aujourd'hui, les efforts ont déjà produit un petit sursaut : moins de déficit, un petit peu de croissance mais ce petit sursaut n'est pas suffisant. Il faut le grand saut : pour le grand saut, il faut continuer à être dans une rigueur économique mais, encore une fois, le PS demande lui que l'on protège les plus démunis, les plus pauvres, ceux qui vivent de peu et gagnent peu."

Manuel Valls donne rendez-vous en juin pour réduire les impôts qui ont augmenté depuis 2010 de 60 milliards : les impôts vont baisser en 2014 ?

"Nous, nous avons demandé qu'ils baissent, toujours pareil, pour les salariés qui gagnent le moins. Il y aura une discussion et j'engage tous les parlementaires à participer à cette discussion pour faire évoluer le débat budgétaire."

 

Pourquoi ne suivez-vous pas le conseil de Marchais qui disait de prendre l'argent là où il est ?

"Parce que l'argent n'est plus là où il était ! C'était facile ! Aujourd'hui c'est la mondialisation ! C'est un mot d'ordre qui était certes un peu démagogique mais dans le cadre d'un état-nation ! Aujourd'hui c'est dans le monde entier !"

C'est un plan d'économies déjà bouclé à prendre ou à laisser, ou lors du débat du Parlement le 30 avril les centristes, les Verts et les mécontents du PS pourront l'amender ?

"Je parle pour les socialistes : le débat est toujours possible mais la solidarité gouvernementale ne se discute pas."

 

On peut le modifier mais pas le dénaturer ?

"On ne le dénature pas et surtout on le vote au bout ! Pas de crise ! N'ajoutons pas la crise à la crise ! Parfois on surréagit trop !"

Etes-vous sûr d'avoir la majorité au Parlement ?

"Bien sûr."

Dans quel état avez-vous trouvé le PS ?

(Silence.) "Voilà." (Rires.)

 

N'avez-vous pas été surpris que Manuel Valls prononce son intervention de l'Elysée ?

"C'était une question de rapidité et d'impact après les décisions du Conseil des ministres"