Venezuela : la colère monte après la mutinerie mortelle

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Un feu a déclenché une émeute dans le commissariat de Valencia utilisé comme prison et 68 détenus seraient morts brûlés ou asphyxiés © JUAN BARRETO / AFP
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avec AFP , modifié à
Au lendemain d'une mutinerie dans un commissariat, utilisé comme une prison, qui a fait 68 morts, les proches des victimes ont laissé exploser leur colère.

La colère montait jeudi au Venezuela, au lendemain d'une des pires mutineries de son histoire durant laquelle 68 personnes sont mortes dans un incendie dans un commissariat surpeuplé de Valencia (nord), nouvel épisode d'un fléau qui touche l'Amérique latine.

Les proches des détenus réclament des explications. Des barrières métalliques étaient disposées devant une des entrées, carbonisée, du commissariat principal de la capitale de l'État de Carabobo. Jets de pierres, bousculades, cris, pleurs et évanouissements : mercredi soir, des heurts ont opposés des proches des détenus à la recherche de nouvelles et les forces de l'ordre à proximité du bâtiment. Jusqu'ici, aucune liste avec le nom des victimes n'avait été fournie par les autorités.

L'ONU demande une enquête. Les Nations unies se sont dites jeudi "consternées" et ont demandé à Caracas à mener une enquête "efficace" pour déterminer la cause du drame. "Les États sont garants de la vie et de l'intégrité physique des personnes privées de liberté", a souligné le bureau du Haut-Commissaire aux droits de l'homme.

Un lourd bilan humain. La veille, après plusieurs heures d'incertitude, le procureur général Tarek William Saab avait confirmé tard dans la nuit de mercredi à jeudi le nombre de victimes. "Face aux terribles événements survenus dans le commissariat principal de l'État de Carabobo, où un incendie présumé a fait 68 morts, nous avons désigné quatre procureurs (...) pour éclaircir ce qui s'est passé", a déclaré Tarek William Saab, sur son compte Twitter. Le procureur général a promis une enquête rapide pour "établir les responsabilités" dans ce drame.

Une émeute déclenchée après un feu. Tarek William Saab n'a pas précisé les circonstances de la tragédie, mais l'ONG "Une fenêtre vers la liberté", qui défend les droits des prisonniers, assure que l'incendie a été provoqué par un groupe de détenus qui cherchait à s'évader. "Les détenus ont tenté de kidnapper deux policiers. Voyant qu'ils n'y arrivaient pas, ils ont déclenché une émeute et ont décidé d'incendier des matelas en pensant qu'on leur ouvrirait alors les portes. Mais les grilles sont restées fermées", a déclaré jeudi le directeur de cette ONG, Carlos Nieto.

Les pompiers ont dû ouvrir un trou à l'arrière de l'édifice pour que les prisonniers puissent sortir. "Certains sont morts brûlés et d'autres par asphyxie", a ajouté Carlos Nieto, selon qui quelque 200 détenus se trouvaient dans le bâtiment.

Des prisons surpeuplées. La surpopulation dans les prisons du Venezuela oblige les forces de l'ordre à utiliser les commissariats comme lieux de détention de longue durée. Or, selon la loi, la détention ne doit pas excéder 48 heures dans ces locaux. Le surpeuplement représente 400% de la capacité d'accueil au Venezuela.

 

Un pays en difficultés. Le Venezuela est en plein marasme économique et social en grande partie dû à la chute des cours du pétrole, dont il tire 96% de ses revenus. Outre la pénurie généralisée, cela se traduit par une hyperinflation attendue à 13.000% en 2018 par le FMI. Au moins 388 personnes sont mortes depuis 2011 dans les prisons vénézuéliennes, selon les chiffres officiels et ceux des ONG de défense des droits de l'homme.