Ukraine : le spectre de la guerre civile hante le pays

Une femme apprend à démonter une Kalachnikov dans l'Est
Une femme apprend à démonter une Kalachnikov dans l'Est © Reuters
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et Gwendoline Debono , modifié à
INQUIÉTUDE - Le scénario est désormais évoqué à mots ouverts par les dirigeants internationaux. Les combats plongent l’est de l’Ukraine dans le chaos.

LE POINT DE NON-RETOUR. Kiev l’a entonné comme une victoire. Le ministère ukrainien de l’Intérieur a annoncé mardi avoir tué 30 insurgés pro-russes lors des derniers jours. Depuis un peu plus d’une semaine, avec l’assaut de l’armée, les affrontements se sont intensifiés dans l’est de l’Ukraine. Parmi les victimes de ces violences, on compte aussi des civils.

A Odessa, vendredi, un incendie a fait au moins 40 morts dans la maison des syndicats. Les pro-ukrainiens radicaux sont soupçonnés d’être derrière ce feu, dont les autorités estiment qu’il est d’origine criminelle. Les habitants comptent aussi leurs morts plus à l’Est, dans le Donbass. Dans cette région, où pro-Ukrainiens et pro-Russes vivaient ensemble en paix jusqu’à il y a peu, l’attirance vers Moscou est moins unanime qu’en Crimée.

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Les "terroristes", les éléments pro-russes les plus violents, "font tout pour nous obliger à utiliser des armes lourdes, mais nous ne le ferons pas pour épargner la population civile", a déclaré Stepan Poltorak, le chef ukrainien de la Garde nationale, sur place. Pour autant, Kiev tente de légitimer les morts civils et affirme que les rebelles se servent de la population comme "bouclier".

Ukraine mort Odessa

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La guerre civile s’installe dans les villes. A Slaviansk, l’angoisse des combats a fait germer la colère chez Ioulia, pour qui la division entre pro-ukrainiens et pro-russes est actée. "Il y en a marre des gens de Kiev, qui tirent sur les gens", s’énerve-t-elle au micro d’Europe 1. "Ah, elle est belle, la place Maïdan, ironise-t-elle. On a cru qu’on était une seule Ukraine, mais c’est faux. Je ne sais pas comment on en est arrivé là, mais ils me haïssent, et je les hais", tranche l’habitante de Slaviansk, une ville qui a pris des airs de forteresse assiégée.

Depuis quelques jours, les magasins ont en effet tiré leur rideau. La principale banque du pays, la Privatbank, a décidé de fermer ses succursales à Donetsk et Lougansk, craignant pour la vie de ses transporteurs de fonds. Selon le ministère russe des Affaires étrangères, "on constate une pénurie de médicaments, des interruptions de livraisons de denrées alimentaires" dans la région qui se désorganise toujours un peu plus.

La présidentielle ukrainienne, l’instant clé. Le déroulé des événements risque fort de "provoquer le chaos", pour "préparer le terrain pour un mouvement séparatiste", a estimé le général Philip Breedlove, commandant des forces de l’Otan en Europe, précisant que selon lui, les forces russes n’envahiront pas l’Ukraine.

Tout semble donc tenir à la tenue du scrutin présidentielle. Le 25 mai, l’Ukraine pourrait se pacifier ou basculer dans le conflit interne. François Hollande a également évoqué un "risque de guerre civile" si la présidentielle n’avait pas lieu. Il faut "permettre que le président qui sortira vainqueur de ce scrutin puisse être légitime aux yeux de tous", a précisé le chef de l’Etat français. Un habitant de Slaviansk confie son seul espoir à Europe 1 : "Que le destin de notre région soit le même qu’en Crimée, avec la Russie. La Russie est proche de nous. Ma sœur habite en Russie. Alors que l’Ukraine, elle, nous attaque."

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