Syrie : une population prise en otage

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avec agences
Un journaliste, qui s’est fait passer pour un touriste, raconte la répression sanglante de la rébellion.

Que saurons-nous de cette nouvelle journée de manifestation vendredi ? La Syrie, où les mouvements de contestation se multiplient depuis quatre mois, est l’un des pays plus fermé à la presse. Bien que le régime soit soumis à des pressions internationales accrues, la répression sanglante du mouvement de révolte se poursuit.

 

Les tribus désignent, l’armée menace

 

Vendredi, de nouvelles manifestations sont prévues un peu partout dans le pays ainsi que la désignation des leaders de la contestation au sein de plusieurs tribus. Mais les autorités ont déjà menacé de représailles. Une mise en garde à prendre au sérieux car les précédentes interventions de l’armée ont déjà fait de nombreux morts.Dernier exemple en date, l’intervention dans la ville de Jisr al-Choughour, dans le nord-ouest. L'armée syrienne a lancé vendredi matin une opération dans le secteur, théâtre de violences depuis plusieurs jours, a annoncé la télévision syrienne. "Des unités de l'armée ont commencé leur mission pour contrôler les villages voisins de la ville Jisr al-Choughour et arrêter les groupes armés", a annoncé la télévision, précisant que l'opération était menée "à l'appel des habitants".

La plupart des quelque 50.000 habitants de cette localité située dans le gouvernorat d'Idleb (300 km au nord de Damas) ont cependant fui la ville cette semaine, qui était "déserte" mercredi, de crainte d'une opération militaire de grande envergure, selon des militants. Ces derniers jours, les violences ont secoué la localité, où l'armée mène des opérations de ratissage depuis samedi. Plus de 2.500 Syriens ont même fui vers la Turquie voisine. certains d'entre eux ont parlé d'agissements brutaux des forces de sécurité contre les habitants sans arme.

 

Des civils qui espionnent et dénoncent

 

C’est également ce qu’à constaté Christian Clanet. Le journaliste dont le témoignage est à lire en intégralité dans le journal Le Monde daté de vendredi, raconte, au micro d’Europe 1 ce qu’il a vu à Deraa dans le sud du pays. Pour pouvoir entrer en Syrie, le journaliste s’est fait passer pour un touriste. "J’ai vu une ville assiégée, entourée de blindés, d’armes lourdes", décrit Christian Clanet. "Les habitants sont surveillés. Ils ont besoin d’un permis pour sortir de la ville", poursuit-il.

"Et puis il y a la face invisible, c’est-à-dire la milice en civil qui espionne", ajoute-t-il, comparant certains quartiers de la ville, quasiment "mis sous scellé", à des "camps de concentration". "En ville, personne ne peut rentrer, personne ne peut sortir. Il y a 15.000 habitants qui sont otages", explique Christian Clanet.

 

Bachar al-Assad persiste et écrase

 

Malgré les protestations, le dépôt au Conseil de sécurité de l'ONU d'un projet de résolution européen condamnant la répression, l'exode des habitants et le nombre élevé de victimes, le régime du président Bachar al-Assad persiste dans sa volonté d'écraser toute contestation.

Selon un militant des droits de l'Homme, au moins 60 camions transportant des chars et des blindés ainsi que plus de 10 véhicules de transport de troupes sont partis mercredi soir d'Alep en direction de Jisr al-Choughour, dans la région d'Idleb, à 300 km au nord de Damas. Un manifestant a été tué et six blessés sur la route principale Alep-Idleb alors qu'ils jetaient des pierres sur le convoi, a-t-il ajouté.