Syrie : intervenir, c'est possible ?

Le ministre des Affaires étrangères Alain Juppé réunit jeudi des chefs de la diplomatie pour aborder la problématique de la Syrie et ainsi envoyer un message de fermeté au régime de Bachar al-Assad.
Le ministre des Affaires étrangères Alain Juppé réunit jeudi des chefs de la diplomatie pour aborder la problématique de la Syrie et ainsi envoyer un message de fermeté au régime de Bachar al-Assad. © Reuters
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MS avec AFP et Reuters , modifié à
DECRYPTAGE  - Paris réunit jeudi des chefs de la diplomatie de pays "amis" de la Syrie.

Plus d'un an après le début de la révolution syrienne, la situation reste chaotique dans le pays. Après 13 mois de répression et de violences menées par le régime de Bachar al-Assad, l'Observatoire syrien des droits de l'homme fait état de plus de 11.100 morts. Les forces loyalistes et l'armée syrienne libre s'affrontent toujours, malgré le cessez-le-feu imposé par les Nations Unies. Damas s'est engagé à appliquer la trêve et à collaborer avec les observateurs, dans le pays depuis dimanche. Le secrétaire général de l'ONU, Ban Ki-moon a préconisé jeudi l'envoi d'une "mission élargie" de 300 observateurs "pour une période initiale de trois mois". La crise est donc toujours loin d'être réglée. Europe1.fr fait le point.

Pourquoi les violences se poursuivent ? Six jours après son instauration en Syrie, le cessez-le-feu ne cesse d'être violé. Les rebelles assurent que l'armée n'a pas retiré ses chars des villes, a repris ses bombardements sur Homs et opéré de nouvelles arrestations, en violation du plan Annan. Les violences ont en effet repris depuis l'arrivée des observateurs de l'Onu, envoyés dimanche soir dans le pays pour veiller au respect du cessez-le feu. L'Observatoire syrien des droits de l'Homme (OSDH) a recensé 14 morts, dont sept civils mercredi.

Pourquoi les Occidentaux n'agissent pas ? Malgré la répression sanglante que continue de mener le régime de Bachar al-Assad, aucune action internationale n'est entreprise. D'abord, parce que la Syrie reçoit le soutien de la Chine et de la Russie, qui ont déjà opposé à plusieurs reprises leur veto au Conseil de sécurité des Nations unies pour toute intervention. Ensuite, une offensive est délicate à opérer dans le pays, notamment en raison de la densité de la population. Enfin, l'avenir du pays, dans le cas où le président syrien tomberait, est incertain.

La Chine et la Russie peuvent-elles bloquer toute action éternellement ? Les deux pays sont membres permanents du Conseil de sécurité de l'Onu et sont, par conséquent, pourvus du droit de veto tout comme la France, les Etats-Unis et le Royaume-Uni. La Russie et la Chine ont jusqu'ici bloqué l'adoption de résolutions contraignantes contre la Syrie.  

La Russie est le principal soutien de la Syrie et risque de ne pas changer sa position. Le pays impose systématiquement son veto à toute résolution qui pourrait affaiblir son allié. Et cela ne devrait pas changer tant que l'opposition syrienne ne sera pas militairement écrasée. Le ministre russe des Affaires étrangères, Sergueï Lavrov, a toutefois reconnu que le cessez-le-feu était "fragile". Mais Moscou a dénoncé une nouvelle fois le soutien d'Etats occidentaux et arabes à l'opposition armée.

Pourquoi ne pas tenter une offensive comme en Libye ? Elle n'est pas envisageable tant que la Russie et la Chine imposeront leur veto. Car toute intervention internationale dépend de l'accord donné par les Nations unies à l'Otan.

Et même si l'opinion des alliés de la Syrie évoluait toutefois, une intervention aérienne comme en Libye serait impossible tant le risque de tuer des civils serait élevé vu la densité de la population.

Autre option : envoyer des troupes directement sur le terrain. Mais les armées étrangères se frotteraient alors à celle de Bachar al-Assad, considérée comme extrêmement solide. "Elle représente la deuxième puissance militaire arabe après l'Egypte", forte de 500.000 hommes, notait dans le Huffington Post le spécialiste de la solution de risque pays, Daniel Wagner.

Enfin, la troisième et dernière option militaire consisterait à envoyer des casques-bleus. Mais cela nécessite l’accord du régime syrien.

Comment réagissent les Occidentaux ? Les Etats-Unis et la France enchaînent les déclarations à l'encontre du régime de Bachar al-Assad, semble-t-il frustrés par leur non-intervention militaire. Les deux exhortent, sans cesse, le gouvernement syrien à mettre un terme aux violences et à respecter le plan Annan.

Mercredi, la Maison-Blanche s'est dite "horrifiée" par les nouvelles violences rapportées encore en Syrie. Ban Ki-moon a lui préconisé jeudi au Conseil de sécurité d'autoriser l'envoi d'une "mission élargie" de 300 observateurs du cessez-le-feu "pour une période initiale de trois mois". Dans une lettre au Conseil,  le secrétaire général de l'ONU estime qu'il y a "une chance de progrès" en Syrie bien que la cessation des hostilités soit "clairement incomplète".

La France, de son côté, s'efforce de convaincre les derniers réticents. Jeudi, le ministre des Affaires étrangères françaises Alain Juppé recevra 14 chefs de la diplomatie. Objectif ? Envoyer un message de fermeté au régime de Bachar al-Assad. La secrétaire d'Etat américaine Hillary Clinton ainsi que ses homologues turc et qatari seront notamment présents.