Espionnage : quelles informations ont obtenu les Etats-Unis en écoutant les présidents français ?

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NSA - Wikileaks, Libération et Mediapart révèlent que la NSA a écouté les communications des présidents français et de plusieurs membres de gouvernement entre 2006 à 2012. Sur quels sujets portaient ces conversations ?

Un nouveau scandale pour la NSA. L'agence de renseignement américaine, déjà plongée dans la tourmente par les révélations de son ancien employé Edward Snowden, a une nouvelle fois été épinglée pour ses pratiques illégales mardi par Wikileaks. Son fondateur, Julian Assange, a signé avec des journalistes français deux articles parus dans Libération et sur Mediapart. Qu'apprend-on à la lecture de ces textes ? Tout simplement que "l'agence aux grandes oreilles" a écouté les communications des trois derniers présidents français ainsi que celles de nombreux ministres et diplomates entre 2006 et mai 2012 au moins.

5 câbles top-secrets : que contiennent-ils ? Si Edwy Plenel, directeur de Mediapart, et Johan Hufnagel, son homologue de Libération, ont assuré mercredi matin sur Europe 1 que ces écoutes n'avaient pas permis aux Etats-Unis d'éventer un secret d'Etat français, sur quels sujets portaient ces communications écoutées par la NSA ? Europe1.fr revient sur le contenu des cinq câbles de la NSA que Wikileaks a pu se procurer.

  • Qui a été écouté ?

L'opération "Espionnage Elysée" - c'est le nom qu'a donné la NSA à ces écoutes des communications des hauts dirigeants de l'Etat français - a donc visé au moins trois présidents français. Il s'agit de Jacques Chirac (de 2006 à 2007), Nicolas Sarkozy (de 2007 à 2012) et, dans une moindre mesure si la Maison Blanche dit vrai lorsqu'elle affirme "ne plus cibler ses communications", François Hollande, puisque la dernière écoute mentionnée date du 18 mai 2012, soit trois jours après la prise de fonction de l'actuel chef de l'Etat.

Élément important à préciser, ces écoutes ont porté sur les portables personnels des trois présidents et non sur les téléphones cryptés mis à leur disposition. Elles n'ont donc pas permis aux Etats-Unis d'accéder à des secrets d'Etat, comme le précise Libé dans son article. Au-delà des derniers locataires de l'Elysée, les Etats-Unis ont également placé sur écoute plusieurs membres des gouvernements alors en place, mais aussi des diplomates.

Parmi eux, l'ancien ministre de l'Economie Pierre Moscovici, l'ancien ambassadeur français à Washington Pierre Vimont, le conseiller diplomatique de Nicolas Sarkozy Jean-David Levitte, Claude Guéant, alors secrétaire général de l'Elysée, et l'actuel titulaire de la fonction Jean-Pierre Jouyet ou encore Pierre Lellouche, secrétaire d'Etat au commerce extérieur entre 2010 et 2012.

  • Que contiennent ces écoutes ?

De ce qui a été résumé dans les câbles que s'est procuré Wikileaks, la NSA a surpris des conversations de Jacques Chirac en 2006 où l'ancien président cherche à pousser son favori pour le poste de sous-secrétaire général des Nations-Unies. L'agence conclut d'ailleurs sa note par un commentaire sur le ministre des Affaires Etrangères de l'époque, Philippe Douste-Blazy, qui aurait "une propension à faire des affirmations inexactes ou inopportunes". 

Deux ans plus tard, c'est au tour de Nicolas Sarkozy de passer au crible de la NSA. Alors que la crise financière bat son plein, on peut lire sur le câble que le président français "se voit comme le seul homme capable de résoudre la crise financière" et qu'il se plaint "du recul de Washington sur sa proposition d'accord de coopération sur le renseignement" qu'il interprétait comme un "souhait des Etats-Unis de continuer à espionner la France". 

François Hollande lui aussi a eu droit à son mémo. Il porte sur sa prise de rendez-vous secret avec le chef de l'opposition allemande Sigmar Garbiel, que le chef de l'Etat voulait rencontrer sans prévenir la chancelière Angela Merkel, ainsi que sur des réunions confidentielles pour discuter d'une sortie de la Grèce de la zone euro. Des informations confidentielles mais pas vitales, qui en disent long néanmoins sur l'obsession américaine du renseignement.