Soupçons d'ingérence russe : l'étau se resserre autour de Donald Trump

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M.R. avec AFP , modifié à
Les premières mises en examen sont tombées lundi dans l'affaire des soupçons d'ingérence russe dans la campagne américaine de 2016.

De premières inculpations ont eu lieu lundi dans l'affaire des ingérences russes présumées dans la dernière élection présidentielle américaine, notamment celle de l'ancien directeur de campagne de Donald Trump, poursuivi entre autres pour "complot contre les États-Unis".

Cette "affaire russe" se décline désormais en deux dossiers : d'une part, une enquête sur l'ingérence de Moscou dans l'élection de 2016 qui ne fait plus guère de doute en Amérique, alors qu'elle est catégoriquement démentie par la Russie. D'autre part, l'enquête désormais menée par le procureur spécial Robert Mueller sur une possible collusion entre l'équipe de campagne du président Trump et les Russes, qui reste elle très incertaine. Retour sur la chronologie des événements d'une "affaire russe" qui met en danger la présidence Trump. 

Une affaire de piratage mise au jour

Les agences américaines du renseignement accusent en octobre 2016, soit un mois avant le scrutin, la Russie d'avoir piraté et diffusé pendant la présidentielle des e-mails de proches conseillers de la démocrate Hillary Clinton dans le but de la discréditer.

Au crépuscule de son mandat, Barack Obama annonce le 29 décembre des sanctions contre Moscou et l'expulsion de 35 agents russes. Le 6 janvier, les agences de renseignement publient un rapport affirmant que le président russe Vladimir Poutine se trouvait derrière cette interférence présumée.

FBI, NSA et commissions sénatoriales entament des enquêtes

En mars 2017, la police fédérale (FBI) confirme avoir ouvert une enquête sur une possible "coordination" entre des membres de l'équipe Trump et le gouvernement russe. Le ministère de la Justice et les agences américaines de renseignement lancent eux aussi des enquêtes. Parallèlement, deux commissions du Sénat et une de la Chambre des représentants entament elles aussi des investigations.

Des démissions en cascade

Les enquêtes convergent rapidement vers l'entourage de Donald Trump. Moins d'un mois après l'entrée du président à la Maison-Blanche en janvier 2017, son conseiller à la sécurité nationale, Michael Flynn, est forcé à la démission le 13 février.

Il a menti au vice-président Mike Pence sur ses discussions avec l'ambassadeur russe aux États-Unis, Sergueï Kisliak. Il l'aurait assuré du soutien futur de Donald Trump alors que Barack Obama venait de prononcer des sanctions à l'égard de Moscou.

Paul Manafort (photo ci-dessous), aujourd'hui inculpé, avait lui aussi démissionné avant l'élection. Le lobbyiste et homme d'affaires qui a longtemps conseillé l'ex-président ukrainien Viktor Ianoukovitch s'est retiré après que les autorités ukrainiennes eurent révélé qu'il avait reçu un paiement de 12,7 millions de dollars (11 millions d'euros) du dirigeant pro-russe.

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© AFP

Le directeur du FBI limogé

Si certains quittent leur poste de leur proche chef, ce n'et pas le cas du directeur du FBI, James Comey. Alors qu'il supervisait une enquête sur les contacts entre les membres de l'équipe du républicain et le gouvernement russe, il est brutalement limogé le 9 mai par Donald Trump, agacé de la direction que prenait l'investigation du premier policier des États-Unis.

James Comey, ancien patron du FBI crédit : NICHOLAS KAMM / AFP - 1280

© NICHOLAS KAMM / AFP

Lors d'une audition extraordinaire au Sénat, James Comey (photo ci-dessous) révèle quelques semaines plus tard les pressions venues de la Maison-Blanche, le fait que le président ait exigé sa "loyauté", et qu'il lui ait demandé d'abandonner un volet de l'enquête portant sur le général Michael Flynn. James Comey admet également avoir fait fuiter à la presse en mai des notes dans lesquelles il avait consigné certains rendez-vous en tête-à-tête avec Donald Trump.

Un procureur spécial reprend l'enquête

Dès le 17 mai, Robert Mueller, qui fut lui aussi directeur du FBI, est nommé procureur spécial pour reprendre l'enquête, avec des pouvoirs élargis et une indépendance renforcée. Il est nommé par le n°2 du ministère de la Justice, Rod Rosenstein, le ministre Jeff Sessions s'étant lui-même récusé dans cette affaire pour avoir omis de révéler des rencontres avec l'ambassadeur russe aux États-Unis, Sergeï Kisliak. Rod Rosenstein justifie la désignation d'un procureur spécial, par définition plus indépendant du pouvoir politique, par "des circonstances particulières" et "l'intérêt public".

Les géants du web mis en cause

Le Sénat américain et la Chambre des représentants, où se poursuivent les enquêtes parlementaires, demandent aux géants Google, Facebook et Twitter de témoigner à partir du 31 octobre pour déterminer s'ils ont pu être utilisés pour influencer l'élection.

Facebook et Twitter ont reconnu que des comptes liés à des intérêts russes avaient publié des contenus sponsorisés ayant servi à diffuser de fausses informations et à manipuler l'opinion publique. Ces tentatives ont été beaucoup plus vastes qu'initialement estimé, ont indiqué lundi soir plusieurs sources.

Le temps des inculpations

Robert Mueller a mis en accusation lundi trois membres de l'équipe de campagne de Donald Trump. L'ex-directeur de campagne Paul Manafort et son associé Richard Gates font l'objet de douze chefs d'inculpation, parmi lesquels "complot contre les États-Unis", blanchiment, fausses déclarations et non déclarations de comptes détenus à l'étranger.

Par ailleurs, George Papadopoulos, conseiller aux affaires étrangères, a plaidé coupable d'avoir menti aux enquêteurs du FBI. Il était chargé des questions de politique étrangère au sein de l'équipe, et a par ses fausses déclarations "entravé l'enquête (…) sur l'existence de liens ou de coordination éventuels entre des personnes associées à la campagne et le gouvernement russe", selon l'acte d'accusation.

Écoutez le reportage de notre correspondant aux États-Unis :