Procès Magnotta : récit d'une cavale rocambolesque

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Les auditions des témoins dans le procès de "dépeceur de Montréal" lèvent le voile sur les circonstances de sa folle cavale à travers l'Europe.

Des rues de Montréal jusqu'à un sombre café internet de Berlin, on connaissait déjà le parcours de Luka Rocco Magnotta dit le "dépeceur de Montréal", au cours de sa cavale hyper-médiatisée de l'été 2012. A l'époque, ce jeune Canadien, acteur pornographique à ses heures perdues, poste une vidéo dans laquelle il mutile le cadavre d'un étudiant chinois.

Depuis l'ouverture du procès le 29 septembre dernier, le pays a les yeux braqués sur Luka Rocco Magnotta, propulsé au panthéon des plus grands assassins de l'histoire du Canada. Devant le tribunal de Montréal, les auditions des témoins permettent de faire la lumière sur les circonstances de cette rocambolesque fuite en Europe.

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Une nuit chez un amant à Paris. Le dimanche 27 mai 2012, Luka Rocco Magnotta débarque à Paris dans l'après-midi. Il se rend à Clichy, chez un certain Jean-Christophe R., qu'il avait abordé sur un site de rencontres gay un mois auparavant. Surnommé "Chris", le chef d'entreprise de 51 ans ignore tout de la vraie identité de son invité. "Il m'avait dit qu'il voulait s'installer en France", a confié ce dernier dans un témoignage vidéo enregistré en juin dernier et montré lundi aux jurés. "Il prévoyait de chercher du travail comme aide à domicile auprès de personnes âgées ou handicapées."

Présent en visioconférence au procès, "Chris" est bousculé par l'avocat de Magnotta, Me Leclair, qui lui arrache les détails scabreux de cette nuit passée en compagnie du dépeceur de Montréal. "Dans vos échanges, vous lui aviez proposé de s'installer chez vous, l'invitant à vivre dans votre appartement comme des animaux..." lance-t-il. "C'était un délire", rétorque Jean-Christophe, dont le malaise grandit au fil des questions.

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"Vous êtes naturiste", assène l'homme de loi. "Ce soir-là, vous lui avez demandé dès son arrivée de se mettre nu." Jean-Christophe, lui, ne se rappelle plus, mais assure ne pas avoir eu de relations sexuelles avec l'accusé, qui reprend sa route dès le lendemain matin. Le 1er juin, Jean-Christophe découvre la photo de son invité d'un soir dans les journaux. Et comprend qu'il a eu affaire à un fugitif. Il contacte la police et lui transmet le numéro de téléphone du Canadien immédiatement mis sur écoute. Sans succès, puisque Luka Rocco Magnotta a jeté entretemps son portable dans une poubelle de la gare Saint-Lazare. Appareil récupéré par un employé de la propreté.  

Reconnu grâce à ses pommettes dans un café Internet à Berlin. La traque prend fin le 4 juin 2012, dans un café internet anonyme de Berlin. Un des employés du magasin reconnaît le visage du jeune homme omniprésent dans les médias à ce moment-là. "Je l’ai reconnu tout de suite à cause de ses pommettes. Il a d’étranges pommettes", a-t-il témoigné. Marc Lilge, le policier allemand qui a arrêté Magnotta, raconte que le dépeceur de Montréal ne s'est pas tout de suite démonté. Il a d'abord affirmé s'appeler Kirk Trammell, assurant qu'il était un touriste new-yorkais et qu'il venait de perdre son passeport. Mais l'officier est sceptique. Magnotta sue, tremble, et admet finalement sa véritable identité. Dernier détail, après son arrestation le Canadien n'a pas eu le temps de régler sa note de cybercafé.

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Luka Rocco Magnotta pourrait tout de même payer cher ses actes au cours de ce procès. Bien qu'il ait plaidé "non coupable" et invoque la folie pour échapper à la prison, il risque la réclusion criminelle à perpétuité.