Prisonniers à Mossoul, une Française et ses quatre enfants en appellent à Paris

La Française et ses enfants ont été découverts et capturés par l'armée irakienne à Mossoul (photo d'illustration).
La Française et ses enfants ont été découverts et capturés par l'armée irakienne à Mossoul (photo d'illustration). © BULENT KILIC / AFP
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M.L avec Sébastien Soldaïni
La famille a été arrêtée par l'armée irakienne lors de la reprise de la ville, bastion de l'EI. La mère, qui nie toute allégeance au groupe, risque la peine de mort. 

Une femme française et ses quatre enfants, âgés de six mois à six ans, sont retenus par les services de renseignement irakiens depuis une dizaine de jours. Selon leur avocat Me William Bourdon, interrogé par Europe 1, la mère de famille pourrait "faire l'objet d'une procédure en Irak" pour ses liens supposés avec l'organisation Etat islamique (EI), et risquer jusqu'à la peine de mort. 

Une famille prostrée et affamée. Selon un récit reconstitué par Le Monde, les cinq Français ont été découverts lors de l'ultime bataille de Mossoul, juste avant que les forces irakiennes ne reprennent la ville à l'EI. Le 8 juillet, peu avant le coucher du soleil, des soldats entendent des pleurs d'enfants dans une cave. À l'intérieur, ils trouvent la famille prostrée et affamée : la mère, qui pèse moins de 40 kilos, tient dans ses bras un nourrisson amorphe. Dans un arabe approximatif, elle leur explique être arrivée de France il y a deux ans, avec son mari. 

Le mari est introuvable, "parti trouver de l'eau", selon son épouse. Arrêtée par les militaires irakiens, celle-ci explique que la famille n'est pas entrée dans le pays pour servir l'EI, mais seulement pour vivre sous le régime du Califat, sans combattre. Elle affirme même aux agents du renseignement irakien que son compagnon a été écarté par les terroristes en raison de son refus de prendre les armes. Sur elle, les agents trouvent deux téléphones portables "avec de nombreux contacts", ainsi qu'une carte militaire de la bataille de Mossoul, "datée du jour de leur arrestation". 

Entendu sur europe1 :
De ce que nous savons, cette jeune femme aurait souhaité rentrer depuis très longtemps, avec ses enfants 

Une situation "difficile". Depuis, la mère et ses enfants sont détenus à Bagdad. "Si les autorités considéraient après avoir fait un certain nombre d'interrogatoires (...) qu'il n'y a pas lieu de la garder, son sort serait celui de tous ceux qui reviennent en France. Elle passerait forcément par la case de la section antiterroriste de Paris, et vraisemblablement, elle serait mise en examen", explique Me Bourdon. "Mais on n'en est pas là", souffle l'avocat, qui reconnaît "la difficulté de la situation, y compris pour les autorités françaises", qui risquent de faire face à des situations similaires à mesure que le territoire de l'EI se réduit. 

"Je ne conteste pas le fait que du côté des services français, on soit vigilant et qu'on ne boive pas comme parole d'évangile tout ce qui sort de la bouche des Français qui rentrent ou qui ont envie de rentrer. Mais chacun sait qu'il y a là-bas une communauté très hétérogène, c'est-à-dire qu'il y a des jeunes femmes, des jeunes gens qui y ont été sur un coup de tête, manipulés, pour suivre leur compagnon ou leur compagne, sans aucune espèce d'adhésion ni au terrorisme ni au Califat, et qui assez vite ont désenchanté, ont manifesté leur réprobation, au risque de recevoir des menaces", poursuit le conseil. "De ce que nous savons, cette jeune femme aurait souhaité rentrer depuis très longtemps avec ses enfants."

"L'urgent pour nous, c'est le sort des quatre gamins, qui sont, on le rappelle, en très bas âge", martèle l'avocat. "De ce que nous savons, ils sont très bien traités", affirme-t-il, précisant que les mineurs, dont le plus jeune est né en Irak, sont "soignés et nourris" et connaissent "un début de retour vers la vie". "Ce qui nous semble le bon sens, c'est que ces quatre enfants et leur mère reviennent vers la France, parce qu'il est normal que cette jeune femme s'explique devant un juge, et un juge français paraît plus approprié qu'un juge irakien. Tout cela peut se résoudre d'un coup de téléphone strictement politique entre Paris et Bagdad."