A Jérusalem et Tel Aviv, la peur au ventre au quotidien

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Kristell Bernaud, correspondante, Gwendoline Debono, envoyée spéciale, et , modifié à
REPORTAGE - Dans la ville sainte, prendre le tramway signifie avoir la peur au ventre pour beaucoup d'Israéliens.

Des gestes quotidiens sur fond d'angoisse, en Israël. Depuis quelques semaines, la psychose gagne doucement l'Etat hébreu, où ont eu lieu plusieurs attaques contre des citoyens israéliens. L’angoisse se voit et se vit quand on prend par exemple les transports en commun à Jérusalem et Tel Aviv.

Dans la ville sainte, deux attaques à la voiture-bélier ont visé le tramway, avant l’agression qui a coûté la vie à une Israélienne à un arrêt de bus, lundi. A Tel Aviv, un soldat de 20 ans a été poignardé à mort près de la gare de Ha-Haganah le même jour.

Le tram se vide dans la ville sainte. A Jérusalem, des habitués du tram, comme Nathalie, constatent que les rames se vident au fil des semaines. Sur le chemin de son travail, l'agent artistique nous raconte que sa "fille, qui a voyagé une fois dans ce tramway, a été assez effrayée. Depuis, elle l'évite au maximum et préfère prendre le bus".

Elle juge que "quelque chose s'est brisé", même si elle ne l'a "pas vu tout de suite, mais une crainte s'est réinstallée", dans la ville coupée en deux entre juifs et Arabes. Mais Nathalie, elle, n'a pas le choix et continue à utiliser ce moyen de transport.

Tel Aviv l'insouciante n'est plus. A 50 kilomètres de là, les usagers de la gare de Ha-Haganah ralentissent le pas, puis s’arrêtent sur le visage du militaire tué la veille, en une des journaux distribués de la main à la main. Au lendemain de sa mort, quelques bougies brûlent encore là où le militaire s’est écroulé.

>> Ecoutez le reportage de l'envoyée spéciale d'Europe 1 à Tel Aviv :

Tel Aviv, la peur au ventrepar Europe1fr

Les traces de sang séché fissurent l’insouciance de la bulle, comme les habitants de Tel Aviv surnomment leur ville, généralement épargnée par les attaques. Omer, un Israélien, nous dit être franchement inquiet de cette nouvelle forme d’attaque : "Avant, c’était les bombes dans les bus et les voitures. Maintenant, ce sont des attaques de civils. Alors vous avez peur de tout le monde", témoigne celui qui n’a pas connu la première Intifada. Schlomo, lui, a connu ce premier soulèvement des Palestiniens, fin 1987. La situation actuelle l’angoisse tout autant car la menace vient de partout, selon lui : "Tu es débout ici, tu travailles et tu dois regarder de tous les côtés, devant, derrière, …" Les agresseurs palestiniens ont chois de nouveaux modes d’attaque contre des Israéliens : "Avec une voiture pour essayer de t’écraser ou avec un couteau. Tu ne peux rien faire", commente Schlomo.

Pour l’Israélien, "les roquettes, c’est autre chose", dit-il en référence à la dernière guerre contre Gaza, l’été dernier. Le "Dôme de fer", le bouclier anti-missiles israélien, pouvait le protéger des attaques, "l’armée peut répliquer".

La police ne rassure pas. Pour éviter de nouvelles attaques et rassurer la population, des policiers et des agents de sécurité sont postés sur chaque quai du tramway. Mais leur présence n'apaise pas Elie Rosenfeld, un habitant d'un quartier juif de Jérusalem-Est, la partie arabe de la ville. Il dit avoir "peur de laisser [ses] enfants seuls, peur de se promener par ici". Cet Israélien trouve qu'il "y a une réelle dégradation de la situation sécuritaire" et croit "que c'est la troisième Intifada, même si certains pensent que non".

Le tramway qui traverse Jérusalem se vide avant d'entrer dans le quartier arabe. La police, elle, reste sur les dents. Plus de 1.300 officiers étaient déployés à Jérusalem-Est vendredi dernier, jour de prière musulmane.

>> Le regard de Xavier Yvon sur la situation au Proche-Orient

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