Malgré des pressions mafieuses, une équipe de foot féminin tient bon

Maria Soto, du Sporting Locri.
Maria Soto, du Sporting Locri. © TIZIANA FABI / AFP
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G.S. avec AFP
En Calabre, dans le sud de l'Italie, un président de club féminin de football a reçu des menaces de mort, le poussant à démissionner. 

Une équipe de l'élite italienne du football en salle féminin a repris, dimanche, la compétition en Calabre, dans le sud du pays. Et ce malgré des menaces de type mafieux dans ce fief de la 'Ndrangheta, qui ont valu à ces joueuses un soutien massif à travers le pays. Le Sporting Locri, qui évolue dans la plus haute division de cette discipline à cinq joueuses, s'est incliné 3 à 2 devant la Lazio, équipe invaincue cette saison, lors d'un match passionné retransmis en direct à la télévision publique, en présence du président de la fédération italienne de football, Carlo Tavecchio.

Des menaces de mort. Pour le club, c'est une victoire morale, tant il semblait au bord du gouffre juste avant Noël, quand son président Ferdinando Armeni a démissionné après avoir reçu des messages anonymes menaçant le club mais aussi sa fille de trois ans. "S'en prendre aux enfants signifie qu'on ne respecte pas les règles. Et je ne sais pas contre qui je joue", a déploré Ferdinando Armeni auprès de l'AFP. "C'était peut-être un boss important, ou alors un tout petit criminel, mais dans tous les cas, une menace est une menace". Ferdinando  Armeni a cependant démenti des informations de presse selon lesquelles les finances du club, grevées par le transfert de joueuses venues d'Espagne, auraient été la véritable raison de sa démission.

"L'équipe ne doit pas mettre la clé sous la porte". Le maire de Locri, Giovanni Calabrese, a finalement repris l'intérim à la tête du club, et dimanche les joueuses sont entrées sur le terrain pour l'échauffement en scandant "Nous jouerons", devant un public enthousiaste. Dans cette région où règnent le chômage - 23,4%, le taux plus élevé du pays - et la 'Ndrangheta, considérée comme l'organisation mafieuse la plus puissante d'Europe, une enquête a été ouverte pour tenter de déterminer l'origine des menaces. "L'équipe ne doit absolument pas mettre la clé sous la porte", a déclaré Nicola Gratteri, procureur anti-mafia qui vit depuis 26 ans sous protection policière, après de nombreuses menaces et plusieurs tentatives d'assassinat. Elle est "une source de fierté pour cette région", a-t-il insisté, tout en plaidant pour un soutien psychologique à ces joueuses soumises à un stress intense.

Qui est derrière ces menaces ? La mafia s'intéresse depuis longtemps au football, où elle recycle beaucoup d'argent sale et engrange de confortables bénéfices grâce à des matches truqués, surtout dans les divisions inférieures. Mais pour Giovanni Gratteri, il est improbable que la 'Ndrangheta elle-même soit derrière les menaces contre le Sporting Locri. L'organisation "est présente là où il y a de l'argent à se faire et du pouvoir à gagner", alors que dans le football féminin, "il n'y a ni argent, ni pouvoir", souligne-t-il.