Libye : quand la France tance l’Otan

Alain Juppé et Gérard Longuet se montrent sceptiques sur le rôle de l'Otan en Libye.
Alain Juppé et Gérard Longuet se montrent sceptiques sur le rôle de l'Otan en Libye. © REUTERS
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C.V. avec agences , modifié à
Alain Juppé et Gérard Longuet exigent de l’Alliance plus de soutien dans l’intervention en cours.

Le rôle joué par l’Otan en Libye laisse la France insatisfaite. "Il faut d’abord que l’Otan joue pleinement son rôle", a demandé mardi matin Alain Juppé sur France Info. "L’Otan a voulu prendre la direction militaire des opérations, nous l’avons accepté, elle doit jouer son rôle aujourd’hui, c’est-à-dire éviter que Kadhafi n’utilise des armes lourdes pour bombarder des populations", a prévenu le ministre des Affaires étrangères, alors que la France s’était déjà montrée réticente pour confier à l'Alliance atlantique les rênes de l'opération militaire engagée le 19 mars.

Alain Juppé a estimé aussi qu’il fallait "faire un effort majeur et accentuer l’aide humanitaire", notamment à Misrata, l’enclave rebelle assiégée par les forces pro-Kadhafi. "Et l’Union européenne, qui n’a pas voulu s’engager dans la partie militaire de l’opération doit donner la priorité absolue à cette aide humanitaire", a encore insisté le locataire du Quai d’Orsay.

"L’oral de rattrapage"

Le ministre de la Défense, Gérard Longuet, s’est lui aussi montré critique sur cette question. "L'Otan n'a pas la possibilité à cet instant d'obliger les partenaires à participer à cette action", a souligné le ministre lors de la séance de questions au gouvernement à l'Assemblée nationale. "Je déplore par exemple que la France et l'Angleterre supportent l'essentiel de cet effort, même si les Etats-Unis continuent d'apporter un soutien d'environnement aérien indispensable, mais qui n'est plus aujourd'hui un soutien de l'attaque au sol". Et d’estimer que sans frappes, "il n’y a pas la possibilité de desserrer l'étau qui pèse sur des villes assiégées comme Misrata ou Zintan".

Gérard Longuet s'est néanmoins réjoui que "celles des grandes nations européennes qui ne nous ont pas rejoint au début de la coalition sont en train de mesurer combien il serait nécessaire de rattraper leur retard". Une référence à l'Allemagne, qui, a-t-il expliqué, "participera résolument à l'initiative humanitaire annoncée par l'Union européenne, qui est au fond l'oral de rattrapage".

L'Otan réplique

C'est la première fois que Paris critique ainsi l'alliance depuis que cette dernière a pris le commandement des opérations en Libye. Et la France n’est pas la seule à avoir adopter cette posture. Le chef de la diplomatie britannique William Hague a plaidé pour "maintenir et intensifier nos efforts au sein de l'Otan", en marge d'une réunion avec ses homologues européens à Luxembourg. Il a rappelé que le Royaume-Uni avait fourni quatre Tornado supplémentaires "capables de frapper des cibles au sol menaçant la population civile libyenne". Il "serait bienvenu que d'autres pays fassent de même", a-t-il déclaré.

La réponse de l'Otan n'a pas tardé. "Avec les moyens dont nous disposons, nous faisons un bon travail", a assuré le général Mark van Uhm, chef des opérations conjointes de l'Alliance, précisant que l'Otan avait maintenu "ses opérations à un rythme élevé" ces jours derniers.