Les réfugiés climatiques se multiplient

Un jeune garçon Rohingya, une population vivant dans le sud ouest de la Birmanie, fait la queue avec sa famille pour obtenir de la nourriture après le passage du cyclone Mahasen en 2013.
Un jeune garçon Rohingya, une population vivant dans le sud ouest de la Birmanie, fait la queue avec sa famille pour obtenir de la nourriture après le passage du cyclone Mahasen en 2013. © Reuters
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Charles Carrasco , modifié à
PORTRAITS - Bangladesh, Sénégal Etats-Unis : ils voient leur vie bouleversée par le climat.

Le chiffre. En dehors des guerres, les changements climatiques sont le fléau du 21e siècle. Rien qu'en 2012, 32,4 millions de personnes dans 82 pays ont été déplacées à cause des événements climatiques et météorologiques extrêmes, d'après le rapport "Global Estimates 2010" publié le 13 mai. Un chiffre qui a doublé par rapport à 2011. Dans l'ordre, le continent asiatique a été le plus touché avec 22,2 millions de déplacés, devant l'Afrique (8,2 millions) et le continent américain (1,8 million). Au total, plus de 143 millions de personnes ont été obligés de quitter leur "chez eux" entre 2008 et 2012, soit l'équivalent de la population totale de la Russie.

>>> Qui sont ces réfugiés climatiques ? Europe1.fr a trouvé quelques exemples à travers le monde.

Les côtes du SENEGAL grignotées 

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Doun Baba Dièye, petit village du nord du Sénégal, à quelques kilomètres de Saint-Louis. Aujourd'hui, il n'en reste presque rien, raconte la télévision belge RTBF. Il a littéralement été balayé par les eaux de l'Océan Atlantique. Ses 800 habitants ont déserté. Ameth Diagne, chef du village, a été le dernier à partir. "Dans la nuit du 17 novembre 2012, quand les vagues sont entrées dans notre chambre, j'ai dû abandonner la maison", se rappelle-t-il. "Ce qui m'attriste le plus, c'est que je ne pourrai pas transmettre à mes plus jeunes enfants ce que mes ancêtres m'ont appris sur la flore et la faune, qui n'existent plus maintenant". 

Un peu plus loin, Saint-Louis pourrait également être submergé par les eaux. "On estime qu'au large de nos côtes, l'océan avance d'un mètre par an. Dans cent ans, si rien n'est fait, l'Atlantique aura grignoté la ville sur 100 mètres", affirme le professeur Boubou Aldiouma Sy, chercheur en géographie à l'université de Saint-Louis. En cause, selon lui, le changement climatique, mais aussi l'ouverture d'un canal artificiel. Les conséquences dans la région sont désastreuses : disparition des poissons d'eau douce essentiels pour les pêcheurs, une salinisation des terres qui a anéanti toute activité de maraîchage et d'élevage, ainsi qu'une recrudescence du paludisme.

>>> A lire : L'INFO :Climat : 2012, année de la "lose"

Le BANGLADESH voit l'eau monter

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Le Bangladesh est l'un des pays les plus vulnérables au changement climatique. Les deux tiers de ses terres culminent à moins de 5 mètres au-dessus du niveau de la mer. L'élévation des eaux est déjà bien perceptible dans les îles au large du golfe du Bengale, comme Sagar ou Kutubdia. La maison de Rezaul Karim Chowdhury était justement située sur l'île de Kutubdia. Mais aujourd'hui plus personne n'habite dans sa maison d'enfance, raconte-t-il dans un billet de blog sur le Huffington Post. Les conditions climatiques étaient devenues invivables : mon frère a déménagé dans la ville la plus proche de Coxsbazar". Lui a déménagé dans la capitale Dhaka.

"Récemment j'ai vu l'île depuis la fenêtre d'un avion. L'ensemble du village et ses environs sont sous l'eau. C'était une île qui faisait près de  65 km3, mais maintenant elle est inférieure à 25 km3", affirme Rezaul Karim Chowdhury. Le changement climatique, la population du Bangladesh le connaît depuis longtemps. "Après un cyclone de 1991, une grande population du village de Kudiartek de Kutudbia a dû migrer et vivait dans des bancs de sable en dehors de l'aéroport Coxsbazar", explique-t-il. D'où l'apparition d'un bidonville dans la région. Les estimations futures sont particulièrement pessimistes. Selon la Banque mondiale, jusqu'à 8 millions de Bangladais pourraient devoir fuir leurs terres d'ici à 2050.

>>> A lire : ZOOM :Doha : ces îles qui prennent l’eau

Les ETATS-UNIS pas épargnés

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© Max PPP

Si les plus pauvres sont les plus exposés aux phénomènes climatiques, les grandes puissances ne sont pour autant pas épargnées. C'est le cas des habitants de Newtok, dans la région de l'Alaska. Sabrina Werner revit encore le même cauchemar lorsqu'une énorme vague s'est élevée hors de l'eau et s'est écrasée sur sa maison, la forçant à nager pour sauver sa vie et celle de son petit-fils, a-t-elle raconté au Guardian. Les populations locales, dont les 350 eskimos yupiks, sont particulièrement inquiètes. Ils pourraient être les premiers réfugiés climatiques des Etats-Unis. Ces populations qui ont vécu depuis des siècles de la chasse et de la pêche sur les rives de la mer Béring rejettent l'idée de cet exil, pourtant inévitable car leur village pourrait être totalement sous les eaux en 2017. La rivière qui longe le bord de Newtok voit son niveau monter chaque année un peu plus, inondant des maisons qui étaient en sécurité. Un récent rapport du gouvernement fédéral dresse le constat que plus de 180 autres villages indigènes de l'Alaska sont en danger à cause du changement climatique.

Mais ces populations autochtones ne sont pas les seules à être concernées. Selon un autre rapport récent, près de cinq millions d’Américains habitant dans des zones peu élevées pourraient être touchés par la montée du niveau des mers au cours des prochaines décennies. Une étude scientifique qui vient de paraître dans Nature Climate Change révèle que New York pourrait subir une hausse de 22% du nombre de morts dus à la chaleur en été lors des décennies à venir en raison du réchauffement climatique.