Le web américain menacé par la loi Sopa

Le projet de loi Sopa est dénoncé par les pionniers du web
Le projet de loi Sopa est dénoncé par les pionniers du web © Reuters
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Solène Cordier
Plusieurs sites menacent d’un blackout mercredi, alors que le Congrès examine un projet de loi considéré comme liberticide.

Le Congrès américain va-t-il signer l’acte de décès du web tel qu’on le connaît aujourd’hui ? C’est ce que craignent les opposants au projet de loi Sopa, actuellement en discussion à la Chambre des représentants. Sopa, pour Stop Online Piracy Act, est un texte qui vise à renforcer la lutte contre le piratage et les atteintes au droit d’auteur en ligne aux Etats-Unis. Il est soutenu par les lobbies de l’industrie culturelle et les ayants droit, mais critiqué par de nombreux observateurs.

Proposé par le député républicain Lamar Smith, Sopa prévoit une série de mesures contre les sites contrevenants, qui vont de l’interruption du référencement au blocage depuis les principaux fournisseurs d’accès en passant par la suspension des revenus publicitaires. Dans cette optique, proposer des contenus protégés en streaming serait alors également interdit.

Un drame pour les entreprises de la Silicon Valley, qui contestent notamment que ces sanctions puissent être appliquées par le gouvernement sans même passer devant un tribunal. Selon ces pionniers d'internet, les propositions à l'étude "donneraient au gouvernement américain le pouvoir de censurer internet en utilisant des procédures similaires à celles employées par la Chine, la Malaisie ou l'Iran".

Un blackout mercredi ?

Dans une lettre ouverte envoyée mi-décembre, les fondateurs de Twitter, Youtube, Yahoo !, eBay, FlickR et Wikipedia ont ainsi appelé les membres du Congrès à "bien réfléchir avant de modifier la régulation qui sous-tend Internet". "Nous ne voulons pas que la prochaine génération d'entrepreneurs n'ait pas les mêmes opportunités que nous avons eues", écrivaient-ils.

Certains vont même plus loin et menacent de fermer leurs pages mercredi 18 janvier, date à laquelle l’examen du texte doit reprendre, après avoir été repoussé à deux reprises. C’est le cas notamment de Jimmy Wales, fondateur de Wikipedia, qui a appelé à "une grève de la communauté". Concrètement, elle pourrait prendre la forme de bannières noires expliquant le désaccord avec le projet de loi ou d’une fermeture temporaire (uniquement pour la version anglaise du site). Le site d’agrégation de liens Reddit a pour sa part prévu de fermer pendant 12 heures.

Des conseillers du président Obama ont également fait part de leur désaccord en fin de semaine dernière. Tout en  se prononçant pour une loi contre le piratage, ils préviennent que ses conséquences doivent être étudiées. "Nous ne soutiendrons pas une loi qui conduirait à réduire la liberté d'expression, accroîtrait les risques de cybersécurité ou qui aurait pour conséquence de réduire le dynamisme d'internet", écrivent-ils dans un communiqué. Autre bémol : ils estiment que la loi Sopa ne devrait concerner que les sites américains, alors que même les sites étrangers seront sanctionnés si Sopa était adopté en l’état. Le magnat des médias Rupert Murdoch a réagi à cette prise de position sur son compte Twitter, en accusant l'administration Obama d'avoir "rejoint les patrons de la Silicon Valley qui menacent de piratage et de vol pur et simple tous les créateurs de logiciels".