Le Vatican lâche son numéro 2

© REUTERS
  • Copié
avec Amandine Janik , modifié à
Le Vatican a pris ses distances avec son secrétaire d'Etat, qui a lié homosexualité et pédophile.

Les propos du cardinal Tarcisio Bertone liant lundi pédophilie et homosexualité ne sont pas passés inaperçus. Partout dans le monde, les réactions indignées, qu’elles viennent des milieux politique, médical ou associatif, se sont multipliées pour condamner la sortie du numéro deux du Vatican, en sa qualité de secrétaire d’Etat du Saint-Siège.

A tel point que le Vatican s'est fendu mardi d'une déclaration officielle pour prendre ses distances. "Les autorités ecclésiastiques ne jugent pas de leur compétence de faire des affirmations générales de caractère spécifiquement psychologique ou médical, lesquelles relèvent naturellement des études des spécialistes et des recherches en cours sur le sujet", a déclaré le père Federico Lombardi, porte-parole du Saint-Siège.

"Amalgame inacceptable"

Le seul pays à avoir officiellement réagi est la France. "Il s'agit d'un amalgame inacceptable que nous condamnons", a ainsi déclaré le porte-parole du ministère des Affaires étrangères lors d'un point de presse électronique. "La France rappelle son engagement résolu dans la lutte contre les discriminations et les préjugés liés à l'orientation sexuelle et l'identité de genre."

Le mouvement homosexuel chrétien David et Jonathan s’est de son côté dit par la voix de sa co-présidente Elisabeth Masset "complètement révolté" par cette prise de position. "C’est un total retour en arrière", estime-t-elle :

Ecoutez Elisabeth Musset :

"Paroles violentes, inhumaines"

La réaction a également été immédiate en Italie, où la députée du Parti démocrate (gauche) Anna Paola Concia a fait part de son "indignation", demandant au cardinal de "démentir immédiatement les paroles violentes, inhumaines et gravissimes qu'il a prononcées". Les propos ont aussi choqué à droite : "on ne peut pas lier l'orientation sexuelle à la pédophilie", a ainsi estimé Alessandra Mussolini, présidente de la Commission pour l'enfance de la chambre des députés, et appartenant au parti de Silvio Berlusconi.

"La vérité est que Bertone tente maladroitement de détourner sur l'homosexualité l'attention qui s'est concentrée sur les nouveaux crimes contre des enfants qui émergent chaque jour", a analysé en Italie Aurelio Mancuso, ex-président d'Arcigay, principale association de défense des gays. Le cardinal devrait "être logique avec lui-même" et "chasser tous les homosexuels du clergé, à commencer par la Curie vaticane", a-t-il conclu.

Monde médical

Au Chili, où ont été prononcées les paroles incriminées, le sénateur démocrate-chrétien (centre-gauche) Patricio Walker a interpellé Mgr Bertone : "J'aimerais connaître les études scientifiques qu'il dit détenir parce que je ne partage pas cet avis. La pédophilie est un trouble mental de nature sexuelle qui touche aussi bien des homosexuels que des hétérosexuels", a-t-il affirmé.

Enfin, des voix se sont aussi élevées dans le monde médical, comme à la faculté de médecine de l'Université du Chili, où la psychiatre Tamara Galeguillos a évoqué son expérience d'analyse de délits sexuels à l'Institut médico-légal. "On voyait des pédophiles hétérosexuels aussi bien que des pédophiles homosexuels, cela ne semblait pas différencié."