Le difficile travail de la presse en Syrie

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François Clauss et CB , modifié à
L'envoyé spécial d'Europe 1 raconte comment il est parvenu à franchir la frontière syrienne.

Présent clandestinement en Syrie, François Clauss, l'envoyé spécial d'Europe 1, suit les rebelles dans leur bataille pour le contrôle stratégique d'Alep. Interrogé par Europe 1 mercredi soir, il a détaillé les conditions de travail périlleuses des reporters dans le pays. "Les journalistes sont des ennemis du pouvoir, comme les combattants, ce sont des cibles à abattre", a-t-il confié.

"Un spectacle assez étonnant"

Le journaliste est surtout revenu sur les méthodes employées par les journalistes pour passer la frontière. Depuis le début de la révolution il y a 17 mois, les autorités syriennes interdisent aux journalistes l'accès au territoire. Ces derniers doivent donc faire appel à des passeurs pour entrer en Syrie.

"Ce réseau de passeurs travaille des deux cotés de la frontière. Il y a, du coté turc, une sorte de petite mafia qui se développe pour passer clandestinement les frontières, attirée par l'argent qui se déploie dans cette région. Et, de l'autre coté, ce sont des combattants de l'armée syrienne libre qui contrôlent cette frontière et sont en contact avec des passeurs turcs", précise François Clauss.

Il y a des dizaines de silhouettes qui passent dans la nuit :

Les passages se font généralement de nuit, à pied, pour éviter d'être repéré par les forces de l'armée syrienne. "Il faut faire attention à l'armée turque qui contrôle cette frontière et aux éventuelles incursions de soldats de l'armée syrienne. On passe donc de nuit, c'est un spectacle assez étonnant à 3 heures du matin, avec la pleine lune sous un ciel étoilé. On ne dit pas un mot, on marche dans le silence sur ces petits chemins. Il y a des dizaines de silhouettes qui passent dans la nuit, car ce chemin est celui qu'emprunte également l'armée libre pour faire passer de l'argent, des armes, des blessés qui n'ont pas pu être soignés à Alep", raconte le journaliste.

"Cette bataille est féroce"

Une fois sur place, il s'agit ensuite d'établir des contacts avec les acteurs de la révolution syrienne. "La grande priorité est d'avoir une connexion avec un membre de l'armée libre syrienne. Sans ce réseau, on ne pourrait pas se promener librement dans une région où il a encore des proches du pouvoir. On découvre une véritable toile d'araignée de cette armée libre au nord de la Syrie qui est tentaculaire et qui contrôle la région, village par village, avec un système de communication très sophistiqué", constate François Clauss.

L'armée syrienne libre aura en effet besoin d'un bon système de communication pour faire face à l'offensive terrestre du régime de Bachar al-Assad qui a débuté mercredi à Alep. L'armée du régime syrien a lancé mercredi son offensive terrestre sur cette ville du nord du pays, pénétrant avec des chars et des véhicules blindés dans le quartier rebelle de Salaheddine.

"Cette bataille est féroce. Elle se fait rue par rue, maison par maison, le quartier est totalement dévasté. Il y a une très grande disproportion des armes et avec énormément de courage les combattants se battent, parce que cette entrée de Salaheddine est la porte d'entrée dans Alep. Si les chars de Bachar al-Assad progressent,  ils pourront marquer des points décisifs", s'inquiète François Clauss.